Un groupe de scientifiques milite pour que soit officiellement reconnu l’Anthropocène, une nouvelle époque géologique caractérisée par l’impact de l’humanité sur la Terre.
Ce serait le symbole d’un basculement historique. Ce mardi, des scientifiques ont désigné le lac Crawford, au Canada, pour incarner l’entrée de la planète Terre dans une nouvelle époque géologique: l’Anthropocène.
Selon ce groupe de travail, nous avons au milieu du XXe siècle quitté l’Holocène, époque commencée il y a 11.700 ans à la fin de la dernière époque glaciaire, pour entrer dans l’Anthropocène, une nouvelle phase géologique qui se distingue par l’impact profond de l’espèce humaine sur la Terre.
Microplastiques et essais nucléaires
Dans l’Anthropocène, « l’empreinte anthropique (humaine) sur l’environnement planétaire est devenue si vaste et intense qu’elle rivalise avec certaines grandes forces de la nature », définit le magazine Sciences et Avenir.
« Les données montrent un changement clair à partir du milieu du XXe siècle, amenant le système terrestre au-delà des limites normales de l’Holocène », a déclaré Andy Cundy, professeur à l’Université de Southampton et membre du groupe de travail.
De très nombreux indices attestent de ce changement: la dispersion de certaines espèces animales et végétales sur tous les continents, la perte de biodiversité, la pollution terrestre (microplastiques, pesticides…) et atmosphérique (CO2), le changement climatique, mais aussi l’impact dans la nature des bombes et essais nucléaires.
Autant de bouleversements dont les scientifiques ont retrouvé les traces au fond du lac Crawford. Les sédiments du lac, extraordinairement stables car les eaux en profondeur et en surface ne se mélangent pas, « reflètent le point de basculement dans l’histoire de la Terre, lorsque le système terrestre a cessé de se comporter comme il l’avait fait pendant 11.700 ans », a expliqué Francine McCarthy, professeure canadienne et membre du groupe de travail.
Le chemin vers l’officialisation encore long
Si la rupture semble incontestable, l’approbation officielle par les autorités géologiques mondiales que la Terre serait sortie de l’Holocène, pour entrer dans l’Anthropocène, l' »époque de l’Humain », reste très incertaine.
« Ce vote au sein du groupe de travail est une étape de routine du plus bas niveau », a commenté Stanley Finney, le secrétaire général de la puissante Commission internationale de stratigraphie (ICS) à laquelle le groupe doit encore soumettre les conclusions de ses travaux entamés en 2009.
« Ce n’est qu’à ce moment-là qu’ils pourront être soumis à un examen par les pairs et que les preuves et les arguments pourront être véritablement évalués », a ajouté le scientifique qui pilote cette commission chargée d’élaborer la frise découpant méthodiquement les 4,6 milliards d’années de l’histoire de la Terre en ères, périodes et époques géologiques.
Si la barre du vote à la majorité des deux tiers de l’ICS et auparavant d’un sous-comité était franchie, les partisans de l’Anthropocène devraient encore convaincre les gardiens de l’Union internationale des sciences géologiques (IUGS), réputés intransigeants sur les modifications de la Charte chronostratigraphique internationale.
La route est encore longue mais une étape majeure a toutefois été franchie avec le choix de ce lac canadien comme incarnation physique de l’Anthropocène, parmi une liste finale de neuf candidats, dont les sédiments d’une baie du Japon, la boue d’un cratère en Chine, les traces dans une carotte glaciaire ou celles sur des récifs coralliens.
Cliquez ici pour lire l’article depuis sa source.