« Je ne vais pas mentir, quand j’imaginais le groupe final de douze joueurs pour l’Euro, je me disais : ‘lui, c’est sûr, il n’y sera pas' ». Evan Fournier parlait ainsi de son coéquipier Terry Tarpey III quelques minutes après une victoire précieuse de la France contre la Lituanie (77-73), samedi 3 septembre. Titulaire pour la première fois avec les Bleus, le Franco-Américain y avait joué un rôle majeur dans ce succès capital. Depuis il n’a plus quitté le cinq de départ de Vincent Collet, et devrait encore y être, samedi 10 septembre, face à la Turquie en huitièmes de finale.
Un statut difficile à imaginer quelques semaines plus tôt alors que sa sélection pour la compétition n’avait rien d’une évidence. Même pour le sélectionneur : « Je dois reconnaître que quand j’ai donné une liste de 17 joueurs, je ne pensais pas qu’il ferait partie des douze sélectionnés », glissait Vincent Collet.
Premier match dans le 5 majeur pour Terry Tarpey : 8 PTS, 4 REB, 4 INT, 1 CT en 21 MIN #TeamFranceBasket x @Taarpey | #PassionnémentBleu | #EuroBasket | #LTUFRA pic.twitter.com/bof0AufCxb
— Équipes de France de Basket (@FRABasketball) September 4, 2022
Son rôle n’a pourtant fait que grandir à tel point que l’arrière-ailier a passé à peine moins de trente minutes sur le parquet lors du match référence des Bleus contre la Bosnie (81-68), mardi. Le troisième plus gros temps de jeu derrière Evan Fournier et Thomas Heurtel. « Le voir gratter des minutes aux yeux du sélectionneur est quelque chose qu’on ne pouvait même pas imaginer, s’enthousiasme Vincent Loriot, directeur sportif du Mans, club dans lequel évolue Terry Tarpey III depuis 2017. Je ressens de la reconnaissance. Enfin le basket français et continental prennent conscience de la valeur ajoutée de ce joueur. »
Comment ce joueur, inconnu du grand public, malgré ses 12 sélections avant le début de l’Euro, s’est-il rendu aussi indispensable ? Dans un groupe en reconstruction en l’absence de ses cadres Nicolas Batum et Nando De Colo, le Manceau s’est parfaitement intégré. « Pour construire une nouvelle équipe, il est très important que chacun puisse trouver son rôle. Terry (Tarpey III) fait partie de ceux qui ont trouvé leur place », salue Vincent Collet. « Il a tellement de coeur, il joue pour l’équpe, donne tout ce qu’il a », abonde Evan Fournier.
« Si nous voulons réussir, il faut qu »on comprenne qu’il est le parfait exemple de comment on doit se comporter. Nous avons besoin de gars comme lui. »
Evan Fournier, capitaine de l’équipe de Franceen conférence de presse
« Il me surprend car, si son rendement défensif est à la hauteur des espérances, il est également très efficace en attaque en jouant simple, avec de la réussite sur des tirs ouverts qu’il ne refuse pas », analyse Christophe Denis, ancien coach de Paris-Levallois. Depuis le début de la compétition, le Tricolore tourne à 5,4 points (56% à trois-points), trois rebonds, 1,8 passe décisive de moyenne. Avec 2,2 interceptions par match, il est même le meilleur gratteur de ballons de l’Euro.
Ses qualités défensives et de dévouement pour le collectif ne sont pas nouvelles chez Terry Tarpey III. Vincent Loriot le découvre de ses propres yeux à Nanterre, en juin 2016, lors d’un match amical avec l’équipe de France A’. Pendant la rencontre, le numéro 0 se luxe le doigt en se jetant sur un ballon qui file en dehors des limites du terrain. « Il demande au kiné de lui remettre le doigt en place, puis il est aussitôt reparti au combat. On est tombés ‘in love’ immédiatement, raconte le directeur sportif sarthois. C’est tellement rare un joueur qui ne calcule pas ses efforts au risque de se blesser. »
Sa carrière professionnelle bascule justement grâce à cette campagne avec l’équipe de France A’, qu’il préfère rejoindre aux dépens d’un camp d’été avec la franchise NBA des Boston Celtics. Né à Poissy pendant la carrière professionnelle de son père (Terry Tarpey Sr), l’international tricolore (première sélection en novembre 2021) repart aux Etats-Unis dès l’âge de trois ans. De l’autre côté de l’Atlantique, il gardera des attaches très fortes avec le France, dont il tire la nationalité de son arrière grand-père paternel, originaire de l’Ariège.
Après quatre années à l’université de William & Mary Tribe, dans le comté de Virginie (Etats-Unis), le basketteur rejoint l’équipe de France A’ sans parler un mot de la langue de Molière. « Il nous avait demandé de ne pas lui parler anglais, se souvient Christophe Denis, entraîneur assistant lors des trois campagnes de cette équipe de France réserve. Pour faciliter les choses, je lui traduisais les consignes mais quand on sortait du terrain, il voulait qu’on lui parle uniquement français. Cette volonté d’intégration m’avait marqué. »
Terry Tarpey troisième du nom signe dans la foulée à Denain (Nord), en Pro B. Un club réputé pour développer des jeunes joueurs à fort potentiel. Avant de rejoindre le Mans Sarthe Basket, en 2017, pour imiter son père, Terry Tarpey Sr, joueur du club de 1994 à 1997. « Suivre les traces de son papa était un rêve pour lui », confie Vincent Loriot, qui dresse le portrait d’un « gendre idéal, un vrai gentil dans un monde vicié par l’argent ».
C’est surtout sur le parquet que Terry Tarpey III séduit tout son monde. Années après années, ses statistiques sont sensiblement les mêmes alors que le niveau s’élève. « La marque des très grands, c’est d’être capable de faire très bien ce qu’ils ont toujours su faire, assure Christophe Denis. Peu importe l’adversité, il arrive toujours à le reproduire. »
Encore sous contrat jusqu’en 2024 avec Le Mans, le poste 2 n’est plus inconnu sur la scène continentale. « On ne va pas se mentir, on se rend compte d’un intérêt très croissant à son encontre », admet le directeur sportif du MSB, Vincent Loriot, dont le téléphone a beaucoup sonné depuis dix jours. « Il ne restera pas longtemps au Mans, estime Christophe Denis. Il fait un tabac et je pense que beaucoup d’équipes d’Euroligue discutent de lui en ce moment. »
Pour lui, le regard est davantage tourné vers l’objectif ultime de son itinéraire sur les parquets : « Depuis le début de ma carrière, l’objectif est 2024 : d’être en équipe de France pour les Jeux olympiques à Paris », a-t-il confié à l’AFP. Au regard de son Eurobasket, cela n’a plus rien d’utopique.
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