À l’heure de passer le permis de conduire, les candidats sont nombreux à fuir les grandes métropoles. Avec une idée en tête: celui-ci est plus difficile à décrocher dans les grandes villes qu’à la campagne. Ce qui se vérifie dans les statistiques officielles.
Les apprentis conducteurs « ne sont pas tous logés à la même enseigne, c’est sûr ». Patrick Crespo, le président du réseau d’auto-écoles et des centres de formation au permis de conduire (CER), a bien conscience que statistiquement, les élèves ont plus de chance d’obtenir leur permis de conduire du premier coup en zone rurale que dans les grandes aglomérations.
C’est d’ailleurs ce que révèle le classement BFM des meilleurs auto-écoles de France, basé sur la réussite à l’examen du permis de conduire au premier trimestre 2024. Le résultat est clair: les établissements de la région parisienne s’en sortent nettement moins bien que ceux installés dans les départements ruraux.
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Tous les départements d’Île-de-France sont ainsi sous la barre des 60% de réussite au premier passage: 58% pour le Val-d’Oise, la Seine-et-Marne et la Seine-Saint-Denis, 49% dans les Hauts-de-Seine, 47% à Paris et dans l’Essonne et même 46% dans le Val-de-Marne. Loin des scores du trio de tête: 75,9% de réussite pour les Hautes-Alpes, 75% pour les Deux-Sèvres ou encore 73% pour la Haute-Corse.
« C’est une tendance qu’on constate depuis très longtemps, et qu’on ne parvient pas à enrayer », note le président des centres de formation au permis de conduire.
Obstacles, bouchons…
Patrick Crespo explique ce phénomène par plusieurs facteurs, d’abord par la densité de circulation des grandes agglomérations qui complexifie la zone de conduite, même si les centres d’examens se situent la plupart du temps en dehors des grandes villes. En Île-de-France par exemple, l’examen n’a pas lieu dans Paris intra-muros mais en petite et grande couronne, dans des communes telles que Gennevilliers, Clamart, Rungis, Bobigny ou encore Vélizy.
« C’est néanmoins un aspect à prendre en considération », pointe le spécialiste. « Évidemment qu’il y a moins d’obstacles sur la route quand vous conduisez dans une commune de moins de 5000 habitants et qu’il y a à peine un feu rouge… Vous avez moins de risque de vous trouver nez à nez avec des difficultés. »
Une analyse partagée par Marie Martinez, vice-présidente de l’Unic, premier syndicat des indépendants de la conduite. Les candidats eux-mêmes en ont bien conscience.
« Ils migrent vers l’extérieur des grandes villes pour passer l’examen », explique-t-elle. « Ils sont parfois prêts à faire beaucoup de kilomètres pour s’excentrer, dans l’espoir d’avoir de meilleures conditions d’examen. »
D’autant que « la région parisienne est une plaque tournante pour les inspecteurs » – qui ne veulent pas forcément y rester – ce qui aggrave génère des temps d’attente de plus en plus longs pour obtenir des places d’examen.
« Moins insouciants » mais « moins enjoués »
L’autre facteur à prendre en compte est l’âge des candidats. Patrick Mirouse, président du réseau d’auto-école ECF, rappelle ainsi que dans les villes telles que Paris, Lyon ou encore Marseille, la population a tendance à passer le permis « plus tardivement, tout simplement parce que la mobilité peut être réglée par d’autres moyens » comme l’usage des deux-roues, les transports en commun ou la marche à pied.
« L’âge moyen du passage du permis de conduire se situe autour des 18 ans en province, contre 23-24 ans en région parisienne », appuie Patrick Crespo, du réseau CER.
Or les professionnels de la sécurité routière établissent un lien entre l’âge des candidats et le taux de réussite au permis de conduire. « Plus on apprend à conduire jeune, plus c’est facile et a contrario plus on apprend à conduire tard, plus il y a d’appréhension », à en croire Patrick Mirouse.
« Les candidats un peu plus âgés, moins insouciants, sont en général aussi moins motivés et enjoués à l’idée de passer leur permis, ce qui peut rendre les choses un peu plus laborieuses », confirme Patrick Crespo.
Ce dernier tient aussi pour responsable « une différence culturelle » du mode de déplacement. « On y va davantage à reculons quand on a toujours fonctionné sans voiture, avec les transports collectifs. L’état d’esprit n’est pas le même quand on a fondamentalement l’impression de ne pas en avoir véritablement besoin. »
La conduite accompagnée, formule gagnante
Enfin, les professionnels du secteur s’accordent à dire que le taux de réussite au premier passage a un lien direct avec le niveau de développement de la conduite accompagnée. À ce jour, cette formation qui permet aux apprentis conducteurs de prendre le volant aux côtés de leur parents dès l’âge de 15 ansremporte d’excellents résultats.
« La conduite accompagnée, c’est 75% de réussite au premier passage, contre 59% pour la filière traditionnelle », rappelle Patrick Mirouse.
Or, cette pratique est nettement moins développée dans les grandes villes que dans les zones plus rurales. « Ça s’explique simplement par le fait que moins de foyers sont en possession d’une voiture dans ces grandes métropoles… ce qui ferme immédiatement la porte à la conduite accompagnée », précise Marie Martinez, de l’Unic.
Bien que les chiffres jouent contre eux, les candidats au permis à s’être entraîné à conduire à Paris, Lyon ou encore Marseille ont toutefois un avantage, de l’avis des professionnels. Leur douloureuse expérience sur les routes bondées les a préparés à appréhender des situations complexes et imprévues le jour de l’examen tant redouté.
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