Le gouvernement devrait avoir recours au 49.3 pour adopter le budget 2023 dont l’examen a débuté ce lundi. Cet article de la Constitution permet d’adopter un projet de loi sans vote préalable des députés.
Depuis lundi, les députés ont commencé à examiner le budget 2023 présenté par le gouvernement. Alors que la gauche, l’extrême droite et la droite n’ont pas caché leur intention de voter contre ce texte de loi, l’exécutif devrait être obligé de passer en force en ayant recours à l’article 49.3 de la Constitution.
BFMTV.com fait le point sur ce qu’implique l’utilisation de ce point-clé de la vie parlementaire de la Ve République.
⋅ À quoi sert le 49.3?
Cet article de la Constitution permet au gouvernement d’adopter un projet de loi ou une proposition de loi sans se soumettre au vote des députés. Son utilisation entraîne la suspension immédiate des débats à l’Assemblée nationale. Le texte passe ensuite au Sénat dont la majorité à droite peut chercher à peser en votant ses amendements.
En cas de 49.3, seule une procédure peut contrecarrer l’exécutif: la motion de censure. Elle permet de rejeter l’adoption du texte et de renverser le gouvernement. Elle doit être déposée dans les 24 heures suivant l’utilisation de cet article et recueillir la signature d’un dixième des membres de la chambre basse, soit 58 députés. Pour qu’elle soit ensuite adoptée, il faut réunir les voix de la majorité des députés de l’Assemblée nationale, soit 289.
Malgré la seule majorité relative détenue par le camp présidentiel, cela reste très compliqué. Dans le cadre de l’examen du budget 2023, il faudrait que les députés de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes), du Rassemblement national (RN) et du parti Les Républicains (LR) votent « pour » la motion de censure. Or, seuls les insoumis et les élus du RN se sont dits prêts à voter ces dispotions, « quelles que soient leurs origines ».
⋅ Dans quel contexte le gouvernement peut-il utiliser le 49.3?
Dans certains cas, l’exécutif peut avoir recours au passage en force pour aller vite sur l’adoption d’une loi et se passer des débats à l’Assemblée nationale. Dans la législature actuelle, où le camp présidentiel ne dispose que d’une majorité relative, l’utilisation du 49.3 permet surtout de ne pas risquer la non-adoption d’un texte de loi. Premier ministre d’une majorité relative entre 1988 et 1991, Michel Rocard avait ainsi utilisé 28 fois le 49.3, un record dans l’histoire de la Ve République.
Néanmoins, il ne faut pas s’attendre à pareille situation durant le mandat d’Emmanuel Macron. En effet, depuis la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, l’usage du 49.3 est restreint. Il ne peut être utilisé qu’une fois par session parlementaire (la session actuelle devrait se terminer en juin prochain, ndlr), en dehors des projets de loi de finance (PLF) ou des projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Autrement dit, le gouvernement peut par exemple décider d’avoir recours au 49.3 à la fois sur le budget et la réforme des retraites, dont Emmanuel Macron souhaite l’adoption au début de l’année 2023.
⋅ Pourquoi le gouvernement est-il tenté de l’utiliser sur le budget?
Jusqu’ici, l’exécutif a réussi à faire adopter ses projet de loi sans trop d’encombres, notamment grâce aux voix de LR. Cependant, les difficultés sont toutes autres pour le budget 2023. Les principales oppositions comptent voter contre ce projet de loi. À gauche, on critique l’austérité de l’exécutif, tandis que la droite estime, au contraire, qu’il y a trop de dépenses prévues dans ce texte.
« Nous voterons contre le budget, marqueur d’une politique que nous contestons », a également indiqué Marine Le Pen, cheffe de file des députés du Rassemblement national (RN) au palais Bourbon.
Le contexte n’est pas nouveau. Dès l’été, l’hypothèse d’un 49.3 a été mise sur la table par le gouvernement. Même si les insoumis ont demandé ce lundi à l’exécutif de ne pas suivre une telle stratégie, le recours au passage en force ne fait guère de doute.
⋅ Quels risques l’exécutif prendrait-il?
L’inconnue concerne davantage le timing. Avec des risques différents à chaque fois. Premier scénario: le gouvernement dégaine rapidement le 49.3. Au sein de Renaissance, certains élus poussent en ce sens. C’est le cas par exemple de Guillaume Kasbarian, président (Renaissance) de la commission des Affaires économiques.
Ce choix serait d’autant plus pertinent, explique-t-il à BFMTV, que « depuis fin août, le discours des oppositions, c’est de voter contre ».
« On sait ce qui va se passer », insiste le député de l’Eure-et-Loir. Et de questionner: « Quel est l’intérêt du spectacle quand vous connaissez déjà la fin? »
Néanmoins, cette stratégie pourrait donner du grain à moudre aux oppositions alors qu’Emmanuel Macron souhaite appliquer une « nouvelle méthode », s’appuyant davantage sur la concertation. Par ailleurs, le contexte social est brûlant. Les salariés de TotalEnergies et Esso-ExxonMobil sont en grève depuis plusieurs jours pour réclamer une hausse des salaires ; les différentes composantes de la Nupes co-organisent une marche contre la vie chère ce dimanche.
S’il ne suivait pas cette option, le gouvernement pourrait choisir de mener les débats le plus longtemps possible avant de dégainer le 49.3. Cela lui permettrait de démontrer qu’il a fait tout son possible pour aller au bout des échanges et de rejeter ainsi la faute sur les oppositions. En revanche, cette piste le conduirait à une mise en place plus tardive des mesures prévues dans le budget.
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