Le ping, ils l’ont dans le sang. L’expression pourrait presque s’entendre littéralement pour les frères Lebrun, qui ont fait leurs débuts aux Championnats européens de Munich (Allemagne) mardi 16 août. Alexis et Félix, 18 et 15 ans, nouveaux prodiges du tennis de table français, classés respectivement 30e et 70e mondiaux, impressionnent pour leur première année sur le circuit international.
Champion de France pour l’un, champion de France juniors pour l’autre, ils sont arrivés avec beaucoup d’envie sur leur première grande compétition internationale. Ils sont pour l’heure qualifiés pour les quarts de finale en double, et ont passé chacun passé leur premier tour en simple.
Ils avaient 3 ans lorsqu’ils ont goûté aux joies de la discipline, en suivant leur père à la salle d’entraînement. Car leurs liens de filiation avec la petite balle ronde sont très forts des deux côtés de leur arbre généalogique : leur père, Stéphane Lebrun, entraîneur du pôle de Montpellier depuis 2000, est un ancien joueur professionnel, champion de France en double en 1997 avec Nicolas Châtelain.
Leur oncle, frère jumeau de leur mère, est Christophe Legoût, l’un des quatre représentants de la génération Mousquetaires en France.« Ils vivent dans un contexte très rare, souligne le DTN de la Fédération française de tennis de table, Jean-Nicolas Barelier. Le compromis entre l’inné, du fait de leur histoire familiale, et l’acquis est quasi parfait. »
Le chemin vers le ping « s’est fait naturellement », raconte Félix, sans pression familiale. « Ils ont toujours baigné là-dedans, on en parle constamment, mais c‘est un jeu avant tout, c’est ce qui transpire de chez eux », souligne Stéphane Lebrun. Les deux garçons confient tout de même prendre tout ce qu’ils peuvent de l’expérience de leur père.
« Stéphane ne les coache pas, mais il leur apporte une réelle plus-value dans sa capacité à faire les meilleurs choix pour ses fils », glisse Jean-Nicolas Barelier. Pour le cadre de la fédération, outre les qualités en matière de jeu, de technique, de cran et de physique, les frères se distinguent par « leur capacité d’anticipation ».
« Comme ils ont vu et entendu du tennis du table en permanence dès leur plus jeune âge, c’est comme s’ils avaient un temps d’avance. Il y a quelque chose de naturel dans leur manière de jouer, cela semble plus facile pour eux quand ils jouent. »
Jean-Nicolas Barelier, DTN de la Fédération française de tennis de tableà franceinfo: sport
Leur père partage ce constat. « Alexis fait des choses que les autres ne font pas, explique Stéphane, comme marcher à 7 mois à demi. Il a des facilités d’apprentissage assez impressionnantes. Félix m’a encore sorti l’autre jour : ‘Il m’énerve Alex parce que je mets trois mois à apprendre quelque chose et lui deux jours et demi. Il voit quelque chose, il l’apprend sans même le pratiquer.’ » De son côté, le cadet est le « préservant » des deux. « Il a une volonté de fer et la soif d’apprendre », décrit le père.
Les deux frères enchaînent les performances. Arrivé il y a moins de trois mois dans le top 100, Alexis a grimpé au classement grâce notamment à un parcours fulgurant au WTT Contender de Tunis (il a battu Emmanuel Lebesson, champion d’Europe 2016, Tomokazu Harimoto, n°4 mondial et Mattias Falck, vice-champion du monde en 2019). « Tout va très vite, c’est surprenant mais tellement satisfaisant« , lance l’aîné, les yeux brillants.
Quant à Félix, « il a participé à tous les championnats d’Europe depuis son plus jeune âge, remportant le titre chez les cadets », rappelle Stéphane Lebrun. « On profite de tout ce qu’on peut prendre, on sait la chance que c’est de pouvoir se consacrer à sa passion », précisent les deux Héraultais, très réfléchis dans leurs réponses.
De loin, on pourrait confondre les deux frères dans leur maillot d’entraînement rouge. Si la carrure de Félix est moins développée et sa voix un peu plus fluette, les deux adolescents ont la même chevelure blonde, des lunettes rectangulaires noires vissées sur le nez et une façon identique de se tenir. Les deux partagent surtout une complicité bien visible, dont ils tirent profit au quotidien.
« On se connaît par cœur avec Félix, on se pousse mutuellement à progresser, c’est hyper intéressant de jouer ensemble », explique Alexis. « Ils ont tous les deux quelque chose à tirer de l’autre », insiste leur père, qui suit la compétition européenne depuis Montpellier.
Un atout également non-négligeable en compétition. « C’est super cool de partager tout ça avec son frère et en plus, c’est un atout de ne pas être seul », poursuit l’aîné. « Les déplacements, ça peut peser, surtout à leur âge, enchaîne Stéphane Lebrun. Là, ils vivent tout à deux. Quoi qu’il arrive dans la compétition, il y a toujours l’autre. »
Posés en interviews, les deux adolescents montrent un tout autre visage en match, y compris lorsqu’ils s’affrontent. « Le ping c’est un duel. On rentre dans une arène comme on entre sur un ring, sauf qu’on reste à 1,50 m de son adversaire. Il faut l’impressionner et avoir un esprit guerrier, même contre son propre frère », glisse Stéphane Lebrun. « En match, j’ai bien évidemment envie de battre Alexis, c’est la même chose pour lui », explique le cadet dans un éclat de rire.
« On a joué l’un contre l’autre sept ou huit fois en match officiel. C’est particulièrement stressant, on n’a pas envie de perdre, encore moins contre son petit frère, confie Alexis, l’air malicieux. Mais pour l’instant, j’ai toujours gagné j’espère que cela va continuer ! » « Ça reste mon frère, après le match, on passe à autre chose, ça n’atteint pas notre relation », résume Félix.
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