Sur les 37.000 espèces exotiques dans le monde, 3500 sont considérées comme invasives: elles ont de graves conséquences sur la biodiversité et la qualité de vie de certaines populations. Voici quelques exemples.
3500 espèces dans le monde détruisent la biodiversité, affectent les cultures, la santé humaine et coûtent des milliards de dollars: des espèces exotiques dites invasives, déplacées de leur habitat naturel par les activités humaines, d’après une étude de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) parue ce lundi.
« Les espèces exotiques envahissantes ont été un facteur majeur dans 60% et le seul moteur dans 16% des extinctions mondiales d’animaux et de plantes que nous avons enregistrées”, a souligné Aníbal Pauchard, coauteur de l’étude.
Le coût économique mondial des espèces exotiques envahissantes dépassait les 423 milliards de dollars en 2019.
34 % des impacts des invasions biologiques ont été signalés dans les Amériques, 31 % en Europe et en Asie centrale, 25 % en Asie et dans le Pacifique et environ 7 % en Afrique.
Étant donné que les mesures mises en place par les pays pour empêcher la prolifération des espèces exotiques sont insuffisantes aux yeux de l’IPBES et que la mondialisation ne fait que croître, leur nombre risque d’augmenter dans les années à venir.
« L’accélération de l’économie mondiale, l’intensification et l’élargissement des changements dans l’utilisation des terres et des mers, ainsi que les changements démographiques devraient entraîner une augmentation des espèces exotiques envahissantes dans le monde entier », note la chercheuse Helen Roy.
Si sur les 37.000 espèces exotiques recensées depuis 1970, seuls 10% sont nuisibles, leur impact est considérable. Voici quelques exemples.
• Le rat noir
Le rat noir est la troisième espèce la plus répandue dans le monde, « avec des répercussions considérables sur l’homme et la nature », d’après l’étude du IPBES. Ce rongeur originaire d’Asie aurait été le premier animal à suivre l’instinct voyageur des humains en s’introduisant dans les cales des bateaux.
Il aurait ensuite colonisé de nombreux endroits du globe, que ce soit en Europe de l’Ouest ou 80 % des îles de la planète, selon le Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Il est souvent vu comme la cause de la pandémie de peste au Moyen-âge, même si en réalité sa responsabilité est indirect: il était seulement porteur de la puce infectée.
En cinq siècles, le rat noir serait impliqué dans la disparition de 75 espèces, dont 52 oiseaux, d’après une étude de l’Université de Tennessee publiée en 2016. Selon l’IPBES, cet animal à la longue queue a été la seule cause de l’extinction mondiale de deux autres espèces de rongeurs endémiques des zones protégées des îles Galápagos, dont les « rats de rizière infatiguable ».
« Durant les années de sécheresse, quand la végétation meurt et que la famine menace, le rat noir devient un dangereux prédateur d’espèces protégées comme les puffins (cendrés, de Méditerranée ou de Scopoli) et les océanites, dont il consomme les œufs, tue les poussins et parfois même les adultes », note le parc national des Calanques.
• Les huîtres du Pacifique
Une huître que l’on retrouve sur nos côtes françaises et beaucoup dans nos assiettes. Pourtant, elle a aujourd’hui de graves conséquences sur la biodiversité. Le responsable? L’homme qui a introduit ce fruit de mer, originaire du Pacifique nord-ouest, en France dans les années 70. Et ce, pour pallier la disparition des huîtres creuses portugaises, décimées par les maladies, et pour combler les besoins de l’ostréiculture.
Mais dans les années 90, l’espèce a commencé à se répandre, notamment sur les côtes bretonnes et normandes. Le changement climatique accélère aujourd’hui sa prolifération: les températures de l’eau, plus chaudes, lui permettant de se développer plus rapidement. À telle point qu’on la retrouve aujourd’hui dans les fjords norvégiens.
Problème: elle modifie « les écosystèmes en transformant les habitats, ce qui a souvent de graves conséquences pour les espèces indigènes », d’après l’IPBES.
• La jacinthe d’eau
Derrière ses belles fleurs violettes, la jacinthe d’eau est l’espèce exotique envahissante terrestre la plus répandue au monde. Originaire d’Amazonie, on la retrouve désormais dans plus de 50 pays, note Franceinfo car transportée pour son intérêt horticole. Elle a de plus une capacité de reproduction extrêmement rapide.
« On considère que 10 plants mis dans des conditions favorables peuvent générer de 500 à 700 000 nouveaux plants en quelques mois », explique Folha Mouftaou, directeur de Green Keeper Africa à BBC Afrique.
Mais elle cause de nombreux dégâts: elle assèche les lacs, asphyxie les poissons, provoque des inondations. Sur le lac Victoria, le plus grand lac d’Afrique, la pêche a décliné en raison de l’épuisement des tilapias, à cause de la propagation de la jacinthe d’eau.
Toutefois, des solutions ont été trouvées pour s’en débarrasser et deviennent même bénéfiques. Grâce à sa fibre absorbante et dépolluante, la société Green Keeper Africa, au Bénin, l’utilise pour créer du textile ou encore des protections hygiéniques.
• Le moustique Tigre
C’est sans doute l’espèce invasive qui concerne le plus l’Hexagone: le moustique Tigre. Originaire d’Asie, il était présent au 1er janvier 2023 dans 71 départements, d’après le ministère de la Santé, soit sur tout le territoire, sauf la Creuse et quelques départements du nord du pays. Il aurait été introduit « probablement en Camargue, avec le transport de pneus », explique Céline Bellard, chercheuse en écologie au CNRS à France 3.
Et il se reproduit vite: « une femelle peut « pondre plusieurs centaines d’œufs à chaque ponte » souligne l’Agence nationale de sécurité sanitaire.
Ce moustique aux rayures noir et blanche est un véritable problème de santé publique car il est vecteur de maladies, comme la dengue, le chikungunya ou le zika. Il propage la maladie en prélevant le sang d’une personne malade puis en piquant une autre personne.
Le réchauffement climatique explique en partie pourquoi cet insecte asiatique arrive à proliférer en France. « Les hivers sont plus doux » et « les températures plus clémentes, plus tôt dans l’année », détaille Céline Bellard.
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