Des premiers émois sur l'eau aux récits de course, chaque portrait permet de cerner la personnalité de la protagoniste. (©Stéphane Dugast / Editions Vagnon)

Elles s’appellent Florence Arthaud, Isabelle Autissier, Ellen MacArthur ou Alexia Barrier, pour n’en citer que quelques-unes. Elles ont en commun le goût du large et l’esprit de compétition. Dans leurs histoires, il est question de rêves et de passion mais aussi de détermination, d’exigence et de persévérance. Ce sont les « folles épopées océaniques » de vingt d’entre elles qu’a choisi de raconter Stéphane Dugast dans le livre Navigatrices, sorti quelques jours avant le départ de la 12e édition de la Route du Rhum. Une course à laquelle participent cette année Catherine Chabaud, Pipe Hare, Isabelle Joschke et Samantha Davis, quatre des aventurières de l’ouvrage. 

Si prendre la mer n’est plus un loisir réservé aux hommes comme ce fut longtemps le cas, rappelle l’auteur dans un prologue riche en anecdotes historiques, les femmes sont encore minoritaires dans le milieu de la voile. Jusqu’à une date pas si éloignée de nous, « ces messieurs adressent un reproche de taille à la gent féminine (certains continuent d’ailleurs de le faire), écrit Stéphane Dugast : les femmes manquent de force physique, notamment pour les manoeuvres« . Pourtant, courses après courses, celles qui ont choisi la mer comme terrain de jeu ont montré qu’elles avaient les mêmes qualités que leurs concurrents masculins et certaines se sont hissées aux premières places des classements. Trois ont fini en tête lors de précédentes Routes du Rhum : Florence Arthaud en 1990, Ellen Mc Arthur en 2002 et Anne Caseneuve en 2014. Et depuis la réussite de la première circumnavigation d’une femme en solitaire, la polonaise Krystyna Chojnowska-Liskiewicz en avril 1978, d’autres se sont brillamment illustrées dans ce qui constitue souvent le graal des marins.

L’océan ne se soucie guère de savoir si vous êtes un homme ou une femme, nous sommes juste des marins qui faisons ce que nous aimons faire. Point !

Dee Caffari

Grâce aux progrès techniques sur les bateaux, la constitution n’est plus un critère déterminant. Et les femmes possèdent les mêmes talents de navigatrices et la même force de travail que leurs confrères dans un des rares sports qui ne différencie pas les genres en compétition. Mais la recheche de sponsors reste, aujourd’hui encore, plus compliqué pour une navigatrice… Qu’à cela ne tienne, la pugnacité et la force de conviction, ces navigatrices connaissent ! 

Parmi les personnalités dont on découvre les parcours parfois houleux, au fil des 150 pages du livres, plusieurs traits de caractères reviennent à chaque portrait. Qu’elles soient skippeuses, rameuses ou véliplanchiste, qu’elles soient tombées dans le grand bain enfant ou qu’elles aient découvert l’océan plus tard, qu’elles aient navigué dans les années 70, 80 ou aujourd’hui, ces 20 femmes aguerries ont toutes ressenti l’attrait irrésistible d’un horizon sans limite et le besoin, presque viscéral, d’être sur l’eau, malgré les souffrances et les coups durs inévitables. Avaries techniques, démâtages voire chavirages comme Isabelle Autissier dans le Pacifique Sud ou Peggy Bouchet qui achevait presque sa traversée de l’Atlantique à la rame… la course au large ne ménage pas le marin (le mot n’existe pas au féminin). Mais la liberté, « la plénitude » comme le dit Miranda Merron, est à ce prix et on admire, en cernant les personnalités de chacune à chaque récit, leur incroyable courage et leur audace.

J’aime me perdre dans l’océan et que ça dure longtemps. Pour moi, au large, tout change; la notion du temps, mais aussi de l’espace, quelque chose qui se détend et s’élargit.

Isabelle Joschke

Podcast « Seule en mer »

Chacune à sa manière se confie sur la nécessaire résilience quand tout ne se passe pas comme prévu, l’abnégation, le stress, la fatigue et les émotions qui déferlent aussi puissamment que les vagues. Des moments de doute ou de joie que certaines ont raconté avec brio, dans des livres, une web série (Clarisse sur l’Atlantique) ou pendant le temps de la course, comme les délicieux récits de Miranda Merron lors du dernier Vendée Globe.

Et parce que la compétition n’est pas la finalité de toute une vie, plusieurs d’entre elles, à l’image d’Isabelle Autissier, Catherine Chabaud, Maud Fontenoy, Raphaëla Le Gouvello, Ellen MacArthur ou Anne Quéméré, se sont engagés dans la défense d’une cause qui leur tient à coeur :  la protection de l’environnement et des océans en particulier. Par le biais d’associations, en intégrant le milieu politique, en écrivant des livres ou en réalisant des documentaires.  

Ces tranches de vie d’une grande richesse ont inspiré plus d’une femme, marin ou pas, et continueront certainement à le faire. Elles ont gagné le coeur du public et même au delà : une rose porte le nom d’Isabelle Autissier et un astéroïde celui d’Ellen MacArthur.

« Navigatrices », de Stéphane Dugast aux éditions Vagnon (octobre 2022). 29,95€.

Reporter de nombreuses années pour Cols Bleus, le journal de la marine nationale, également auteur et réalisateur, Stéphane Dugast a lui aussi un faible pour l’air iodé et les embruns et une vraie empathie pour les gens de mer. Il lui a cependant fallu faire un choix. Son livre propose donc les portraits de Florence Arthaud, Isabelle Autissier, Alexia Barrier, Peggy Bouchet, Dee Caffari, Catherine Chabaud, Clarisse Crémer, Samantha Davies, Tracy Edwards, Maud Fontenoy, Pip Hare, Naomi James, Isabelle Joschke, Raphaëla Le Gouvello, Anne Liardet, Ellen MacArthur, Miranda Merron, Mylène Paquette, Anne Quéméré et Marie Riou.

Cliquez ici pour lire l’article depuis sa source.

Laisser un commentaire