le derby du Nord n'a jamais été aussi chaud

Qui sera le nouveau roi du Nord ? Vainqueurs des deux derbys la saison passée, les Lensois remettent leur couronne régionale en jeu, dimanche 9 octobre, sur la pelouse de la Decathlon Arena du Losc. Mais la suprématie régionale ne sera pas le seul enjeu d’un derby qui n’a jamais été aussi chaud sur la pelouse. Et pour cause : depuis leur retour en Ligue 1 il y a trois ans, les Lensois ont vite rattrapé leur retard sur les Dogues. Si bien que pour la première fois de l’Histoire, le derby des Hauts-de-France s’installe comme un choc du haut de tableau.

Jusqu’ici, Lensois et Lillois côtoyaient rarement les sommets en même temps. Certes, il y eut bien la finale de coupe de France 1948, remportée par un Losc alors intraitable en D1 face au voisin lensois, pensionnaire de D2. Les très anciens se souviendront aussi d’un choc de première division en 1946, à Lille, qui avait vu les Dogues (2e) prendre le meilleur sur les Artésiens (3e), après que le toit du stade se soit écroulé sous le poids de supporters acrobates. Mais, hormis ces exceptions d’un autre âge et en soixante-dix ans de rivalité, Lille et Lens n’ont jamais partagé le haut de l’affiche.

A tel point que la fusion des deux rivaux a plusieurs fois été envisagée dans les années 1990, notamment par Gervais Martel. En 1997, l’emblématique président lensois constatait : « Nous avons de plus en plus de mal à exister face à la concurrence de Paris ou de Lyon. Je défends cette idée depuis longtemps : mieux vaut un grand club de la région, que deux moyens ». La saison d’après, Lens était champion de France et Lille redescendait en Ligue 2. Le projet n’a donc jamais vu le jour.

Rien d’étonnant lorsque l’on analyse l’antagonisme entre les deux clubs. D’un côté, Lille, capitale des Flandres, bourgeoise et florissante. De l’autre, Lens, emblème du bassin ouvrier au taux de chômage élevé, club populaire par excellence. D’un point de vue ballon rond, Lens l’emporte par sa ferveur et sa côte de sympathie, mais le palmarès lillois domine avec quatre titres de champion et six coupes de France. 

En vérité, chaque club a connu ses heures de gloire. Géant national à la croisée des millénaires, le RC Lens a décliné à la fin des années 2000, tombant jusqu’en Ligue 2, alors même que le Losc revenait de nulle part pour s’imposer comme l’un des grands clubs hexagonaux des dernières années (champion en 2011 et 2021).

Depuis 2020-2021, le derby du Nord est toutefois de retour. Et comme pour rattraper les années de privations, il a décidé de hisser son niveau d’un cran. En 2021, le RC Lens (futur 7e) est un promu qui s’invite dans le haut de tableau, mais il est encore trop tendre face aux Dogues, victorieux des deux derbys (4-0, 3-0) et futurs champions. Club dominant de la région depuis vingt ans, le Losc reste alors sur 12 matchs sans défaite face à son rival, qui attend une victoire depuis 2006.

Outre leur régularité depuis 20 ans, les Lillois ont aussi profité des déboires lensois pour peu à peu s’emparer du statut de club de la régoin. Dans les cours d’école et sur les pelouses, les maillots lillois ont supplanté les Sang & Or. Mais en 2021-2022, le RC Lens a confirmé son retour au premier plan (7e en fin de saison) en s’offrant les deux derbys (1-0, 2-1). Mieux : les Artésiens ont terminé devant le Losc (10e) au classement pour la première fois depuis 2006-2007.

Les incidents survenus à Bollaert l’an dernier ajoutent de l’huile sur le feu. La venue de 1000 supporters lensois ce dimanche à la Decathlon Arena fera d’ailleurs de ce derby le premier avec public des deux camps à Lille depuis 2015. L’ambiance s’annonce donc bouillante en tribunes, au même titre que la bataille sera féroce sur la pelouse.

Auteurs d’un début de saison probant, les Lensois – 4emes et toujours invaincus – s’avancent en favori sur la pelouse du voisin lillois, une première depuis quinze ans. Mais Lille, qui a entamé un nouveau cycle l’été dernier, est tout aussi ambitieux. Les Dogues soufflent certes le chaud et le froid depuis le début de la saison, en alternant victoire et défaite depuis huit rencontres, mais ils n’en demeurent pas moins candidats à l’Europe. Comme le RC Lens.

Tombeurs de Lyon, les Lensois abordent ce derby sûrs de leurs forces, eux qui n’ont plus perdu en championnat depuis le 3 avril dernier à Strasbourg. Soit une série de 17 matchs. Plus qu’un choc régional, il s’agit donc bien d’une confrontation de haut de tableau. « Ca veut dire que le football nordiste va bien, et qu’on fait les choses bien ici, de la formation aux pros. Et ça pimente encore plus le match », apprécie Jean-Michel Vandamme, dirigeant historique du Losc et directeur du centre de formation.

« Le derby c’est toujours un moment particulier. Encore plus maintenant qu’on est au même niveau, et tant mieux. Il y a de la place pour deux grands clubs dans le Nord, prenons l’exemple des clubs de Londres. »

Jean-Michel Vandamme

à franceinfo sport

Du haut de ses 45 années au Losc, Jean-Michel Vandamme a de la bouteille en matière de derby : « Peu importe le niveau de chacun, un derby c’est irrationnel. Tu peux être bien au dessus toute la saison, et le perdre ». Le Lillois confie toutefois se réjouir de voir les deux clubs tutoyer le haut de l’affiche : « Il y a toujours des périodes dans la vie d’un club. Que le RCL soit à ce niveau, tant mieux. Mais on ne doit pas les craindre pour autant, – il ne manquerait plus que ça – ou qu’on leur manque de respect ». Car à la fin, peu importe le contexte, un derby, ça se gagne.

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