Cette expérimentation de xénogreffe a pour objectif de répondre à la pénurie de dons d’organes alors que plus de 100.000 Américains sont sur liste d’attente, dont près de 88.000 pour espérer recevoir un rein.
Trente-deux jours sans rejet. Depuis plus d’un mois, le rein d’un porc génétiquement modifié fonctionne après sa transplantation sur un homme en état de mort cérébrale et placé sous respirateur artificiel. Un record et un espoir.
« Le rein fonctionne parfaitement, il a rempli le même rôle qu’on attend d’un rein humain normal », a annoncé le Dr Philip Sommer, médecin à l’hôpital Langone de New York, lors d’une conférence de presse ce mercredi.
Un mois supplémentaire
Implanté le 14 juillet dernier, l’organe continue de fonctionner. Ces trente-deux jours représentent « la plus longue période durant laquelle un rein de porc génétiquement modifié a fonctionné chez un humain », s’est félicité l’hôpital dans un communiqué.
Depuis plus d’un mois, « les biopsies et tests du rein ne montrent aucun signe de rejet, a déclaré le Dr Robert Montgomery, directeur de l’Institut de transplantation de l’hôpital Langone, le rein de porc remplace toutes les fonctions importantes assurées par un rein humain ».
Selon lui, cette étape doit permettre de mener à un essai clinique sur un humain vivant. L’hôpital a par ailleurs indiqué prévoir de continuer l’expérience durant un mois supplémentaire, jusqu’à la mi-septembre.
Modifications génétiques
Une équipe de chercheurs français a rendu cette prouesse possible. Deux expérimentations avaient été réalisées en 2021 et 2022, une fois sur un homme vivant, mais sans succès.
Les échantillons ont été envoyés par les scientifiques américains et ont été analysés en France. « On a identifié des mécanismes de rejet et ça nous a permis de proposer à l’équipe américaine de changer les modifications génétiques des porcs et d’adapter les traitements des patients pour être sûrs que la greffe soit mieux acceptée dans cette nouvelle expérimentation », explique à BFMTV Valentin Goutaudier, médecin chercheur.
Les médecins ont notamment transplanté le thymus du porc, une glande jouant un rôle important dans la réponse immunitaire pour qu’il aide les cellules du receveur à identifier celles du porc comme étant les siennes, aidant ainsi également à éviter un rejet, a expliqué lors d’une conférence de presse le Dr Adam Griesemer, impliqué dans l’opération.
« C’est une énorme victoire! C’est une avancée scientifique spectaculaire et un espoir énorme pour les patients… On n’aurait pas imaginé, il y a cinq ans, qu’on puisse arriver de tels résultats et avancées », se réjouit Alexandre Loupy, directeur de l’unité de recherche INSERM.
« La pénurie d’organes pourrait être en partie résolue », ajoute-t-il.
88.000 Américains en attente d’un rein
Cette expérimentation a pour objectif de répondre à la pénurie de dons d’organes dans un pays où des dizaines de milliers de patients sont sur liste d’attente pour des greffes: plus de 100.000 Américains, dont près de 88.000 attendent un rein.
« Je crois fermement que les xénogreffes (greffes où donneur et receveur ne sont pas de la même espèce, ndlr) sont un moyen viable de changer cela », a affirmé le Dr Robert Montgomery.
Son espoir se base notamment sur le fait que les porcs utilisés « ne sont pas clonés, mais élevés, leur nombre peut être augmenté bien plus facilement, afin de procurer une source de reins illimitée pour les patients en ayant besoin ».
« Un cadeau à l’humanité »
Maurice Miller, qui a fait don de son corps pour cette expérimentation scientifique, est mort soudainement à l’âge de 57 ans d’un cancer du cerveau détecté très tardivement.
« C’était une décision très difficile à prendre », a déclaré ce mercredi la sœur du défunt, Mary Miller-Duffy, qui a accepté que le corps de son frère soit utilisé pour cette étude. « Même si mon frère ne peut pas être là, je peux dire en toute confiance qu’il aurait été fier que la tragédie de sa mort aide la vie de nombreuses personnes ».
« Elle a trouvé un moyen d’aider son frère à réaliser son désir de faire un cadeau à l’humanité au moment de sa mort, à un moment de profond chagrin », a conclut le Dr Robert Montgomery.
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