la masse de la Voie lactée bien plus inférieure que celle calculée jusqu'ici, selon une étude

Les conclusions de l’étude parue dans Astronomy and Astrophysics avancent que la galaxie abritant le Système solaire aurait une masse quatre à cinq fois supérieure à celle qui était jusqu’ici calculée.

La Voie lactée aurait une masse quatre à cinq fois inférieure à celle calculée jusqu’ici, selon une étude publiée mercredi, dont les conclusions bousculent les connaissances sur les caractéristiques de notre galaxie.

Ce résultat est le « fruit de la ‘révolution Gaia' », explique l’astronome François Hammer, co-auteur de l’étude parue dans Astronomy and Astrophysics. Gaia, un satellite dédié à la cartographie de la Voie lactée, a livré les positions et les mouvements d’1,8 milliard d’étoiles, dans son dernier catalogue en 2022.

Soit une fraction infime du total contenu dans notre galaxie spirale, un disque de quelque 100.000 années lumière de diamètre, constitué de quatre larges bras -dont l’un abrite notre système solaire– qui s’étirent autour d’un centre extraordinairement lumineux.

Une « réévaluation de la masse »

L’étude du catalogue de Gaia a permis de calculer la courbe de rotation de la Voie lactée avec une précision inédite, selon les auteurs de l’étude. L’exercice consiste à établir la vitesse à laquelle les corps célestes tournent autour du centre de la galaxie.

Les observations des galaxies spirales avaient jusqu’ici conclu que cette courbe était « plate », c’est-à-dire qu’arrivée à une certaine distance du centre, la vitesse de rotation était constante.

Or ici, « c’est la première fois que l’on découvre qu’au-delà de son disque, la courbe chute », explique François Hammer, « comme s’il n’y avait pas beaucoup de matière » entre 50 et 80.000 années du centre galactique.

Avec pour conséquence une « réévaluation de la masse de notre Voie lactée sur des valeurs considérées extrêmement basses », de l’ordre de 200 milliards de fois la masse du Soleil, cinq fois moins qu’estimé auparavant.

L’étude de l’équipe internationale, menée par des astronomes de l’Observatoire de Paris et du CNRS, a une deuxième conséquence de taille. Elle « remet en cause le rapport entre matière lumineuse et matière sombre », poursuit l’astronome.

Des conclusions « pas tout à fait fondées »?

Cette matière sombre et hypothétique est aussi appelée matière noire parce qu’elle est jusqu’ici invisible et indétectable. Elle est censée apporter la masse nécessaire à la cohésion des galaxies, et représenter environ six fois la masse de la matière lumineuse, constituée des étoiles et des nuages de gaz. Pour la Voie lactée, les calculs de l’étude revoient ce rapport bien à la baisse, avec seulement trois fois plus de matière noire que de matière lumineuse.

Des conclusions que l’astronome Françoise Combes, bien que collègue de François Hammer à l’Observatoire de Paris, juge « un peu trop osées », voire « peut-être pas tout à fait fondées ».

Notamment parce que l’étude se concentre sur un rayon réduit de la galaxie, alors que les astronomes, en général, calculent la masse de la galaxie en prenant en compte des distances beaucoup plus grandes.

Or, outre des gaz, des amas globulaires, des galaxies naines ou encore le nuage de Magellan, « on a énormément de matière noire jusqu’à ces distances », et autant de masse correspondante, remarque Françoise Combes, grande spécialiste de l’évolution des galaxies. Pour autant, elle salue un travail « très précis, qui améliore nos connaissances des étoiles et de leur rotation », jusqu’à environ 80.000 années lumière du centre galactique.

Une galaxie qui évolue « tranquillement et calmement »

François Hammer a pris en compte les objections de Françoise Combes: il a précisé ultérieurement que « la masse (de la galaxie) calculée dans l’étude est la masse pour laquelle nous savons que les étoiles du disque sont à l’équilibre », c’est à dire dans un rayon de 80.000 années lumière. Et il admet volontiers la « présence de matière à l’extérieur, et en particulier du gaz chaud », susceptible de remplumer la Voie lactée.

L’équipe de François Hammer défend ces travaux en arguant du caractère singulier de notre galaxie. A l’inverse d’un grand nombre de galaxies spirales, qui ont connu des collisions violentes entre galaxies il y a six milliards d’années, la Voie lactée a « évolué beaucoup plus tranquillement et calmement depuis neuf milliards d’années », selon François Hammer.

Autre possibilité pour justifier la différence entre la Voie lactée et d’autres galaxies spirales: la méthode d’observation. Qui repose sur les étoiles pour la première, et sur les nuages de gaz pour les secondes.

En attendant, pour Françoise Combes, la Voie lactée « n’est pas exceptionnelle du tout », et pour ce qui est de la matière noire, « elle est comme les autres ».

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