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Un arrêté prévoit des fermetures de la pêche durant un mois, mais avec de nombreuses dérogations, qui suscitent l’ire des défenseurs de l’environnement.

La France annonce renforcer son « plan d’action » pour réduire les captures accidentelles de dauphins. Un arrêté publié jeudi instaure une période d’interdiction de pêche d’un mois, « du 22 janvier au 20 février inclus », pour tous les bateaux de 8 mètres ou plus dans le Golfe de Gascogne, pour les années 2024 à 2026.

C’est « la première fois » qu’est imposée une « large fermeture spatio-temporelle de l’activité de pêche » pour lutter contre les échouages massifs de cétacés à « la période connue comme présentant le plus de captures », souligne le gouvernement dans un communiqué.

L’exécutif évalue à 600 le nombre de navires français concernés par cette mesure, qui a aussi « vocation à s’appliquer » aux navires étrangers.

Des dérogations

Mais de nombreuses dérogations sont introduites. Pour l’année 2024, les navires « équipés de dispositifs techniques actifs de réduction des captures accidentelles », comme des répulsifs acoustiques ou des balises, ou « d’un système actif d’observation électronique à distance », c’est-à-dire des caméras embarquées, pourront continuer à pêcher sans interruption, selon l’arrêté.

En cas de panne du dispositif, une dérogation pourra aussi être accordée « pour la reprise d’une activité de pêche dans une limite de cinq jours si l’armateur du navire apporte un justificatif d’impossibilité immédiate de réparation ou de remplacement ».

Le comité national des pêches a « pris acte » de ces mesures et « espère désormais pouvoir déployer au plus vite, à grande échelle, les différents dispositifs ».

« Déni de démocratie »

Le nouveau texte ne satisfait pas les ONG. La Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et Sea Shepherd ont d’ores et déjà annoncé leur intention de saisir le Conseil d’État.

Le président de la LPO, Allain Bougrain-Dubourg a dénoncé un « déni de démocratie », tandis que France Nature environnement (FNE) fustige « une lecture bidonnée des recommandations scientifiques ».

Le CIEM (Centre international d’exploration marine), l’organisme scientifique international de référence, avait émis un avis en mai recommandant des fermetures de trois mois en hiver (de décembre à mars) et d’au moins un mois en été, périodes de pics de mortalité des dauphins.

Selon FNE, la décision de limiter la fermeture à un seul mois ne pourrait au mieux réduire l’hécatombe que de 17%, contre 44% de pertes en moins pour trois mois.

Décision du Conseil d’État

Cet arrêté intervient à la suite d’une décision de mars 2023 du Conseil d’État, qui avait été saisi par des ONG de défense de l’environnement. La plus haute juridiction administrative française avait jugé les mesures actuelles insuffisantes pour « garantir un bon état de conservation » des espèces de petits cétacés (dauphins communs, grands dauphins et marsouins communs).

Elle avait ordonné au gouvernement de fermer certaines zones de pêche dans l’Atlantique pour un « temps approprié », lui donnant six mois pour agir.

Des solutions technologiques

Concernant les dérogations, le gouvernement se justifie en indiquant que la probabilité est « faible » de captures accidentelles par les navires de moins de 8 mètres. Il estime aussi que les systèmes d’observations permettront « l’amélioration des connaissances pendant la période à plus fort risque ».

Le président du comité national des pêches, Olivier Le Nezet, souligne à cet égard la mobilisation « inédite » des pêcheurs, dont aucun « n’est heureux quand il remonte accidentellement un dauphin dans ses filets » et qui seront des centaines à expérimenter des dispositifs cet hiver.

Trois dispositifs sont actuellement testés par les fileyeurs (nom des navires concernés, NDLR): un répulsif acoustique posé sur la coque, une balise posée sur le filet qui s’enclenche à l’approche du dauphin et un troisième dispositif intégré aux mailles du filet avec une portée de 25 mètres.

Principale cause de décès

L’observatoire Pelagis a recensé 1.380 échouages de petits cétacés entre décembre et avril dernier sur le littoral atlantique, sachant qu’une majorité des cadavres coulent ou sont emportés au large et n’arrivent donc jamais jusqu’aux plages. Selon lui, la population de dauphins dans le golfe de Gascogne était estimée à environ 200.000 individus en 2011-2012.

Selon le CNRS, pour près de 90% des dauphins communs retrouvés sur le littoral atlantique, les mammifères ont été piégés dans les filets de pêche déployés, comme le suggèrent les traces observées sur les cadavres. « Faute de pouvoir s’en libérer, ils n’ont pu remonter à la surface et sont morts asphyxiés », explique Olivier Van Canneyt, biologiste à l’observatoire Pelagis.

Attirés vers les filets de pêche par leurs proies

D’après une nouvelle étude, les dauphins pourraient être attirés vers les filets de pêche par leurs proies, selon des scientifiques qui ont observé d' »étonnants » bancs de petits poissons très près du fond dans le Golfe de Gascogne, augmentant le risque de captures accidentelles.

« On observe des captures de dauphins dans des filets à sole à moins d’un mètre du fond. On avait du mal à comprendre comment les dauphins pouvaient se prendre dans des filets aussi près du fond » alors que ces mammifères évoluent plutôt près de la surface, explique Mathieu Doray, chercheur en écologie pélagique et halieutique à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer).

Les dauphins n’ont pas été observés directement en train de capturer ces proies au fond de l’eau mais « ce comportement alimentaire est ici déduit du croisement des données sur la distribution des poissons et le régime alimentaire des dauphins », selon un communiqué des scientifiques du projet.

La Commission européenne, qui a déjà mis la France en demeure d’agir, à deux reprises, lui avait demandé le 15 juillet 2022, de mettre en œuvre « des mesures concernant la protection des espèces marines protégées et les captures accidentelles de cétacés ».

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