Le parcours du Tour de France 2023 est désormais connu. L’organisateur, Amaury Sport Organisation (ASO), a dévoilé, jeudi 27 octobre, le tracé de l’édition 2023, qui s’élancera de Bilbao, au Pays basque le 1er juillet, avant de remonter en France par les Pyrénées. Au programme : un retour au puy de Dôme, un seul contre-la-montre en Haute-Savoie placé en dernière semaine, ou un nouveau passage dans les Vosges avant de rallier Paris. Christian Prudhomme, le directeur de l’épreuve, dévoile pour franceinfo: sport les particularités de cette 110e édition.
Franceinfo: sport : Cette édition 2023 sera surtout concentrée dans la moitié sud de la France. Pourquoi avoir fait ce choix ?
Christian Prudhomme : Avec le cyclisme d’aujourd’hui, pour avoir des étapes sportivement probantes, on concentre davantage le tracé. Il y avait une volonté de montrer qu’en dehors des Alpes et des Pyrénées, qui sont incontournables, il y a des terrains très sélectifs dans le Massif central, le Jura ou les Vosges, qui, à défaut de cols de 15 kilomètres, ont des rampes fortes qui permettent de faire une sélection et de mettre en avant les puncheurs, mais aussi les favoris. On a des coureurs qui peuvent attaquer à 50 kilomètres de l’arrivée, voire même dès le départ. C’est formidable. C’est donc aussi pour que ces coureurs-là, qui nous enthousiasment, aient un terrain à disposition.
Depuis plusieurs années, la première semaine est souvent accidentée pour dynamiser la course. Cette année, on a une grosse difficulté dès la deuxième étape. Est-ce un cap supplémentaire ?
Les deux premières étapes sont clairement faites pour des puncheurs, avec 3300 mètres de dénivelé le premier jour, ce qui n’est pas arrivé depuis au moins une cinquantaine d’années. Il y aura une dernière côte à 10 km de l’arrivée avec des pentes maximales à 15 %. Le lendemain, on finira avec la côte de Jaizkibel (8,1 km à 5,4 %), qui est la montagne totem de la Clasica San Sebastian. On n’aura pas de peloton groupé lors de ces arrivées au Pays basque. Ca m’avait frappé lors du départ du Yorkshire, en 2014, qui a des points communs avec le Pays basque : les paysages, la ferveur et les pentes raides. Quand le deuxième jour, Vincenzo Nibali gagne, pour nous c’était une vraie satisfaction, et les gens se disaient que le Tour n’est pas allé là-bas par hasard. C’est la même chose pour 2023, on veut montrer ce qu’est le Pays basque.
Faire passer le Tour par les Pyrénées dès les premiers jours risque de créer un scénario de course rarement vu, comment l’imaginez-vous ?
Nous avons la volonté d’aller dans tous les massifs de France, mais aussi d’aller régulièrement dans les Alpes et Pyrénées, qui restent incontournables. On a deux jours dans les Pyrénées, en revanche on n’a pas ce qui se fait de plus dur : il y a le col du Soudet et le Tourmalet, mais au moment de la bagarre la plus intense, on a mis des cols aux pentes très raides, mais pas trop longs. Le puncheur en super forme doit pouvoir résister. Dans le col de Marie-Blanque, le Julian Alaphilippe de 2019 n’est sans doute pas lâché. L’idée, c’est de garder un Wout van Aert, qui peut être toujours dans le coup après les Pyrénées.
Avec autant de dénivelé en première semaine, quel Tour peuvent imaginer les sprinteurs ?
Pour les sprinteurs, on aura huit étapes, mais on n’en aura pas quatre d’affilée, ça me parait totalement impossible aujourd’hui. À Bayonne (3e étape), c’est une arrivée pour sprinteurs, puis sur le circuit automobile de Nogaro (4e étape), et sur les quais à Bordeaux (7e), où l’on n’était pas allé depuis 2010. On a Limoges (8e), avec une arrivée qui n’est pas exactement la même que ce mano a mano entre Marcel Kittel et Bryan Coquard, qui s’était joué à la photo finish en 2016. Ensuite, ils vont se retrouver à Moulins (11e), puis en fin de Tour on aura Bourg-en-Bresse (18e) puis Poligny (19e) avec une ligne droite de huit kilomètres, avant de finir sur les Champs-Elysées (21e).
« Il faudra avoir la capacité de franchir tous les massifs montagneux, mais des coureurs comme Arnaud Démare ou Christophe Laporte ont prouvé qu’en dernière semaine du Tour, ils étaient très forts. Quant à Wout van Aert, si on faisait quatre semaines, il serait toujours là ! »
Christian Prudhomme, directeur du Tour de Franceà franceinfo: sport
Y aura-t-il des cols à découvrir lors de cette édition ?
On aura le col du Feu (5,8 km à 7,8 %) lors de l’étape Annemasse-Morzine, qui sera entièrement en Haute-Savoie. On a également un nouveau versant de la Croix des Moinats, et la côte de Longefoy, qui était sur le parcours du Tour 2019 mais qui n’a pas pu être visitée en raison des coulées de boue lors de l’étape neutralisée qui devait arriver à Tignes. Ce sera une ascension costaude avec une descente très technique.
Le Tour repassera rapidement dans les Vosges, mais sur un col moins emprunté, le Markstein…
Sur cette 20e étape, on va avoir six cols répertoriés, avec quasiment 8% sur les deux derniers, le Petit Ballon et le Platzerwasel, il n’y aura pas un mètre de plat entre les deux. En plus, le pied du Petit Ballon est sur une route forestière à 10 %, ce qui accentue encore la difficulté de la montée. C’est lors de cet enchaînement du Petit Ballon au Markstein que van Vleuten s’était envolée en 2022 lors du Tour de France femmes.
Le retour au puy de Dôme, 35 ans après, promet d’être un moment symbolique, avec le départ de Saint-Léonard-de-Noblat…
C’est un lieu emblématique de l’histoire du Tour de France, avec le duel Anquetil – Poulidor, c’est la légende du Tour. La condition sine qua non du retour au puy de Dôme, c’est qu’il n’y ait pas de public sur les quatre derniers kilomètres. L’étape fera tout de même 3 600 mètres de dénivelé ! Dans les quatre derniers kilomètres, on aura une route unique, puisque c’est la seule route en escargot, où ça ne tourne qu’à droite ! Il n’y en a pas d’autres comme ça. Ce sera donc hautement symbolique, avec en plus un départ de Saint-Léonard-de-Noblat à la mémoire de Raymond Poulidor.
Comment se présente le seul contre-la-montre, de seulement 22 kilomètres mais en côte, et placé au lendemain de la dernière journée de repos ?
Un chrono le lendemain du repos, ce n’est pas souvent arrivé, mais ce n’est pas non plus rarissime, comme sur la dernière Vuelta. Les favoris du classement général passeront une deuxième journée de repos concentrés. C’est un chrono en montagne, qui a 650 mètres de dénivelé sur les 22 kilomètres : une première bosse de 1,5 km à 8 % puis Domancy, qui est de 2,5 km à 9,4 %, et qui sera très rude. Ce n’est pas un chrono pour Filippo Ganna, c’est certain.
La 17e étape comptera 68 km d’ascension. Est-ce l’étape-reine, à quelques jours de l’arrivée à Paris ?
Il y aura 5 100 m de dénivelé ce jour-là, c’est le plus fort de ce Tour de France. La deuxième, celle de Saint-Gervais, en compte 4 300. On aura le col des Saisies, le Cormet de Roselend, Longefoy et le col de la Loze, qui avait fait sensation dès son entrée en scène en 2020 avec ses pourcentages hallucinants et ses ruptures de pente à plus de 2 000 m. On souhaitait y revenir vite, mais cette année, on ne s’arrêtera pas en haut, on basculera pour finir sur l’altiport de Courchevel, où les dernières centaines de mètres sont à 18 %. Cette étape-là va compter énormément, ce n’est pas un jour où il faudra être moins bien.
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