Sur cette image distribuée par l'Agence spatiale européenne (ESA) le 13 juin 2022, une impression artistique de la Voie lactée et, par-dessus, une superposition montrant l'emplacement et la densité d'un échantillon d'étoiles jeunes provenant de la version 3 des données de Gaia (en jaune-vert). Le signe "vous êtes ici" pointe vers le Soleil.

Le télescope, stationné à 1,5 million de kilomètres de la Terre à l’opposé du Soleil, a scanné 1% de notre galaxie et a pu fournir des informations sur plus de 1,8 milliard d’étoiles.

C’est une collecte sans précédent qui offre aux scientifiques une véritable mine d’informations. Le télescope spatial Gaia a livré ce lundi ses nouvelles données sur près de deux milliards d’étoiles de la Voie lactée, avec une précision inouïe qui permet de dresser une carte multidimensionnelle de notre galaxie, bouillonnante de vie, avec une précision inégalée.

« C’est un jour fantastique pour l’astronomie, qui ouvre les vannes pour de nouvelles découvertes sur l’Univers et notre galaxie », s’est réjoui Josef Aschbacher, directeur général de l’Agence spatiale européenne (ESA) lors de la présentation des résultats Gaïa, l’une des missions scientifiques phare de l’agence lancée en 2013.

1% de la galaxie scanné mais déjà 1,8 milliards d’étoiles analysées

« Avant Gaïa, on avait une vision moyenâgeuse du monde, il y avait des continents qui manquaient, des profils de pays mal connus. Depuis 2016, on a une vision très précise des continents telle qu’on l’a sur Terre. Et ce lundi, ce sont des paysages galactiques qui se révèlent, avec de nouvelles informations sur la nature des objets ou de la poussière entre les étoiles », explique Alejandra Recio-Blanco, de l’Observatoire de la Côte d’Azur.

L’observatoire spatial, stationné à 1,5 million de kilomètres de la Terre à l’opposé du Soleil, en est à sa troisième moisson de données, destinée à cartographier notre galaxie sous toutes ses dimensions, et ainsi comprendre son origine, sa structure et sa dynamique.

Sur cette image distribuée par l'Agence spatiale européenne (ESA) le 13 juin 2022, une impression artistique de la Voie lactée et, par-dessus, une superposition montrant l'emplacement et la densité d'un échantillon d'étoiles jeunes provenant de la version 3 des données de Gaia (en jaune-vert). Le signe "vous êtes ici" pointe vers le Soleil.
Sur cette image distribuée par l’Agence spatiale européenne (ESA) le 13 juin 2022, une impression artistique de la Voie lactée et, par-dessus, une superposition montrant l’emplacement et la densité d’un échantillon d’étoiles jeunes provenant de la version 3 des données de Gaia (en jaune-vert). Le signe « vous êtes ici » pointe vers le Soleil. © EUROPEAN SPACE AGENCY / AFP

Equipé de deux télescopes et d’un capteur photographique d’un milliard de pixels, Gaia ne scanne une toute petite partie (à peine 1%) des astres de notre galaxie, dont le diamètre mesure 100.000 années lumière. Elle a toutefois analysé 700 millions de données chaque jour, durant 34 mois, et a pu fournir des informations sur plus de 1,8 milliard d’étoiles.

Précision inédite

Une foule de détails inédits sont délivrés, comme ces 220 millions de spectres photométriques, qui vont permettre d’estimer pour la première fois la masse, la couleur, la température et l’âge des étoiles.

Et 2,5 millions nouvelles compositions chimiques, cet « ADN » renseignant sur le lieu de naissance des étoiles, et leur voyage dans la galaxie. Ou encore 35 millions de vitesses radiales, qui mesurent le déplacement des étoiles et offrent une nouvelle compréhension des mouvements de la Voie lactée.

« Turbulente » et pas « patachonne »

Surprise pour les scientifiques: Gaia a repéré pour la première fois des « tremblements » stellaires, minuscules mouvements à la surface d’une étoile qui en modifient la forme. La découverte ouvre « une mine d’or pour ‘l’astérosismologie’ des étoiles massives », à savoir leur fonctionnement interne, a expliqué Conny Aerts de l’Université de Louvain (Belgique), membre de la collaboration Gaia.

« À tous les niveaux, Gaia dépasse les espérances », se félicite François Mignard, responsable scientifique de la mission Gaia pour la France.

Ces résultats dressent ainsi le portrait d’une galaxie « beaucoup plus turbulente » que prévu. « On pensait qu’elle avait atteint un état stationnaire, tournant gentiment sur elle-même, comme un fluide qu’on touille doucement avec une cuiller en bois. Mais pas du tout! », développe François Mignard.

Sa « ‘vie de patachon’ est au contraire faite d’accidents, de mouvements inattendus et pas aussi simples » que cette spirale qu’elle décrit. Par exemple, notre système solaire « ne se contente pas de tourner dans un plan perpendiculaire, il monte et il descend, au-dessus et en-dessous », précise François Mignard.

La version finale prévue pour 2030

Elle abrite aussi une population très hétérogène d’étoiles, dont certaines n’étaient pas là dès les origines mais ont pu être « avalées » en cours de route par le biais d’interactions avec la galaxie naine du Sagittaire, toute proche.

« Notre galaxie est un magnifique creuset d’étoiles », résume Alejandra Recio-Blanco. Le niveau de précision de Gaia est tel qu’il « va nous permettre de remonter le passé de la Voie lactée sur plus de 10 milliards d’années », a ajouté Anthony Brown, président du consortium international DPAC, la chaîne de traitement au sol du flot de données envoyées par Gaia.

Les étoiles ont en effet cette particularité de vivre des milliards d’années: les analyser est l’équivalent de l’étude d’un fossile, nous renseignant sur l’état de la galaxie lors de sa formation, soulignent les astronomes. Avec le deuxième catalogue, livré en 2018, les astronomes avaient pu montrer que notre galaxie avait « fusionné » avec une autre il y a dix milliards d’années.

Le nouveau catalogue offre également des mesures d’une précision inégalée pour 156.000 astéroïdes de notre système solaire, en décortiquant la composition de 60.000 d’entre eux. Il aura fallu cinq ans pour livrer ce troisième catalogue d’observations étalées de 2014 à 2017. Et il faudra attendre 2030 pour en obtenir la version finale, quand Gaia aura fini de scruter l’espace, en 2025.

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