Moniteurs tournants, leçons à l’unité, anticipation des plannings, rigueur et exigence dans l’apprentissage… Les auto-écoles françaises qui obtiennent les meilleurs taux de succès au permis de conduire partagent leurs secrets pour faire en sorte qu’autant de leurs élèves brillent le jour de l’examen pratique.
Chaque semaine, les cinq moniteurs qui travaillent avec Séverine Guyard se réunissent pour parler de la progression de chacun de leurs élèves au volant. Cette petite auto-école du Jura l’assure: aucun élève n’est présenté à l’examen tant que l’ensemble des moniteurs ne l’estime pas parfaitement prêt à passer le permis de conduire.
« Certains élèves ne sont pas tellement contents de cette méthode… N’empêche que ça marche! », défend la cogérante de cette auto-école de Champagnole, qui se décrit comme « la première auto-école du Jura ».
Avec 88,24% de réussite à l’examen du permis de conduire au premier trimestre 2024, Champa Auto-école figure bien dans le classement BFM des meilleures auto-écoles de France, basé sur les données officielles du ministère de l’Intérieur. Sur 51 candidats, XX ont obtenu le précieux sésame du premier coup.
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« Présentez des élèves prêts! »
Quel est le secret de réussite? Pendant les leçons de conduite, Séverine Guyard explique que ses élèves n’ont jamais le même moniteur. « C’est à prendre ou à laisser et je pense que ça contribue pas mal à notre réussite », explique cette monitrice de 47 ans, qui voit ça comme un atout.
L’objectif est que ses élèves ne s’habituent jamais aux habitudes ou à la manière de faire d’une seule personne. « Ça les prépare au mieux pour le jour J, où ils seront assis à côté d’un inspecteur inconnu », défend la professionnelle.
De plus, la décision d’inscrire ou non l’élève à l’examen se prend de manière collégiale: « Chez nous c’est un travail d’équipe, on discute ensemble et on connaît tous les points forts et les points à améliorer des futurs candidats, et ça nous permet de ne les présenser que quand ils sont véritablement prêts. »
« Ce n’est pas aux élèves de décider quand ils sont prêts ou pas », abonde Mathieu Blanchet, cogérant de l’auto-école Blanchet de Durtal (Maine-et-Loire), « fier » de son taux de réussite de 90,24% au premier trimestre 2024.
« Présentez des élèves prêts et ne vous laissez pas ‘bouffer » par ceux qui vous mettent la pression pour avoir une date d’examen le plus vite possible! », lance-t-il à ses collègues.
La conduite accompagnée, le plus
Ce moniteur, gendarme réserviste en parrallèle, attribue les bons résultats de son auto-école à son haut niveau d’exigence. « Je prend mon métier très au sérieux. En tant que gendarme, les morts de la route, je les ai vus. Je n’oublie pas qu’au volant, les élèves ont une arme entre les mains et que mon rôle est de faire en sorte qu’ils la maîtrisent le mieux possible. »
L’outil le plus efficace pour cela, pour beaucoup de professionnels, reste la conduite accompagnée. À l’auto-école Talon de Delle (Territoire de Belfort), plus de la moitié des élèves suivent ce dispositif qui « fait toute la différence », selon la gérante Aurélia Talon. « C’est le meilleur moyen de l’avoir du premier coup avec peu d’heures de conduite », développe la monitrice de 47 ans, qui peut se vanter d’avoir atteint un taux de réussite de 86,9% de réussite à l’examen pour les 61 candidats du début d’année.
L’autre secret de sa réussite, elle pense le devoir à son refus de fonctionner « au forfait ». Ces dernières années, les auto-écoles sont de plus en plus nombreuses à proposer un nombre prédéfini d’heures de leçons de conduite (souvent 20, 25 ou 30 heures) après obtention du code de la route. Un forfait auquel peuvent ensuite s’ajouter des leçons à l’unité, si l’apprentissage n’est pas terminé au terme du forfait.
« Je trouve cette façon de procéder compliquée car on met côte à côte deux choses qui ne devraient rien avoir à faire ensemble: l’argent et l’apprentissage », explique Aurélie Talon. Elle explique ne travailler qu’en programmant des leçons à l’unité en fonction des besoins individuels de chaque élève.
« On travaille à flux tendu »
Son autre crédo? L’anticipation. Contrairement à d’autres professionnels, Aurélie Talon ne veut pas entendre parler de plannings d’examens bookés trois mois à l’avance. Elle dit refuser de travailler « à l’aveugle » en misant sur le fait qu’untel ou untelle devrait être prêt à passer le permis à une date donnée, sans prendre en compte la réelle évolution de sa progression.
« Je ne peux pas travailler comme ça », justifie-t-elle. « Ici on travaille à flux tendu, c’est plus fatiguant pour nous mais les chiffres sont la preuve que ça fonctionne. »
La monitrice évoque enfin une certaine exigence pendant l’apprentissage du code comme de la conduite. « Chez nous, on ne glande pas, ça c’est sûr! », plaisante Aurélie Talon. « Je veux que l’élève tire le meilleur de chaque séance donc je ne suis pas gênée de dire quand j’ai l’impression qu’il faut que ça avance. Ça c’est de la vraie bienveillance pour moi: faire en sorte que ça coûte aux gens le moins cher possible et qu’ils ne restent pas coincés là inutilement. »
Comme la plupart des établissements en haut du classement BFM, toutes ces auto-écoles sont des établissements familiaux de taille réduite, pour la plupart situés en zone rurale. Et malgré leurs excellents résultats, elles font part d’une grosse difficulté, le recrutement de moniteurs qualifiés, couplée à un autre problème structurel: celui de la pénurie chronique d’inspecteurs disponibles, qui rallonge irrémédiablement le nombre de places d’examen ainsi que les délais pour espérer passer le permis.
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