ce qu'il faut savoir du procès contre Michel Platini et Sepp Blatter, qui s'ouvre mercredi en Suisse

C’est une affaire qui a provoqué la chute de deux dirigeants majeurs du football mondial. Mis au ban fin 2015, l’ancien patron de l’UEFA Michel Platini, et l’ex-président de la Fédération internationale de football (Fifa) Sepp Blatter comparaissent pour « escroquerie » à partir de mercredi 8 juin devant le Tribunal pénal fédéral de Bellinzone, au sud-est de la Suisse.

Le procès des deux hommes, qui concerne l’affaire d’un paiement suspect de près de deux millions d’euros, devrait durer jusqu’au 22 juin. Une décision est attendue le 8 juillet. Franceinfo: sport fait le point sur ce qui constitue l’un des plus importants scandales dans le football au XXIe siècle.

De quoi Platini et Blatter sont-ils accusés ?

L’affaire principale cible un paiement de 2 millions de francs suisses (1,8 million d’euros) de la Fifa à Michel Platini en 2011, pour un travail de conseiller achevé en 2002. L’ancien international français a en effet conseillé Sepp Blatter entre 1998 et 2002, lors du premier mandat du dirigeant suisse à la tête de la Fifa, selon un contrat écrit signé en 1999.

Celui-ci convenait d’une rémunération annuelle de 300 000 francs suisses, facturée par l’ex-capitaine des Bleus et intégralement payée par la Fifa. Or, en 2011, soit presque neuf ans après la fin de son activité de conseiller, Michel Platini « a fait valoir une créance de 2 millions de francs suisses »acquittée par l’instance du football « avec le concours » de Sepp Blatter, affirmait en novembre le ministère public de la Confédération suisse.

Selon ce dernier, « les preuves recueillies (…) ont renforcé le soupçon que ce paiement à Platini a été effectué sans fondement »Michel Platini, 66 ans, et Sepp Blatter, 85 ans, ont ainsi été mis en accusation pour « escroquerie », « gestion déloyale », « abus de confiance » et « faux dans les titres ».

Quelle est leur défense ?

Depuis le début de l’enquête, les deux hommes martèlent qu’il s’agit d’un reliquat de paiement pour un travail de conseiller effectué par le Français entre 1999 et 2002. Ils déclarent avoir oralement décidé, et sans témoin, d’un salaire annuel d’un million de francs suisses, sans que les finances de la Fifa n’en permettent à l’époque le règlement à Michel Platini. Ils assurent avoir simplement réglé le solde avec retard, en 2011.

Fin 2018, Michel Platini a déposé plainte contre X pour « dénonciation calomnieuse » et « association de malfaiteurs« . « Tout ça, c’est une conspiration, un complot (…) On ne voulait pas que je sois président de la Fifa », a affirmé le Français, en novembre 2019, sur franceinfo.

Les deux accusé ont en outre dénoncé l’attitude de Gianni Infantino, notamment dans le déclenchement de l’enquête. Ancien bras droit du Français à l’UEFA et élu inattendu à la tête de la Fifa en 2016, l’Italo-Suisse est visé depuis 2020 par une procédure portant sur trois rencontres secrètes avec l’ancien chef du parquet. Toutefois, la justice suisse a refusé de lier les deux dossiers.

En avril dernier, Michel Platini a rendu public le dépôt d’une plainte à Paris contre Gianni Infantino pour « trafic d’influence actif » et contre Marco Villiger, ancien directeur juridique de la Fifa, pour « complicité de trafic d’influence actif ».

Quelles sont les sanctions prises contre les deux hommes depuis le début de l’affaire ?

Cette affaire a fait chuter les deux anciens dirigeants. Entre 2015 et 2016, Platini et Blatter ont alterné entre décisions de suspensions, renvois en appel et recours. D’abord suspendus en octobre 2015 par la commission d’éthique de la Fifa pour une durée de 90 jours, ils ont été tous les deux suspendus le 21 décembre par la Fifa de toute activité liée au football pendant huit ans. Deux mois plus tard, la suspension de Michel Platini et Sepp Blatter a été réduite à six ans par la commission de recours.

Début mai 2016, ​le Tribunal arbitral du sport a réduit la suspension de Platini de six à quatre ans, soit la durée d’un mandat. Celle de Blatter a été maintenue à six ans. Entre ces sept mois de procédure, l’ancien dirigeant français a annoncé, le 25 février, son retrait de l’élection à la présidence de la Fifa.

De son côté, Sepp Blatter est toujours sous le coup d’une procédure judiciaire dans un autre dossier, celui de l’attribution controversée du Mondial 2022 au Qatar. En novembre dernier, il a été entendu comme « témoin » dans le cadre d’une information judiciaire ouverte en France par le Parquet national financier (PNF). Une enquête préliminaire a été menée pendant trois ans par le PNF, qui a ensuite confié en 2019 les investigations à un juge d’instruction, pour « corruption active et passive », « recel » et « blanchiment ».

Que risquent les deux accusés ?

L’enjeu du procès est de lever le mystère autour de l’accord oral de paiement. Les deux accusés devront expliquer la contradiction entre le contrat de 1999, le fait que cette dette n’ait jamais été provisionnée par la Fifa, et le contraste avec les pratiques habituelles de l’instance. Cette dernière n’a en effet jamais rémunéré de salarié ou de consultant « sans base écrite », assurait son ancienne DRH dans le volet disciplinaire de la procédure.

La Fifa, partie civile dans cette affaire, entend se voir restituer le salaire et les charges sociales payés en 2011, « pour que l’argent détourné par les accusés à des fins personnelles soit restitué au seul et unique but auquel il était destiné : le football », a souligné à l’AFP Catherine Hohl-Chirazi, l’avocate de l’instance. L’escroquerie simple est passible de cinq ans de prison « ou d’une peine pécuniaire » dans le droit suisse.





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