Le 27 octobre 2003, le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy inaugurait le premier radar fixe de France. On en dénombre désormais plus de 4.000 de tous types sur le territoire.
C’était il y a 20 ans jour pour jour. Le 27 octobre 2003, un certain Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, inaugurait le premier radar automatique de France. Une présentation le long de la RN20 au niveau de la Ville-du-Bois (Essonne), quelques jours avant l’activation des premières cabines.
Pour l’anecdote, celui qui deviendra en 2007 président de la République, ainsi que le ministre des Transports de l’époque, Gilles de Robien, sont tous les deux flashés en excès de vitesse sur la route de cet événement. Pas par des gendarmes, mais par des journalistes du magazine Auto Plus équipés d’un radar-jumelle, comme le relate ce sujet du journal télévisé de France 3. Un mauvais exemple… qui laisse présager un grand « succès » pour les radars automatiques.
Le fantasme d’un pactole
« Ces nouveaux radars sont les premières pièces du ‘contrôle sanction automatique’, qui permettent de « flasher » les automobilistes contrevenants, éditer et envoyer au propriétaire du véhicule, de façon automatique, un PV », résume alors l’AFP.
Le 31 octobre, le sujet fait la une du JT de 13 heures de France 2: « Depuis une heure dans toute la France, les dix premiers radars automatiques d’une série de 100 sont en état de fonctionner et de photographier à tout moment du jour et de la nuit les automobilistes en excès de vitesse », explique alors le présentateur Daniel Bilalian.
Déjà, cette mise en place des premiers radars lance un débat devenu depuis récurrent: ce dispositif représente-t-il avant tout un progrès en termes de sécurité routière ou plutôt une manière pour l’État de dégager des revenus importants?
Sur la partie « pompe à fric », la confirmation se fera assez rapidement. Dans le JT de France 2 du 24 novembre 2003, on parle d’un « véritable pactole pour les finances publiques ».
Le reportage prend l’exemple d’un radar automatique près du Pont de Neuilly, en région parisienne. En à peine une semaine, il est « déjà rentabilisé », avec 1.000 véhicules flashés à 90 euros l’amende, soit une recette de 90.000 euros.
« Un jackpot qui participera au financement des 500 nouveaux radars prévus pour 2004 », souligne le sujet de France 2.
Les estimations de recettes donnent le tournis: avec 500 radars, à 200 PV par jour et des amendes de 90 euros, ils rapporteraient potentiellement plus de 3 milliards d’euros par an. Une somme comparée alors aux recettes de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) qui générait environ 2,5 milliards d’euros chaque année.
En réalité, les amendes générées par les radars n’atteindront jamais cette folle estimation.
Sur le graphique ci-dessous disponible sur la page « À quoi sert l’argent des radars? » du site officiel de la sécurité routière, on peut voir que ces recettes n’ont jamais dépassé le 1,01 milliard d’euros de 2017. Une contribution importante, mais inférieure à l’effort financier de l’État en faveur de la sécurité routière, qui représente plus de 3,5 milliards d’euros depuis 2015.
Des conséquences indéniables sur la baisse de la mortalité
Au-delà de bien remplir les caisses de l’État, on présente souvent les radars comme étant à l’origine de la forte baisse du nombre de morts sur les routes.
Vrai ou faux? Vaste débat. Dans les faits, la baisse du nombre de morts sur les routes de France s’accélère bien à partir du début des années 2000: de 7.655 morts en 2002, le pays passe sous les 4.000 décès à partir de 2011 (3.541 personnes décédées en 2022).
Un rôle indéniable des radars sur la prise de conscience collective concernant le besoin de modérer sa vitesse et donc de respecter les limitations en vigueur. Mais auquel on peut tout de même ajouter les autres mesures prises pour améliorer la sécurité.
Un exemple parmi d’autres: l’interdiction du téléphone au volant en France remonte elle aussi à 2003, année des premiers radars automatiques. Un comportement désormais passible d’un retrait de 3 points sur le permis de conduire et d’une amende forfaitaire de 135 euros. Depuis 2020, le retrait de permis est également prévu en cas de cumul avec une autre infraction.
Autre élément amené à peser sur ce bilan annuel de la mortalité routière: une sécurité renforcée des véhicules récents dans leur conception et la protection des occupants en cas d’accident.
Un symbole des protestations
C’est finalement une autre mesure visant à améliorer la sécurité routière qui mettra le feu aux radars: face à la mise en place des 80km/h en 2018, puis dans le cadre du mouvement des gilets jaunes, de nombreux manifestants s’attaqueront à ce symbole fort. Résultat: 60% du parc de radars dégradés à différents niveaux, de détériorés à détruits, constate le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner début 2019. Un taux qui grimpera à 75 % quelques mois plus tard.
Des radars déjà visés par les « bonnets rouges » contre l’écotaxe en 2013, les buralistes contre la hausse du prix du paquet de cigarettes en 2020, ou plus récemment dans le cadre du mouvement contre la réforme des retraites, rappelle La Dépêche. Un article qui date même la première dégradation… à notre radar originel du 27 octobre 2003, attaqué au « pavé, marteau ou masse » deux jours après son inauguration.
Désormais rétabli, et bien établi, dans le paysage routier français, le réseau de cabines à flasher continue de se diversifier.
En 2022, on dénombrait un total de 4.447 radars de tous types: 1.425 « radars fixes vitesse », 1.098 « radars tourelles (vitesse et franchissement) » et 340 « radars autonomes » (ces radars fixes qui peuvent être déplacés), détaille un rapport du Sénat. On peut ajouter les radars centrés sur d’autres infractions que la vitesse: 540 radars feu rouge et 75 radars de passage à niveau. Enfin, n’oublions pas les 973 radars embarqués dans des véhicules de sociétés privées, qui ont effectué près de 18.000 contrôles par jour en 2021.
Enfin, on annonce depuis longtemps l’arrivée de radars multifonctions, capables de détecter à la fois le non-port de la ceinture de sécurité, le respect des distances de sécurité ou encore l’utilisation d’un téléphone au volant. Les tests sont toujours en cours en attendant leur mise en service, suspendue en mars dernier
Cliquez ici pour lire l’article depuis sa source.