Le constructeur allemand Mercedes poursuit le peaufinage de sa gamme électrique en dotant sa limousine EQS d’une déclinaison sportive AMG. Simple « tuning » électrique ou vrai apport stratégique?
L’électrification s’est tellement généralisée dans les gammes des différents constructeurs qu’ils en viennent à adopter les mêmes stratégies et les mêmes réflexes que pour gérer leurs segments thermiques. Même si les véhicules zéro émission sont majoritairement élaborés autour des principaux segments de croissance, notamment les SUV et les compactes, les constructeurs premium ont à cœur de faire passer à l’électrique leur clientèle haut et très haut de gamme, notamment celle des grandes berlines routières, des limousines et des sportives.
Mercedes a été l’un des premiers à occuper le terrain en lançant certes des SUV électriques sur les segments les plus dynamiques, les EQA et EQB. L’EQE elle, voulait constituer une nouvelle référence en matière de berline routière électrique, face aux Tesla Model S vieillissantes et malgré l’arrivée d’une BMW i4 bourrée de qualités. Restait à occuper le terrain du haut de gamme et de l’exceptionnel. L’EQS, la classe S électrique, et même son énorme version SUV jouent ce rôle, avec même des versions Maybach prévues (le SUV vient juste de sortir).
Un défi de taille et de poids
Mais quid du « parent pauvre » de cette électrification progressive, le sport? Comprenons-nous bien, en termes de performance pures, rien de plus simple que d’équiper n’importe quelle grosse voiture d’une énorme batterie et de moteurs électriques surpuissants pour la faire accélérer comme une supercar. Mais doter un véhicule électrique performant d’un véritable caractère sportif et dynamique pour contenter la clientèle haut de gamme, très exigeante, n’est pas un défi à la portée de tout le monde. Surtout pour Mercedes qui a une image de marque à défendre, d’autant plus lorsqu’il s’agit de sa division sportive AMG.
Et en cela l’EQS AMG 53 ne partait pas forcément gagnante, avec toutes les contraintes de l’électrification, et surtout une masse considérable à déplacer. 2,7 tonnes sur la balance. Ainsi qu’une ligne qui a beaucoup intrigué à la sortie des EQE et EQS classiques, futuristes, fluides mais déroutantes pour les amateurs de grosses berlines massives à grosses calandres étoilées… à noter à ce sujet que l’EQS, y compris dans sa déclinaison AMG, est la voiture de production la plus aérodynamique du monde, avec un CX de 0,2 seulement.
Le point fort: une limousine très confortable et très méchante
C’est là qu’AMG entre en scène. Et franchement le traitement esthétique, pour commencer, est particulièrement réussi. Calandre agressive à fanons, becquet arrière, énormes jantes à rayons « efficientes » de 21 pouces, suspension ajustée… L’étonnante EQS de base devient d’un coup bestiale et menaçante, surtout dans sa teinte gris (très) foncé. On se dit que si Dark Vador devait avoir une voiture de fonction dans cette galaxie, l’EQS 53 AMG serait parfaite dans le rôle.
L’intérieur est traité avec un soin très impressionnant. Cuir blanc et beige, moquettes, métal brossé, sièges au design à la fois futuriste et sportifs à souhait avec leur excellent maintien, places arrières d’un confort royal, écrans LCD multiples sur la planche de bord, hi-fi Burgmeister signe d’une salle de concert avec toutes les connectivités possibles, éclairages d’ambiance intérieurs aux réglages multiples, sièges massants, insonorisation impeccable.
On navigue entre sport, très grand luxe et avant-garde, avec une identité Mercedes-AMG totalement conservée. La grande malle arrière de 580 litres garantissant une très large capacité d’emport bagages.
Une puissance colossale… mais exploitable
Place aux sensations mécaniques. Car oui, au vu de la fiche technique, il y a de quoi se montrer curieux et exigeant. 2 moteurs électriques d’une puissance cumulée de 474kW (l’équivalent de 658 chevaux), une batterie de 107,8 kWh, et transmission intégrale 4Matic+, utile pour gérer les 950Nm de couple. On peut même passer la barre des 1000Nm et culminer à 761 chevaux avec le Pack spécifique Dynamic Plus.
Alors oui, ce déluge de puissance a de quoi laisser sceptique, même s’il s’agit encore une fois de déplacer avec célérité une limousine de 2,7 tonnes. Et pourtant… l’aérodynamisme déroutant de la carrosserie fait qu’on a littéralement l’impression de fendre l’air ambiant en accélération. Et puis, c’est là que la fameuse transmission 4Matic+ fait merveille.
Quatre roues motrices, mais surtout quatre roues directrices. Et celles-ci sont particulièrement efficaces sur l’EQS AMG 53 (ou les voit bouger à l’œil nu dans le rétroviseur), en la rendant à la fois aussi maniable et pratique à basse vitesse pour manœuvrer, qu’agile et dynamique à haute vitesse. Sans aller jusqu’à la comparer à de véritables supersportives faites pour les cordes de circuit auto, le niveau de puissance colossal est parfaitement exploitable avec ce qu’il faut de dynamisme et d’agilité, la direction très bien calibrée aidant beaucoup. On peut donc accélérer, freiner virer avec des vitesses étonnantes, en oubliant quasiment la masse considérable de l’engin.
Le point noir: une consommation souvent élevée
Outre l’intérieur quelque peu salissant sur cette version, ainsi qu’un bruit de roulement pas très inspiré (celui de l’EQE classique était plus réussi), c’est l’autonomie qui reste le paramètre un peu décevant de cette EQS sportive. Cette version AMG 53 étant axée sur la performance, elle est logiquement inférieure à celle de l’EQS classique (600 kilomètres contre 700), mais reste impressionnante et même l’une des plus élevées de la production électrique mondiale.
Les vitesses de recharge sont relativement rapides compte tenu de l’énorme batterie, avec notamment un remarquable 19 minutes pour récupérer 300 kilomètres d’autonomie, grâce aux bornes du réseau Ionity (l’EQS AMG 53 peut supporter des charges jusqu’à 200kW).
Reste qu’avec des moyennes réelles qui tournent plus autour des 20-24 kWh aux 100 kilomètres, et même plus en empruntant les voies rapides ou en utilisant beaucoup la climatisation, on sera sans doute sensiblement loin des moyennes WLTP théoriques, sans même compter l’envie irrésistible d’utiliser toutes les capacités de l’exceptionnelle chaîne de traction.
Une limousine sportive sans vraie concurrence
Les mises en vitesses sont d’ailleurs foudroyantes, avec moins de 4 secondes pour passer du 0 à 100km/h. 3,8 secondes et même 3,4 avec le Pack Dynamic Plus (détail amusant, les fonctions super sportives AMG, notamment le départ contrôlé, ne peuvent être activées que sur circuit… données vérifiées par le GPS de bord ). De quoi laisser une Porsche 911 et beaucoup de sportives réputées derrière vous.
Seules les Porsche Taycan Turbo, Audi E-Tron GT et les versions Performance ou Plaid des Tesla Model 3 et Model S pourront vous coller au train. Mais certainement pas avec ce niveau de luxe, de confort, de qualité perçue… et de facilité de prise en mains. Compte tenu de tous ces éléments, les seules véritables concurrentes de l’EQS 53 AMG ne pourront être que la future BMW i7 M70 ou encore la Rolls Royce Spectre.
Mais à quel prix? Celui d’une auto exceptionnelle
Avant l’essai, votre serviteur a averti son entourage, disant: « je vais tester une limousine de grand luxe, une voiture utilisable au quotidien, une supercar et un 4×4. Le tout dans une seule et même auto, sans malus écologique ». Force est de constater que cette Mercedes EQS 53 AMG sait absolument tout faire, avec un sentiment de puissance, de maitrise et de confort difficilement égalable.
Son prix très élevé (169.250 euros tarif de base) est à la mesure de la prouesse réalisée par Mercedes, et ne retiendra pas la clientèle qui veut une limousine statutaire, avec le petit plus en termes de hautes performances. Le constructeur réussit là un engin exceptionnel en soi, mais aussi de nature à constituer une alternative pratique tout à fait envisageable pour les inconditionnels des grandes limousines thermiques, sans malus assommant. Le tout avec une plus-value sportive qui va bien au-delà du simple marketing, lui donnant une personnalité singulière et enthousiasmante. Un véritable must.
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