De la fumée et de la lave sortent d'une nouvelle fissure lors d'une éruption volcanique à la périphérie de la ville évacuée de Grindavik, dans l'ouest de l'Islande, le 8 février 2024.

La péninsule de Reykjanes, qui est restée inactive pendant 800 ans, s’est réveillée en 2021 et a connu six éruptions volcaniques depuis. Alors que le moment et le lieu d’une éruption sont très difficiles à prévoir, la région se prépare.

Vers des éruptions à la chaîne? Une nouvelle éruption volcanique a eu lieu le jeudi 8 février au matin sur la péninsule de Reykjanes dans le sud-ouest de l’Islande. Il s’agit de la troisième dans la région depuis le 18 décembre et la sixième depuis 2021.

Les Islandais y sont habitués. « Il y a une éruption en moyenne tous les cinq ans », indique à BFMTV.com Jacques-Marie Bardintzeff, volcanologue à l’université Paris-Saclay.

Pourtant, la situation géologique semble s’intensifier ces derniers mois. Pour Jacques-Marie Bardintzeff, cela ne signifie pas l’entrée dans une forme d’ère volcanique pour tout le pays. Mais pour la région de Reykjanes, « il y a un changement complet depuis 2021 », concède-t-il.

« Avant cela, il n’y avait pas eu d’éruption volcanique dans la péninsule depuis 800 ans », souligne le volcanologue.

Les plaques tectoniques s’écartent

L’Islande est l’un des endroits du monde où l’activité volcanique est la plus intense. Elle compte une trentaine de volcans actuellement considérés comme actifs.

Pour cause: l’île a elle-même été créée par des éruptions volcaniques et est située à l’aplomb de ce qu’on appelle la dorsale médio-atlantique – une grande chaîne de volcans de 15.000 kilomètres de long qui traverse tout l’Atlantique et qui sépare les plaques tectoniques eurasienne et nord-américaine.

Ces plaques s’écartent très lentement l’une de l’autre, créant un espace pour la roche chaude en fusion, le magma. Au fur et à mesure que ce dernier s’accumule sous terre, la pression augmente jusqu’à ce qu’il éclate à la surface lors d’une éruption.

« Mais (les plaques) ne semblent pas s’écarter de manière régulière, elles passent par des périodes d’activité plus intenses. Et c’est probablement ce que nous observons actuellement dans la région de Reykjanes », explique auprès de la BBC Tamsin Mather, spécialiste des sciences de la Terre à l’université d’Oxford.

De la fumée et de la lave sortent d'une nouvelle fissure lors d'une éruption volcanique à la périphérie de la ville évacuée de Grindavik, dans l'ouest de l'Islande, le 8 février 2024.
De la fumée et de la lave sortent d’une nouvelle fissure lors d’une éruption volcanique à la périphérie de la ville évacuée de Grindavik, dans l’ouest de l’Islande, le 8 février 2024. © Icelandic Department of Civil Protection and Emergency Management / AFP

« Une autre éruption dans le mois à venir »

La péninsule de Reykjanes, restée inactive pendant 800 ans, s’est réveillée en 2021 et a connu six éruptions depuis. Selon l’Office météorologique islandais, la péninsule pourrait être au début d’un nouveau « cycle éruptif » et ainsi confrontée à des années d’instabilité volcanique.

« Nous nous attendons à voir des éruptions volcaniques le long de la péninsule », annoncent-ils dans des propos rapportés par la BBC.

Comment l’Islande se prépare à l’éruption d’un volcan?
Comment l’Islande se prépare à l’éruption d’un volcan?

Comme le note le volcanologue Jacques-Marie Bardintzeff, on observe depuis deux mois environ « des éruptions courtes d’un ou deux jours » dans la région. « Les poches se re-remplissent rapidement après une éruption », détaille-t-il.

« Il y a déjà un gonflement depuis la dernière éruption (du 8 février, NDLR), donc on peut déjà dire qu’il y aura une autre éruption dans le mois à venir », indique Jacques-Marie Bardintzeff.

Une durée et des lieux inconnus

Combien de temps va durer ce cycle éruptif? L’étude des roches de la région révèle, dans le passé, des périodes de calme d’environ 1.000 ans, suivies d’éruptions qui se poursuivent pendant quelques siècles. « Il existe des preuves de l’existence d’environ trois épisodes de ce type au cours des 4.000 dernières années dans cette région », explique Tamsin Mather.

« Ça peut durer très longtemps: le rythme d’un volcan n’est pas du tout celui d’un humain », abonde dans le même sens Jacques-Marie Bardintzeff. Quelque chose qui est imminent sur le plan géologique ne veut pas dire que ça sera dans quelques heures ou quelques jours.

« On n’est pas à l’abri qu’il y ait une grosse éruption puis plus rien pendant un an par exemple », ajoute le spécialiste. Parfois, une agitation volcanique n’aboutit pas du tout à une éruption.

Les services de secours construisent des murs de protection en terre pour dévier la coulée de lave en Islande près de Grindavik, le 14 janvier 2024
Les services de secours construisent des murs de protection en terre pour dévier la coulée de lave en Islande près de Grindavik, le 14 janvier 2024 © HALLDOR KOLBEINS / AFP

En outre, il est difficile de déterminer avec précision le lieu d’une éruption. En Islande, il ne s’agit pas de volcans en forme de cône comme l’Etna en Italie, par exemple, où la lave sort plus ou moins toujours au même endroit. « Ici, elles peuvent bouger de plusieurs kilomètres », explique Jacques-Marie Bardintzeff.

Néanmoins, l’activité sismique dans la région de Reykjanes ne va pas se propager à d’autres volcans. « Chacun fait sa vie, ce n’est pas l’un qui entraîne l’autre », indique le volcanologue.

Toutefois, d’autres volcans sont actuellement dans une phase active, à l’instar du Grímsvötn, au nord-est de l’île. Ces derniers mois, son activité sismique est au-dessus de ses niveaux habituels et a été placée sous surveillance accrue.

Des prévisions difficiles

Face à ce nouveau cycle éruptif, la région de Reykjanes est aussi particulièrement scrutée car les éruptions sont « aléatoires ». « Ça se déclenche en quelques heures et il est très difficile de les prédire », explique Jacques-Marie Bardintzeff.

« Maintenant que les éruptions se répètent, les scientifiques ont une bien meilleure idée de ce qui se passe », ajoute toutefois à la BBC Evgenia Ilyinskaya, volcanologue à l’université de Leeds.

La tâche est d’autant plus cruciale que la péninsule est une région peuplée et abrite d’importantes infrastructures. La ville de Grindavik, 4.000 habitants, a déjà été évacuée en prévention et quelques habitations ont été détruites par les flammes.

Pour tenter de limiter les dégâts dans la ville, les autorités comptent également sur des « murs de défense » construits il y a déjà plusieurs mois.

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