Certains constructeurs comme Renault et Volkswagen appellent les autorités européennes à revoir le calendrier des nouvelles normes d’émissions de CO2 qui pourraient les contraindre de payer dès l’année prochaine des milliards d’euros d’amende.
L’industrie automobile européenne est en panique. Une nouvelle norme d’émission de CO2 doit entrer en vigueur le 1er janvier prochain et certains constructeurs craignent un désastre industriel.
À commencer par Renault serait à l’origine d’un document anonyme qui tourne dans les couloirs de Bruxelles depuis quelques jours. Dans cette note très alarmiste, l’auteur plaide pour le report d’une norme d’émission de CO2 prévue l’année prochaine au moyen de l’article 122.1 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), sorte de « 49.3 » européen, comme l’indique Le Monde.
Quelle est cette norme de la discorde? Elle s’appelle CAFE, acronyme de Corporate Average Fuel Economy et elle va obliger les constructeurs à ne commercialiser sur le territoire européen que des véhicules qui émettent en moyenne 95 grammes de CO2 par km. Sous peine d’une amende de 95 euros par gramme excédentaire et par véhicule neuf vendu. Pour rappel, le seuil était d’environ 116 grammes en moyenne cette année.
Concrètement si un constructeur dépasse de 5 grammes le seuil autorisé et qu’il écoule 1 million de véhicules sur l’année, il devra s’acquitter d’une amende de 475 millions d’euros.
Un objectif de véhicules électriques inatteignable ?
Le problème, c’est que de nombreux constructeurs comme Renault ou Volkswagen sont pour l’heure très loin des clous. Il faut savoir qu’aujourd’hui les véhicules thermiques les plus propres émettent environ 120 grammes de CO2 au km. Pour équilibrer les comptes, il faudrait donc vendre un véhicule électrique sur cinq pour faire tomber les émissions moyenne de 20%.
Et on est pour le moment loin du compte puisque la part des véhicules électrique n’a pas dépassé les 15% du total en 2024 et est même tombée à 12% cet été dans un contexte de diminution par les États des subventions à l’achat.
Dès lors plusieurs scénarios possibles se dessinent pour les constructeurs : soit la norme n’est pas assouplie et les constructeurs en dehors des clous paient tous leurs amendes pour un montant total estimé par Renault à 13 milliards d’euros pour l’ensemble.
Soit, il faut ralentir la cadence de production dans les usines de véhicules thermiques pour réduire la production de deux millions d’unités, ce qui pourrait entrainer la fermeture de huit sites en Europe, toujours selon la note de Renault.
Soit enfin les constructeurs rachètent des crédits-carbone (les droits à polluer) à des spécialistes de l’électrique, essentiellement des concurrents américains ou chinois comme Tesla ou Geely. Ce qui revient donc à faire subventionner ces constructeurs extra-communautaires par des fabricants européens. Ce qui peut paraître absurde à l’heure où l’UE prévoit de rehausser ses droits de douanes pour justement limiter les importations de véhicules étrangers.
Des normes européennes trop ambitieuses?
Il n’y a pas qu’en Europe que des normes d’émissions de CO2 sont imposées aux constructeurs. D’ailleurs cette norme CAFE est américaine à l’origine. Le premier seuil retenu concernait l’année 1978 et cette année-là les véhicules ne devaient pas excéder les… 248 grammes de CO2 au km.
Les Européens se sont dotés d’une norme commune en 1992. Depuis quelques années, un calendrier de restrictions des émissions a fait du continent la zone économique la plus exigeante. Quand les véhicules neufs vendus en Europe ne pourront pas dépasser les 95 grammes de CO2/km, la limite autorisée est fixée au-delà des 120 grammes aux États-Unis, au Japon ou en Chine.
Et ce n’est qu’un point d’étape puisque les seuils seront de nouveau abaissés dans les années à venir jusqu’à atteindre les 0 gramme en 2035, année où plus aucun véhicule thermique neuf ne pourra être vendu sur le continent.
Un calendrier auquel s’opposent de nombreux constructeurs comme Renault qui le jugent nuisible pour l’industrie européenne. Jusqu’à présent, ils avaient l’oreille attentive et bienveillante du Commissaire européen à l’industrie Thierry Breton qui jugeaient que ces normes risquaient dépénaliser la compétitivité des entreprises européenne du secteur. Avec le départ ce lundi de l’ancien ministre français de la Commission européenne, les constructeurs ont perdu un soutien de poids.
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