EXCLU BFMTV – En déplacement à New York pour acompagner les enfants de son association, IBKM (inspired by Kylian Mbappé), l’attaquant du PSG et de l’équipe de France s’est confié à BFMTV.
Un mois après l’annonce de sa décision de rester au Paris Saint-Germain et à l’occasion d’un déplacement à New York avec des enfants de sa fondation, Kylian Mbappé a accordé à BFMTV un entretien spécial, diffusé ce vendredi. Voici l’intégralité de cette interview, menée par Jean-Baptiste Boursier.
Kylian Mbappé, il y a votre photo maintenant sur Times Square… Vous réalisez? On est à New York, l’écran est colossal, il fait 5 mètres de haut, et c’est vous sur cette pub Nike, dans cette ville, dans un pays qui n’est pas spécialement football par ailleurs…
C’est super d’avoir cette reconnaissance dans le monde entier. Les États-Unis, c’est un grand pays, j’ai toujours aimé venir ici. D’avoir cette reconnaissance-là ici dans cette belle ville de New York, c’est spécial.
Les Américains viennent vous parler? Ils vous disent quoi?
Ils aiment beaucoup le PSG déjà et je pense que c’est dû à la collaboration avec Michael Jordan et le fait qu’on ait des stars internationales dans l’équipe. Ils connaissent un peu l’équipe de France aussi. Il y a la Coupe du monde qui arrive et ils s’intéressent aussi à cet événement. Ils étaient contents que je reste déjà! Je ne savais même pas que ça avait traversé les frontières et que c’était venu jusqu’ici. Mais ils étaient contents que je reste et ils espèrent qu’on va gagner la Coupe du monde encore.
Cette ville représente quoi pour vous?
C’est le rêve américain, c’est la vie en grand, c’est Times Square, c’est toutes ces choses-là. C’est pour moi le grand monde et avoir l’opportunité de venir ici, d’être reconnu, c’est vraiment un privilège.
Ça veut dire quoi pour vous le rêve en grand? A 23 ans vous avez déjà le rêve en grand.
Oui mais c’est différent, c’est autre chose, ça dépasse le cadre du football.
Ce n’est pas seulement Kylian le joueur de foot, les gens reconnaissent aussi un homme de 23 ans avec ses valeurs et ses principes.
C’est ça aussi qui est reconnu ici, c’est quelque chose de sympa, ce n’est pas seulement le joueur de foot.
Les valeurs vous les transmettez aussi. C’est en partie le but de ce voyage. Vous avez créé votre association, IBKM, inspired by Kylian Mbappé, il y a deux ans. Tout à l’heure, les enfants de cette association vous ont rejoint à Times Square. Vous les accompagnez jusqu’à la vie active, et certains sont petits, 9 ans!
Oui, il y a des petits bouts de chou. Mais oui, c’est vraiment l’idée. C’est de leur tendre la main, d’avoir un premier relais pour entrer dans la vie active. Je sais ô combien c’est difficile d’avoir cette aide-là et je pense que c’est de mon devoir maintenant que je suis passé de l’autre côté de tendre la main. Après je n’ai pas forcément envie qu’ils deviennent des joueurs de foot et je pense qu’il n’y en a aucun qui joue vraiment au foot. Qu’ils aient leur rêve à eux. On ne veut rien leur imposer mais les accompagner. C’est le mot d’ordre de cette association.
Ils viennent d’où ces enfants?
D’un peu partout dans Paris, 49 garçons et 49 filles. C’est cette volonté d’avoir cette mixité sociale, de réunir toutes les communautés et toutes les cultures. D’apprendre à vivre les uns avec les autres. C’est ce que j’ai appris avec le football, j’ai partagé des vestiaires avec des gens dont je ne parlais pas la langue. Des gens qui ont une culture complètement éloignée de la mienne, une vision de la vie complètement éloignée de la mienne. On a réussi à cohabiter. C’est vraiment ce message que je veux faire passer.
Ils l’entendent ce message?
J’espère, c’est vraiment le but de cette association! Mais après je pense que c’est continuer une partie de l’éducation. Je pense qu’il y a le travail des parents qui commence. Moi, mes parents ont commencé et puis j’ai été au centre et ils ont continué mon éducation. Il y en a qui sont très jeunes, comme vous l’avez dit. On ne veut pas remplacer leurs parents non plus, parce que des parents, c’est irremplaçable.
Ça veut dire quoi, c’est les aider financièrement pour être concret?
Pas seulement! Financièrement bien sûr, mais pas seulement. Il faut leur proposer des projets, leur proposer des voyages, ouvrir leur esprit. C’est l’objectif de ce voyage aussi. Ils ont été au musée aujourd’hui. Bon ils ont fait le shoot Nike sur Times Square aussi. Ça c’est autre chose. C’est une expérience aussi, c’est unique! C’est une photo, iconique qui va rester pour eux j’espère, ca va rester pour moi!
On veut vraiment leur proposer plein de choses, avoir ce côté culturel… On voulait faire plein de choses pour qu’ils apprennent à découvrir le monde aussi, les faire voyager… Avec le Covid c’était vraiment pas facile et c’est pour ça que je suis content qu’ils puissent être là aujourd’hui. C’est une petite victoire sur le Covid aussi.
Les accompagner jusqu’à la vie active, ça veut dire un moment…
Ça dépend… Chacun va avancer à son rythme, on va les accompagner. Moi, je suis rentré dans la vie active à 16 ans, on ne rentre pas tous dans la vie active à 16 ans. Peut-être qu’il y en a qui rentreront plus vite que d’autres mais c’est vraiment de les accompagner jusqu’à ce qu’ils aient ce premier métier ou cette première voie qui leur corresponde.
Vous réussissez à échanger avec eux, ils peuvent vous croiser?
Il y a cette possibilité d’échanger. C’est vrai que ces derniers temps, je n’étais pas beaucoup là, mais j’étais toujours au contact, pour savoir ce qu’ils faisaient et comment ça se passait. Et là je vais les voir un peu pendant ce voyage à New York. J’ai envie de m’intéresser un peu plus parce que je n’étais vraiment pas trop là ces derniers temps. J’ai beaucoup délégué. Mais là ce sont les vacances, c’est le moment où je peux être là et connaître bien les gamins.
Vous avez parlé des valeurs que vous voulez défendre. Vous êtes important maintenant. Quand vous dites quelque chose, le message est important pour ces jeunes, il est important pour tous les jeunes qui vous regardent pour vous c’est quelque chose qui est très clair, désormais ?
Je n’ai jamais eu pour habitude de me cacher. Après bien sûr que c’est un terrain glissant, mais je suis bien cramponné. Je n’ai pas envie de me contenter de seulement jouer au football et rentrer chez moi. Je suis un homme de cette société comme tout le monde, tout le monde donne son avis, c’est juste que ma voix porte un peu plus. Mais, j’essaie vraiment d’agir en fonction de mes valeurs et de mes principes.
Dès le début pour vous, c’était clair?
Ça a toujours été clair.
Parce qu’il y a des joueurs de foot qui disent ‘moi je joue au foot et je ne veux pas faire autre chose’…
Oui, chacun sa vision des choses.
Mais vous, tout de suite, vous vous êtes dit ‘si ma voix peut compter sur certains messages, je veux qu’on l’entende’…
Bien sûr, parce que ça peut faire avancer les choses.
Et ça permet de laisser une trace autre que le football, laisser une trace en tant qu’homme, parce que ma vie de footballeur, elle va s’arrêter.
Je suis peut-être bon, mais elle va bien s‘arrêter un jour. Mais ma vie d’homme, j’espère qu’elle va continuer plus longtemps. Je veux montrer que malgré le fait qu’on doit toujours rester concentré dans notre métier, on n’est pas enfermés dans cette bulle. On sait ce qui se passe dans notre société.
Vous avez des retours sur ces prises de positions ou ces valeurs?
Oui, souvent. Les gens m’interpellent sur des prises de positions, les dernières que j’ai pu prendre, que ce soit sur les violences policières, le racisme… Les gens sont contents parce que je représente cette voix aussi.
Quand les gens vous suivent, je suis un peu leur porte-parole, je suis un peu la voix des gens qu’on n’ entend pas aussi.
Tout en respectant le monde qui m’entoure, en respectant les gens mais en donnant mon opinion, je pense que c’est important.
Vous allez faire une rencontre aussi, c’est Omar, il est Syrien, il a passé trois ans dans des geôles à se faire torturer, il s‘est échappé grâce à sa mère… Son histoire est très complexe mais il est passé en Suède, aujourd’hui, il étudie aux États-Unis. Il est sorti des geôles de Bachar Al-Assad, il pesait 34 kilos et aujourd’hui, il étudie le droit et il est aussi à sa façon la voix de ceux qui n’ont pas de voix. Pour vous, pourquoi c’est important de le rencontrer?
Avant tout parce que pour moi c’est déjà un exemple. J’y vais avec la plus grande humilité. On parlait de dépasser le cadre du football, là, ça dépasse tous les cadres. J’y vais vraiment pour un plaisir personnel, le rencontrer… voir que ça existe des gens aussi forts. J’ai fait ma boite de production aussi pour rassembler toutes les communautés, donner la voix à des gens pour qu’ils puissent faire passer leurs messages, qu’ils aient la liberté de s’exprimer. On va faire pas mal de choses. Mais avant tout c’est pour le rencontrer, lui poser des questions, je veux savoir, je vais être émerveillé.
C’est vous qui allez être impressionné?
Oui, sûr. Peut-être que lui le sera un peu mais moi je le serais beaucoup plus parce que je sais tout ce qu’il a traversé et que pour arriver jusqu’à cette rencontre, il en a fait beaucoup plus que moi.
Depuis tout à l’heure nous évoquons les valeurs. Votre président, Nasser Al Khelaïfi, puisque vous restez au Paris-Saint Germain…
(Rires) Oui, c’est toujours mon président. Voilà maintenant, c’est fini, c’est fini!
Dans un entretien cette semaine, il fait valoir vos valeurs, les vôtres, celles de votre famille en disant ‘ce qu’incarne Kylian Mbappé, je veux que ce soit ce qu’incarne le Paris Saint-Germain’, ça vous touche?
Oui, bien sûr, ça me touche beaucoup surtout quand ça vient de mon président. Maintenant, c’est un message qui fait plaisir mais il y a eu un Paris Saint-Germain avant moi et il y en aura un après moi.
Tout le monde sait l’ambition que j’ai de laisser ma trace dans ce club mais vraiment le Paris Saint-Germain a cette identité et moi je ne fais qu’apporter ma pierre à l’édifice.
Il a cette identité depuis sa création, il y a une cinquantaine d’années, moi je veux juste apporter cette belle page à ce magnifique livre qu’est le Paris Saint-Germain.
Nasser Al Khelaifi dit qu’aujourd’hui, le bling bling, c’est fini. Une façon pour lui de revenir sur les critiques qui touchent ce club. Et le contre-exemple du bling bling en fait, c’est vous. Il dit ‘je veux des garçons concentrés qui travaillent’…
Je ne sais pas si je suis le contre-exemple du bling bling parce que quand tu as ta tête sur Times Square, tu es un peu bling bling mais j’ai toujours fait du football ma priorité. Pour moi l’un ne peut pas aller sans l’autre. Après, je comprends le message du club, c’est aussi, le message que l’on m’a passé.
C’était important pour vous, ça, pour rester? De comprendre que tout le monde était dans le même état d’esprit, c’est-à-dire celui de travailler, d’aller chercher quelque chose ensemble?
Je pense qu’au-delà de me faire rester moi, c’est vraiment maintenant la volonté du club. C’est le club qui veut ça désormais et moi je ne fais que rentrer dans ce projet-là. C’est un projet qu’on m’a proposé, je n’ai pas été à la base de ce projet.
Dans cet entretien, votre président vous enlève aussi un peu de pression. Il tord le cou à l’idée que c’est Kylian Mbappé qui décide tout au Paris Saint-Germain.
Il me n’enlève pas de pression, il dit juste la vérité. Moi, je ne choisis rien. Je sais que beaucoup de gens le pensent, l’ont pensé et le penseront encore. C’est une manière facile de faire passer des messages indirects. Je n’ai pas de problème avec ça. Le club sait que c’est le club avant tout. Le club passe avant tout le monde, avant moi-même si je suis un joueur important. C’est le projet du club et ce n’est pas mon projet à moi. Les choses sont claires et je reviendrai à la reprise pour faire ce que je fais de mieux: jouer et marquer des buts.
C’est quoi les deux objectifs principaux? Je dis deux car j’en ai deux en têtes pour vous: gagner la Ligue des champions et devenir le meilleur buteur de l’histoire de ce club?
Il y en a plus que ça mais oui les deux en font partie. La Ligue des champions, c’est l’objectif clair, annoncé. C’est ça qu’on veut maintenant on sait qu’il y a un chemin. Je pense que ça repasse aussi par faire l’unanimité sur le plan national car c’est deux dernières années, on ne l’a plus fait. Que ce soit cette année ou l’année dernière, on faisait moins peur, on était moins intouchable et ça passe par là aussi de gagner la Ligue des champions.
Il faut qu’on redevienne intouchable qu’il n’y ait plus de discussions dans le championnat, même si ça enlèvera du suspens. Il faut vraiment qu’on retrouve ces bases-là pour ensuite aller essayer de conquérir l’Europe.
Meilleur buteur de l’histoire? Je pense que ça peut bien se passer. Ça va être quelque chose d’incroyable si je parviens à le faire. Après si je continue comme ça, il n’y a pas de raison que je ne le fasse pas.
Vous pensez vraiment que les gens mesurent ce que ça signifie de vous voir vous, l’enfant de Bondy, devenir un des joueurs les plus importants de l’histoire de ce club voire même le joueur le plus important ?
Je ne sais pas parce que je ne l’ai pas exprimé non plus. J’ai toujours été dans cette notion de performance, d’être bon tous les trois jours donc je n’ai pas forcément eu le temps de déclarer ô combien ce club est important pour moi. C’est aussi pour ça que je n’en ai jamais voulu aux gens quand on me disait que je n’avais pas la reconnaissance que je méritais. Je ne l’ai jamais cherchée cette reconnaissance. J’ai toujours été concentré sur mon travail. Je n’ai peut-être pas eu le temps d’être assez romantique avec les gens ou les supporters.
Bien sûr que pour marquer l’histoire, il y a ce côté romantique et émotionnel mais j’ai toujours pensé que la première chose à faire, c’était d’être performant et quand tu es performant, qu’on t’aime ou pas tu es reconnu. Ce club compte énormément pour moi, tout le monde le sait.
Et vous serez champions du monde cet hiver avec la France… ?
Ce serait bien ça aussi. On a du travail mais c’est l’objectif. C’est une occasion inédite. Ça n’a plus été fait depuis je pense que personne n’était né dans ceux qui regardent la télé. Il y a beaucoup de travail. On n’est pas totalement prêt mais il y a encore quelques mois donc ça va le faire, je suis confiant.
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