Camille Lacourt célèbre son titre mondial sur 50 mètres dos, le 30 juillet 2017, à Budapest. (FERENC ISZA / AFP)

Un été chargé dans les bassins. A deux ans des Jeux olympiques de Paris, les nageurs français vont côtoyer le gratin de la natation, et même plutôt deux fois qu’une. En moins de deux mois, les Bleus enchaîneront les Mondiaux à Budapest (du 18 au 25 juin), puis les championnats d’Europe à Rome (du 11 au 17 août). Pour certains, c’est l’occasion de gagner leur première sélection en grand bassin ; pour d’autres, l’objectif est d’enrichir leur palmarès.

Avec une seule médaille glanée à Tokyo, celle en argent de Florent Manaudou sur 50 mètres nage libre, la natation française avait connu des JO ternes. Où est sont les Bleus ? Camille Lacourt, dossiste multiple médaillé aux championnats d’Europe et du monde, désormais consultant pour France Télévisions, revient pour franceinfo: sport sur l’importance de l’étape hongroise, notamment pour la nouvelle génération.

Franceinfo: sport : Avec 14 garçons et 7 filles engagés, la sélection française affiche un visage en partie renouvelé. Que pensez-vous de la nouvelle génération ?

Camille Lacourt : Beaucoup de jeunes sont en train de monter. C’est une génération qui a mis un peu de temps à naître par rapport à la précédente. Elle avait besoin de grandir, d’évoluer et de mûrir. 

Depuis les retraites sportives de votre génération dorée (Laure Manaudou, Alain Bernard, Yannick Agnel, Jérémy Stravius…), la natation française a du mal à rebondir. Comment expliquer ce trou générationnel ? 

Notre génération dorée était un miracle. En France, tout le monde a cru que, comme c’était arrivé une fois, cela n’allait pas s’arrêter. Malheureusement, la natation ne possède pas le vivier du football, il n’existe pas autant de stades de foot que de piscines, on n’obtient pas d’horaires aménagés facilement. Tout est compliqué. Aujourd’hui, on voit apparaître des nageurs qui ont grandi avec nous à la télévision, qui ont débuté la natation à ce moment-là. C’est normal qu’il ait fallu un peu de temps entre les deux.  

Camille Lacourt célèbre son titre mondial sur 50 mètres dos, le 30 juillet 2017, à Budapest. (FERENC ISZA / AFP)

Que peut viser l’équipe de France aux Mondiaux ? 

On peut s’attendre à des podiums. Evidemment, notre tête d’affiche, Florent Manaudou, représente toujours une chance de médaille. Le jeune Léon Marchand (20 ans) est aussi très attendu : il est en train de monter aux Etats-Unis et il y a fait des performances géniales. Pour moi, il a clairement des chances d’aller chercher des titres, que ce soit sur 200 ou 400 mètres 4 nages. Ce qu’il a réalisé en yards, ce sont des temps de très très haut niveau mondial.

Chez les filles, Marie Wattel progresse chaque saison depuis quelques années. Elle était déjà une très bonne nageuse, mais elle est désormais devenue vraiment athlétique. Sur 100 mètres nage libre et 100 mètres papillon, il faudra la suivre. Enfin, on aura des jeunes qui vont essayer d’aller chercher une demi-finale ou une finale. Pour eux, l’objectif n’est pas la médaille, mais de grandir beaucoup plus vite. 

Avec Paris 2024 en vue, vaut-il mieux emmener un maximum de nageurs avec des critères plus faciles à atteindre ou continuer de sélectionner une équipe compétitive ?

Quand on va aux championnats du monde ou d’Europe, il faut viser haut. L’expérience ne se prend que si on est compétitif.

« Si le nageur s’arrête en série, il ne prendra pas d’expérience, il fait juste le voyage. Pour ceux qui cherchent à atteindre des médailles ou des titres, c’est un poids lourd à porter d’avoir « des touristes » à côté. »

Camille Lacourt, quintuple champion du monde de natation

à franceinfo: sport

L’équipe de France qui part à Budapest est bonne, avec des jeunes qui possèdent un très gros potentiel. Certains sont encore trop jeunes pour aller chercher des titres et des médailles, mais dans un futur pas très lointain, ce sera clairement le cas. 

Cette génération pourrait être prête pour Paris 2024. Tous ont envie de briller à domicile. C’est une telle chance de pouvoir nager devant son public qu’ils doivent avoir les dents longues. C’est pour cette raison que ces championnats du monde ne seront pas qu’une prise d’expérience. Ils vont avoir vraiment envie de se surpasser pour continuer de progresser et non pas seulement être spectateurs. 

Dix ans après le titre olympique à Londres, le relais masculin du 4×100 m n’a pas été sélectionné à Budapest. Pourquoi ?

Je pense qu’il faut faire le deuil de la génération passée et laisser du temps. Dans la natation française, on ne peut malheureusement pas être à flux tendu. Nos crawleurs sont vraiment très jeunes, à part Maxime Grousset qui, d’ailleurs, représente également une chance de médaille aux Mondiaux sur 50 et 100 mètres. Derrière, il y a un petit creux. 

Mehdy Metella est blessé à l’épaule et a fait une saison blanche. Lui et Grousset sont les deux porte-drapeaux du 4×100. Je suis sûr que, derrière, ça va vite progresser pour les rejoindre. Florent Manaudou pourrait aussi, pourquoi pas, monter sur cette épreuve pour un relais. Il manque encore deux ou trois nageurs pour que ce soit très fort. 

A l’inverse, avec Mewen Tomac et Yohann Ndoye Brouard, ainsi qu’Analia Pigrée et Emma Terebo, l’école du dos se porte toujours bien. Est-ce une spécificité française ?

Je n’ai pas vraiment d’explication. Il y a des talents et de bons entraîneurs. Quand on est plusieurs en France à se tirer la bourre plusieurs fois par an, cela aide à progresser plus vite. Chez les filles comme chez les garçons, on retrouve cette effervescence.

Ils ont pu voir que nous en avions été capables alors qu’on a deux bras et deux jambes comme eux. Donc ils prennent leur chance et s’entraînent avec de bons coachs, qui ont aussi l’expérience de nos carrières. Pour le niveau mondial, ils ont encore un cap à passer. Il faut qu’ils grattent quelques dixièmes mais c’est jouable, car ils ont nagé à un très haut niveau pendant leur préparation.

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