Une IA de Google fonctionne vraiment ! Et elle est parisienne



La présentation de Bard la semaine dernière à Paris, la supposée réplique de Google aux avancées d’OpenAI et de Microsoft en matière d’Intelligence Artificielle, a laissé nombre d’observateurs sur leur faim. Mais il serait très hâtif de juger à l’aune de ce mouvement précipité la puissance réelle de Google dans ce domaine. Avant que ChatGPT n’apparaisse à la fin de l’année dernière sur vos écrans et dans les médias, l’expertise de Google en matière d’analyse de données et de conception de modèles d’IA ne pouvait être mise en doute.

Aussi, nous avons profité de notre venue au siège de Google France pour fouiner un peu et aller au delà des slides soporifiques sur Bard, le sujet du jour. Et nous avons trouvé un projet de recherche qui illustre la performance de l’IA de Google dans un domaine peu couvert, mais très intéressant : la place des femmes dans la recherche scientifique.

Car il semble bien qu’il aura fallu attendre l’Intelligence Artificielle pour réparer l’injustice causée par la nature de l’homme aux femmes de sciences. Pour nombre d’entre elles, les contributions ont été masquées. Et leurs redécouvertes passent par Wahshington, aux Etats-Unis, et le laboratoire Arts et Culture de Google, basé à Paris.

157 millions d’objets et de spécimens à investiguer

Mais partons tout d’abord aux Etats-Unis, direction le Smithsonian Institution, situé dans la capitale fédérale. Créé en 1846, cet établissement de recherche scientifique est aussi chargé de diffuser le savoir, selon la volonté de son fondateur, James Smithson, un mécène anglais.

Il regroupe 21 musées, des sciences naturelles à l’art en passant par la technologie. Et ses archives sont, disons, monumentales, avec plus de 157 millions d’objets et de spécimens ! Mais de ces fonds, de ce long passé, remontent très peu de travaux scientifiques identifiés et attribués, officiellement et distinctement, à des femmes. Et pourtant, elles ont participé à la production de savoir. Pourquoi cette absence ?

« Dans nos collections, explique sur son site Dr. Elizabeth Harmon, la conservatrice en charge du programme Women in science au Smithsonian, quelques les femmes sont référencées avec le nom de leur mari. Certaines ont travaillé sans être payées ou, pour d’autres, c’est l’absence de titre qui masque l’étendue de leurs contributions. Ou ce sont des photos où figuraient des femmes qui n’étaient pas éditées. » Face à la masse des documents des musées à exploiter, les responsables du Smithsonian ont décidé de  collaborer avec le Lab Arts & Culture de Google, basé à Paris, afin de mieux attribuer les réalisations scientifiques.

Collaboration multidisciplinaire


Revenons donc à Paris. Au siège de Google France. C’est là qu’est hébergé le Laboratoire Arts et Culture, dirigé par Laurent Gaveau. Une équipe d’ingénieurs et d’artistes résidents y conçoivent et testent des outils avec un objectif : permettre au grand public de découvrir ou d’accéder à l’art et à la culture d’une nouvelle façon, entre autres par des activités interactives en ligne.

Et puis, explique Laurent Gaveau, il s’agit d’utiliser « l’Intelligence Artificielle comme un outil pour répondre à des problématiques du secteur culturel, pour aider des responsables de musées, des chercheurs, des archéologues à résoudre des problèmes. »

C’est ainsi que « les équipes du Smithsonian sont venues nous voir avec cette idée, de réfléchir comment, en utilisant l’Intelligence Artificielle, essayer de repérer des schémas à l’intérieur des archives via un certain nombre d’outils qu’on a développés avec eux. C’est un travail étroit fait avec une chercheuse en résidence [au Lab], Lynn Cherny. C’est une chercheuse en Intelligence Artificielle et en analyse de données. Avec la curatrice [Elizabeth Harmon], qui a une compétence historique sur les archives, toutes les deux travaillent main dans la main pour obtenir des informations complémentaires et combler les manques. »

Carte de taxonomie indiquant deux espèces collectées par Rathbun et Dandridge et identifiées par Richardson. 1911. National Museum of Natural History.


Carte de taxonomie indiquant deux espèces collectées par Rathbun et Dandridge et identifiées par Richardson. 1911. National Museum of Natural History.

Les outils d’IA lancés sur les archives du Smithsonian


Pour regrouper les parcelles de travaux éparpillées dans les documents du Smithsonian Institute et pouvoir remonter éventuellement à la même auteure, l’équipe utilise, d’après les explications de Lynn Cherny, trois types d’outils.

  • D’abord il y a l’« explorateur de nodes », une sorte de réseau visuel où sont représentés les personnes qui ont été enregistrés ensemble, dans un même document (par exemple une fiche de compte-rendu).
  • Un autre outil rassemble toutes les photos d’archives des chercheurs et chercheuses qui sont similaires : cela peut aller de photos de réunion de travail à des portraits.
  • Et le troisième outil est une grosse base de données combinant des graphes et des tableaux et sur laquelle il est possible de faire jouer des filtres tels le nom de famille, l’année ou la discipline.

Ainsi, par exemple, l’équipe mixte Google Lab/Smithsonian a repéré les liens entre trois femmes, dont deux qui sont allées ensemble en expédition pour des travaux de biologie réalisés au début du 20ième siécle. La biologiste spécialiste des crustacés Mary Jane Rathbun est l’une des trois.

Mary Jane Rathburn était une experte mondiale de la carcinologie (étude des crustacés), 1894. Archives Smithsonian Institution.

Elle aurait commencé à travailler auprès de son frère biologiste Richard Rathbun sur le terrain, puis est devenue assistante conservatrice au département des invertébrés au Smithsonian. Avant de devenir conservatrice honoraire, elle aurait travaillé pendant 26 ans sans être payé, dit Elizabeth Harmon. Période pendant laquelle cette spécialiste des crabes a pourtant poursuivi ses recherches et écrit plusieurs livres…

Pour aller plus loin sur l’IA de Google

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