Le ministère des Transports prévoit de mettre en place le contrôle technique dès 2023, sans que les professionnels concernés sachent comment. Le sujet inqiète les centres technqiues et fait monter une grogne chez les motards qui manifesteront en France les 26 et 27 novembre.
Le contrôle technique des deux-roues se fera, c’est une obligation, comme l’a rappelé le Conseil d’État le 31 octobre en exigeant que le gouvernement mette en place cette directive européenne de 2014. De quelle manière? La question reste sans réponse. Quand cette mesure sera appliquée? Sur ce point, des éléments ont été dévoilés.
Lors d’une réunion organisée le 4 novembre par le ministre des Transports, Clément Beaune, avec la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) et des associations de lutte contre les pollutions sonore et atmosphérique (Respire, Ras le Scoot et Paris Sans Voiture), un calendrier aurait été établi. La mise en place serait l’affaire de « quelques semaines » pour une application avant l’été prochain.
« Les textes seront prêts avant la fin de l’année et il y aura une consultation du public début d’année 2023 pour application d’ici à la fin du 1er semestre 2023 », nous a affirmé un proche du dossier.
Une autre réunion a eu lieu le 9 novembre au ministère des Transports avec deux associations de motards (FFMC et FFM) venues défendre leur cause. Rien n’y a fait, même pas les mesures alternatives qui avaient été proposées par l’ancien ministre des Transports, Jean-Baptiste Djebarri.
« Le ministre ne nous a donné aucune date précise, mais nous a laissé peu d’espoir compte tenu de la décision du Conseil d’État, déclare à BFM Business Didier Renoult, porte-parole de la FFMC. Mais nous ne baissons pas les bras, cette mesure ne sert à rien ».
De son côté, le ministère des Transports ne nous a pas confirmé la mise en place du contrôle pour le 1er semestre.
Manifestations de motards fin novembre
La Fédération des motards en colère organisera dans toute la France des manifestations les samedis 26 et dimanche 27 novembre prochain. Des rassemblements pourraient même se tenir dès le week-end prochain.
« Ce contrôle n’a aucun sens, que vont-ils vérifier? Le bruit? Il suffira à ceux qui en font de se préparer au contrôle. Les éléments de sécurité? C’est ce qu’on apprend au permis et que l’on fait tous les matins avant de prendre sa moto pour éviter de se tuer. On ne va pas payer 30 euros pour faire ça tous les deux ou quatre ans, c’est absurde! », explique Didier Renoult.
Vincent Thommeret, directeur général de Yamaha France et président de la Chambre Syndicale Internationale de l’Automobile et du Motocycle (CSIAM), pointe lui aussi les failles de cette mesure et notamment la périodicité des contrôles imposée par la directive.
« Nous préconisons plutôt un contrôle de conformité à la revente pour que les concessionnaires valident par exemple l’achat d’un deux-roues d’occasion en certifiant sa conformité », a déclaré Vincent Thommeret à BFM Business.
Malgré la décision du Conseil d’État, le dossier est cependant loin d’être réglé. De nombreuses questions restent sans réponse. Quels seront les points de contrôle, combien de centres seront créés en France, combien de techniciens doivent être formés et quand le seront-ils, quels outils seront nécessaires parmi lesquels les logiciels certifiés? Nous les avons posées au cabinet de Clément Beaune, mais ce dossier semble complexe.
« La concertation en cours avec les parties prenantes amènera à définir précisément les modalités du contrôle technique », a répondu le ministère à BFM Business.
Le ministère nous a seulement précisé que plus d’1,5 million de véhicules sont concernés par le dispositif.
« Comme le permet le Conseil d’Etat, cette mesure pourra être échelonnée ». Quant au prix, il sera fixé par les centres de contrôle, « néanmoins celui-ci devrait être modéré ».
Une concertation avec les centres de contrôle a lieu nous a indiqué le ministère des Transports. Mais ces centres craignent de devoir s’organiser dans la précipitation sans connaître l’investissement humain, technique et financier, mais aussi les détails réglementaires qu’ils devront respecter.
« Beaucoup de questions restent aujourd’hui sans réponse sur la mise en application du décret », explique la Fédération Nationale de l’Automobile (FNA) en réclamant « une mise en place responsable et raisonnable prise dans la concertation ».
La FNA prévient « qu’il est impossible d’être prêts au premier semestre 2023 ». Pour Emilie Repusseau, secrétaire générale adjointe de la FNA, « il faudrait environ deux ans » pour avoir le temps de rédiger une réglementation claire, obtenir les agréments des préfectures, former des contrôleurs et faire l’acquisition de matériels sachant qu’il faudra plusieurs centaines de centres de contrôle.
« Nous ne savons même pas qui devra déplacer le véhicule, le propriétaire ou le contrôleur, sachant que pour la pollution, le gabarit du pilote et la cylindrée jouent sur les émissions », nous a précisé Emilie Repusseau.
Insultes et menaces de mort
Pendant ce temps, l’arrivée du contrôle technique crée un climat délétère. Le directeur général de l’association Respire, Tony Renucci est l’objet d’une campagne de cyberharcèlement sur les réseaux sociaux avec des insultes racistes, injures publiques, incitation à la haine et menaces de mort.
L’avocat de Respire a annoncé que deux plaintes seront déposées la semaine prochaine. Tony Renucci a même reçu le soutien de la FFMC qui dénonce ces attaques.
« Ces internautes ne font pas partie de notre association, car nos valeurs reposent sur le partage de l’espace public et le respect d’autrui. Ces militants ont porté plainte et ils ont bien raison », a déclaré Didier Renoult au Parisien.
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