Ils l’ont promis : nous saurons tout de l’histoire de Harry et Meghan et on aurait enfin leur version. Pour le moment, la première partie de cette minisérie ne tient pas vraiment ses promesses.
Romance façon Harlequin
L’histoire de Harry et Meghan a tout du roman Harlequin, c’est pour ça que les gens la suivent avec passion. Honnêtement, on les comprend : une belle histoire vraie, avec une princesse et une star de Hollywood, avec un beau mariage à la clef, ça allège le quotidien morose.
Rappelez-vous la mère de famille dans The Middle : elle rêvait du mariage de William et Kate, au point de rendre dingue sa famille, qui ne comprenait pas sa passion pour la royauté britannique. Il faut dire qu’en tant qu’Américain, il y a un côté comique à être fasciné par l’ancien pays colonisateur.
Le côté divertissement est bien assuré par les deux couples, mais autant William et Kate ont bien compris ce qu’on attendait d’eux, autant Harry et Meghan sont plus réticents à jouer le jeu. Ce qui place le spectateur dans une curieuse position.
Agacement
Disons-le : si vous ressentez un profond agacement devant la première partie du reportage sur Harry et Meghan, c’est normal. On ne vous en voudra pas, on vous comprend : on a ressenti la même chose. Oui, perdre sa mère quand on est enfant, c’est très dur, surtout dans les circonstances que l’on connaît. Grande nouvelle : cela arrive à beaucoup d’enfants malheureusement.
Depuis plus de deux ans, nous vivons une épidémie et pour les Européens, la guerre en Ukraine fait partie du quotidien, au même titre que l’inflation, les questions liées au pouvoir d’achat et le réchauffement climatique. Là-dessus, on a un couple, dont l’élément masculin n’a jamais manqué de rien et qui explique que la vie n’est pas gentille.
On est plus calme devant Meghan qui a pour elle d’avoir réellement construit sa carrière en partant de pas grand-chose. Malgré la sympathie qu’on peut éprouver à leur égard, on n’en reste pas moins agacé. On a envie de les secouer et de leur dire « coucou, vous avez conscience de la chance que vous avez ? ». Notons également que les entendre expliquer qu’ils traversaient l’Atlantique toutes les deux semaines pour se voir, pendant qu’on nous fait la morale sur nos propres habitudes qui mettent en danger la planète, ça peut faire sautiller des sourcils.
Vie privée et privilège
L’aspect du reportage qui permet de contrebalancer l’agacement est celui de la vie privée des protagonistes. Les intervenants expliquent qu’un genre d’arrangement existe au Royaume-Uni. Le contribuable paie pour la famille royale et en échange, ils doivent se soumettre au bon vouloir de la presse et donc des lecteurs. Les membres de la famille royale n’ont aucune intimité. Pour que cela s’arrête, il faudrait aussi que les lecteurs arrêtent d’acheter cette presse poubelle, qui n’est pas du journalisme.
C’est le point qu’on ne leur envie absolument pas. D’ailleurs, les tabloïds britanniques n’ont pas hésité à pirater leurs téléphones portables pour alimenter leurs torchons. Il y a beaucoup à dire sur la presse française, mais reconnaissons que le droit à l’image et à la vie privée est beaucoup plus protecteur en hexagone que du côté de la perfide Albion. Ce qui est surprenant est l’absence d’indignation. Il semble admis qu’on puisse procéder à une intrusion informatique, voler des correspondances privées, qui n’ont absolument aucun intérêt pour la sécurité de la Nation et les rendre publiques. Avis à tous les délinquants informatiques de la planète : postulez dans les tabloïds britanniques, vous serez couverts.
Ils ont peut-être de l’argent et un confort matériel, mais, chacun d’entre nous, avons quelque chose de beaucoup plus précieux : notre anonymat. Imaginez que vous subissiez tous les jours, chaque heure, le regard et les objectifs des appareils photo ou des caméras. Que le simple fait d’être polie soit perçu comme un encouragement quelconque. Que vos poubelles soient fouillées. Évidemment, nous sommes tous devenus accros aux réseaux sociaux — sauf Mercredi Addams — mais on peut aussi moins publier, moins s’étaler. La famille royale britannique n’a pas de bouton stop et ça ne doit pas aider à garder un équilibre mental très sain.
Documentaire gentillet
Si vous vous attendez à des révélations fracassantes, on vous le dit tout net : vous serez déçus. Si vous avez vu l’un des multiples reportages sur Meghan au moment de son mariage avec Harry, vous n’en apprendrez pas plus. Le seul élément réellement intéressant est la place des tabloïds au Royaume-Uni, place confortée grâce aux lecteurs.
En dehors de cela, il n’y a pas grand-chose, si ce n’est un couple, qui essaie de vivre une histoire d’amour sereine, au milieu d’un spectacle. La première partie du reportage insiste beaucoup sur la question du racisme, mais sans apporter concrètement de faits. On nous dit que les Britanniques ne connaissent pas l’histoire coloniale du royaume et qu’elle est peu enseignée. On laissera les Britanniques en juger par eux-mêmes, mais on ne tombe pas du fauteuil en apprenant que l’Empire britannique a pratiqué l’esclavage et la prédation des richesses. C’est plus ou moins dans le « cahier des charges » de la colonisation, ce que chacun sait.
Il faut prendre cette minisérie pour ce qu’elle est : un divertissement. Il n’y a pas d’enquête, pas de révélation ou d’éléments qui feraient trembler la couronne britannique, pour reprendre l’expression consacrée. C’est simplement l’histoire d’un couple, qui a envie de vivre sa vie, loin de certaines obligations, imposées par hasard. La grande différence entre Harry et Meghan tient à cela : le choix. Meghan a choisi de faire un métier, qui la placerait mécaniquement au centre de l’attention. Harry est né dans un milieu où il n’a pas eu le choix. Évidemment, il a aussi bénéficié de certaines compensations, bien loin de ce que vit 99 999 % de la planète.
Harry & Meghan est disponible sur Netflix.
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