Alors que la totalité des départements métropolitains est concernée par un des quatre niveaux de l’alerte sécheresse, les golfs sont-ils exonérés de toute mesure de restriction d’eau ou soumis à des contraintes a minima ? C’est ce que laissent entendre plusieurs déclarations et tweets de députés La France insoumise.
« En période de sécheresse, il est interdit de remplir les piscines mais les golfs doivent seulement réduire leur consommation de 20% et arroser entre 19 heures et 8 heures » déclare, sur le réseau social Twitter, le député LFI de Marseille Hendrik Davi. Il ajoute qu' »un 18 trous a besoin de 5000 m3 [d’eau]/ jour« . Sur CNews, le mardi 2 août, le député LFI des Bouches du Rhônes Manuel Bompard a quant à lui jugé inacceptable que des secteurs, « par exemple les golfs » soient « exonérés de mesures de restriction » d’eau. « Décision de classe inacceptable« , poursuit-il sur Twitter. Qu’en est-il réellement ?
Pendant que d’innombrables départements subissent des restrictions d’eau avec la #sécheresse, certains secteurs comme les golfs peuvent continuer à dilapider des milliers de m3 d’eau pour arroser : décision de classe inacceptable.
Il faut planifier le juste partage de l’eau ! pic.twitter.com/PWn0tOQ5pc
— Manuel Bompard (@mbompard) August 2, 2022
Les mesures en période de sécheresse sont prises dans le cadre d’un dispositif légal et d’orientations nationales préconisées, en fonction de quatre niveaux de gravité: vigilance, alerte, alerte renforcée et crise. Ensuite, des arrêtés préfectoraux sont pris, au niveau local, pour déterminer, en fonction de l’évolution de la sécheresse, quelle zone est à quel niveau, avec quelles restrictions associées, en concertation avec les Comités ressources en eau.
Concernant les golfs, le cadre général précise qu’en seuil d’alerte sécheresse, l’arrosage en journée est interdit, la consommation hebdomadaire doit être réduite de 15 à 30% et les prélèvements d’eau doivent être inscrits chaque semaine sur des registres. En alerte renforcée, la consommation d’eau est réduite d’au moins 60%, l’arrosage est interdit sauf sur les départs et sur les greens (les espaces gazonnés tondus très ras autour des trous) qui représentent en moyenne d’après la Fédération nationale de golf seulement 1 à 2% de la surface totale. Enfin, au stade dit de crise, il y a interdiction d’arroser. Les greens peuvent éventuellement l’être la nuit, « par un arrosage réduit au strict nécessaire » et sauf en cas de pénurie d’eau potable.
Ces mesures ont été décidées dans le cadre d’accords entre le secteur et les ministères de l’écologie, de l’environnement et de l’agriculture pour la période 2019-2024 qui intègrent aussi des engagements, de la part du secteur, à mener des actions de sensibilisation et de préservation de la biodiversité. Elles peuvent être renforcées à l’échelle locale si les préfets ou les maires estiment que les conditions l’exigent.
« Le changement climatique se traduira dans les années à venir par des périodes de sécheresse plus fréquentes, plus dures et plus longues. Dans ces conditions, l’engagement du golf français se traduit par une gestion toujours plus raisonnée de la ressource en eau« , écrit sur son site la Fédération française de golf. Celle-ci reconnaît que la consommation d’eau est importante mais, interrogé par franceinfo, le président de la Fédération, Pascal Grizot, est sidéré par les chiffres avancés par le député La France insoumise Hendrik Davi. La consommation nationale moyenne annuelle d’un golf est de 25 000 m³ par an et par tranche de 9 trous explique la Fédération, pour qui l’estimation avancée par le député est 36,5 fois supérieure à la réalité.
Les chiffres de 5 000 m³ d’eau par jour avancés par le député LFI de Marseille s’appuient sur un rapport sénatorial, datant de 2002-2003, sur la base de statistiques établies pour certaines en 1992. L’estimation portait par ailleurs sur les « golfs haut de gamme de 18 trous » et le rapport précisait à l’époque « qu’il existe de très grandes différences selon les golfs, rendant hasardeux l’établissement de moyennes ». « La Fédération française de golf travaille depuis plus de vingt ans avec les ministères de l’Environnement, de l’Agriculture et des Sports et s’est engagée à diminuer l’utilisation d’eau de plus de 30% », assure Pascal Grizot, selon qui « ces objectifs ont été atteints ».
La Fédération reconnaît toutefois sur son site qu’à ce stade » seulement 20% des golfs bénéficient d’approvisionnements que l’on peut considérer ‘durables’ : eaux pluviales collectées et stockées dans des réserves, eaux brutes issues de grands canaux d’irrigation, eaux recyclées par des stations d’épuration ». Plus de 70% des golfs prélèvent l’eau pour l’arrosage dans les milieux naturels (eau souterraine et de surface) et près de 10% utilisent l’eau du réseau public (donc de l’eau potable).
Les golfs sont en tout cas bien concernés par les restrictions d’eau, ce qui explique d’ailleurs, pointe la Fédération, que certains parcours soient secs et jaunis. Cela peut dérouter les golfeurs mais, conclut-elle, cela implique « de mener des actions de sensibilisation et d’éducation pour qu’ils comprennent et apprécient le sens de ces mesures d’économie et de solidarité entre usagers de l’eau« .
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