Frappées par de violentes intempéries récemment, les routes de France se dégradent. Une situation préoccupante mais qui serait plutôt la conséquence d’une dégradation à plus long terme, liée au manque de moyens et à une gestion plus aléatoire des travaux de réparation.
Faut-il lancer un plan d’urgence pour sauver les routes de France? Avec les fortes intempéries subies ces dernières semaines et plus globalement le changement climatique en cours, le réseau routier hexagonal se retrouve en effet de plus en plus dégradé.
Des chiffres alarmants
Ce réseau est pourtant essentiel, mais son entretien repose largement sur les communes. Sur 1,1 million de kilomètres de routes, 705.00 kilomètres dépendent des municipalités, 380.000 kilomètres des départements et 12.000 kilomètres pour l’Etat.
« Toutes les routes sont concernées, les départementales, les communales… sauf les autoroutes car elles sont sous contrat avec l’Etat et ont intérêt à être bien entretenues », rappelle Alexandre Legendre, porte-parole de l’association de la Ligue des conducteurs, ce mercredi sur BFMTV.
Les chiffres sont en effet alarmants: 20% des routes sont en mauvais état, selon l’Office national de la route.
D’élève modèle des infrastructures routières en 2012, la France fait désormais figure de cancre. En moins de 10 ans, le pays a perdu 18 places dans un classement des réseaux les mieux entretenus du Forum économique mondial publié en 2019.
Après la cacophonie du passage à 80km/h sur le réseau national et le contexte très tendu de l’entrée en application du contrôle technique 2 roues, l’état des routes n’est malheureusement pas sans conséquence sur le nombre d’accidents.
« Dans 30% des accidents mortels, le facteur infrastructure apparaît comme un des facteurs mis en cause », relève Alexandra Legendre.
Un taux supérieur à celui des accidents mortels causés par l’alcool au volant, 28%, d’après l’association Prévention routière.
Un manque de moyens et de compétences
Mais comment expliquer cette dégradation récente?
« Il a bon dos le changement climatique, le démantèlement en 2010 des DDE, les fameuses directions départementales de l’équipement, a fait beaucoup pour accélérer la dégradation du réseau: ces experts qui connaissaient tellement bien le réseau local ont disparu », souligne Alexandra Legendre.
Autre cause qui revient souvent, le manque de moyens. Le maire de Langon, près de Bordeaux, explique à RMC que l’entretien des routes représente près de la moitie du budget de sa commune. Un budget qui n’a pas augmenté depuis dix ans, avec des aides de l’État divisées par trois sur cette période.
« Ce n’est pas parce qu’il reste des trous dans les chaussées, ou qu’on n’a pas envie d’agir. C’est tout simplement qu’on ne peut pas transférer la dette de l’État sur les collectivités. C’est au risque de sujet d’aménagement et de sécurité notamment sur les voies routières”, témoigne-t-il.
Au niveau des départements, on met aussi en cause une inégalité sur l’attribution des ressources nécessaires.
“Nous avons un million de kilomètres de route et seulement 1% bénéficie de 99% de recettes de péage. Nous avons le droit à une part du gâteau”, réclame François Durovray, en charge de la mobilité à l’Association des départements de France (ADF).
Alors que communes et départements doivent faire face à près de 12 milliards d’euros d’investissements pour cette mission, « l’État, les régions (qui n’entretiennent aucun réseau) et les sociétés d’autoroutes encaissent les 40 milliards que la route génère, notait-il dans un communiqué de l’ADF.
Un problème financier, mais pas uniquement pour la porte-parole de la Ligue des conducteurs:
« Les maires ont beaucoup de difficultés, mais le problème c’est aussi comment l’argent est dépensé? Comment vous faites les travaux? Comment vous vous assurez que les travaux sont bien faits, une fois réalisés? Si vous mettez une nouvelle couche de bitume, pendant un an très bien, mais s’il est mal posé, il va très vite se dégrader donc il y a un vrai problème d’investissement de long terme. »
« La vérification que le cahier des charges est bien respecté, cela se fait sur la construction de nouvelles routes, mais beaucoup moins fréquemment sur les réparations de routes existantes: une fois que les travaux sont faits il y a très peu d’audits réalisés », poursuit Alexandra Legendre.
Identifier les routes à problèmes
Face à cette problématique, la Ligue des conducteurs propose déjà de mieux signaler les dégradations comme les nids-de-poule, ralentisseurs trop hauts, aménagements inadaptés ou signalisation incohérente.
L’application Activ’ Route « permet d’indiquer des points dangereux de circulation, de les documenter et de les transmettre aux collectivités locales concernées », peut-on lire sur le site de l’association.
« On identifie le gestionnaire de la voirie concernée et on lui transmet ce signalement: c’est gagnant pour l’usager comme pour la collectivité », note Alexandra Legendre.
Autre initiative intéressante, la mise en place d’une cartographie des infrastructures les plus exposées aux risques climatiques et celles à remettre en état de manière prioritaire, indique Le Figaro. Un travail réalisé actuellement par le syndicat des constructeurs de réseaux routiers, Routes de France, en partenariat avec la Fédération nationale des travaux publics et Météo France.
Prochain rendez-vous attendu: les assises de la route organisées en juin par l’Association des départements de France, afin de réfléchir à un nouveau modèle économique pour l’entretien du réseau.
Face à l’état actuel des routes et l’arrivée potentielle de mégas-camions de 60 tonnes, il y a en effet urgence à agir.
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