Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon veut mobiliser très largement dans la rue. Avec un objectif: mettre la pression sur le gouvernement dans un contexte social tendu. Le mouvement doit à tout prix réussir sa mobilisation après des semaines de tempête politique.
La France insoumise organise ce dimanche une marche contre la vie chère à Paris après une rentrée difficile. Le mouvement de Jean-Luc Mélenchon se sait attendu au tournant, dans un contexte de contestation sociale, et doit à tout prix obtenir une démonstration de force.
« On a la pression qui monte. On ne peut pas obtenir un demi-succès après les dernières semaines », reconnaît sans ambage un élu insoumis auprès de BFMTV.com.
« La seule façon de faire plier Macron, c’est le rapport de force »
Lancée dès le mois de juillet, cette mobilisation avait été d’abord pensée pour marquer la rentrée parlementaire et envoyer un message au gouvernement en pleine hausse des prix. Mais le contexte politique a depuis changé. Pris dans la tourmente de l’affaire Quatennens, les insoumis ont multiplié les mauvaises séquences entre tweet, propos de soutien de Jean-Luc Mélenchon et conférence de presse hasardeuse.
De quoi pousser le mouvement à vouloir tourner la page de cet épisode – avec un certain succès. Malgré de fortes hésitations, notamment des communistes, toutes les composantes de la Nupes seront finalement présentes aux côtés des députés LFI.
Preuve que la gauche sent le besoin de se réunir pour battre le pavé: même les mots polémiques de Jean-Luc Mélenchon, comparant la marche à la Révolution française, qui ont déplu à Olivier Faure et à Sandrine Rousseau ne les empêcheront pas de défiler ce dimanche.
« D’une certaine façon, tout le monde à gauche sent bien que la seule façon de faire plier Emmanuel Macron, c’est d’aller au rapport de force avec le gouvernement qui ne comprend que ça », traduit la députée insoumise Alma Dufour.
« On n’aurait pas pu rêver mieux »
La Nupes est convaincue que le contexte social joue en sa faveur entre une inflation au plus haut, l’examen du projet de loi de finances dont elle dénonce l’austérité et la réforme des retraites prévue à l’hiver prochain. À ce contexte, s’est greffé le blocage de la quasi-totalité des raffineries dans lesquelles les salariés demandent des hausses de salaire. Face aux pénuries de carburants, le gouvernement a annoncé la réquisition des grévistes.
« On s’ajoute par-dessus tout ça la menace du 49.3 pour faire voter le budget et donc des accusations de passage en force. On mélange tout ça et ça peut bien mener les gens à venir battre le pavé. On n’aurait pas pu rêver mieux à peine 6 mois après la réélection d’Emmanuel Macron », se félicite un élu LFI.
De quoi inciter certains à gauche à appeler à « la grève générale » comme l’écologiste Sandrine Rousseau sur France info. Si la CGT a refusé de participer à la marche, plusieurs cadres de la Nupes espèrent bien qu’une partie de ses troupes fera le déplacement. Autant dire que La France insoumise verrait bien sa marche comme le prélude d’une vaste mobilisation sociale contre le gouvernement. Selon les informations de RMC, la centrale syndicale prépare d’ailleurs une journée de mobilisation interprofessionnelle pour la semaine suivant cette marche.
« La petite étincelle »
« Ce qu’on veut, c’est être la petite étincelle qui fasse descendre les Français dans les rues », avance le député LFI Antoine Léaument, l’un des intimes de Jean-Luc Mélenchon.
Le parti a veillé à mettre sur pied une logistique au cordeau avec un objectif: rassembler au moins autant de personnes que lors de la Marche pour la 6ème République en mars dernier – 100.000 selon les organisateurs.
81 villes seront desservies par des cars qui iront jusqu’à Paris, plus de 3,5 millions de tracts ont été distribués et plus de 450.000 affiches ont été collés, assure LFI. Reste désormais à trouver le ton juste pour cette manifestation.
Certains dans les rangs du parti évoquent la possibilité de faire débarquer tous les élus en col roulé. Ce petit clin d’œil à Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, qui expliquait qu’il troquerait désormais les cravates contre les pulls d’hiver pour économiser le chauffage à Bercy, pourrait aussi symboliser le lancement d’une nouvelle stratégie.
Des hésitations sur la stratégie
Plusieurs au sein des insoumis s’interrogent sur l’opposition très directe menée jusqu’ici à l’Assemblée nationale et souhaitent une mobilisation dans la rue plus festive que frontale.
« Je n’ai plus envie de hurler sur les bancs de l’Assemblée nationale », a même expliqué François Ruffin sur France Inter mardi dernier.
Celui qui avait organisé en 2018 « La fête à Macron » a plaidé en faveur d’une manifestation sur un modèle proche. À l’époque, dans une ambiance de carnaval, le député de la Somme avait réuni plusieurs milliers de dizaines de personnes, entre pique-nique, concerts et déguisements.
L’obsession de la crédibilité
Si les chiffres avaient varié – de 160.000 personnes à Paris d’après LFI à 38.900 d’après le cabinet Occurence -, le défilé avait été vu comme un vrai succès. Certains chars avaient fait grincer des dents dans la majorité présidentielle, à l’instar de celui avec une marionnette de Macron accrochée à une potence.
« On est sur une ligne de crête très étroite. On doit mettre un peu le bordel dans la rue, montrer qu’on sait mobiliser. En même temps, on doit rester très droit dans nos bottes et avoir une stratégie de parti qui est prêt à prendre le pouvoir en cas de dissolution », décrypte une députée insoumise.
C’est que la marche contre la vie chère a un autre objectif: en cas de forte mobilisation, elle permettrait de rappeler que Jean-Luc Mélenchon qui n’est plus député – et qui a expliqué « vouloir être remplacé » pour 2027 – est toujours légitime à porter l’union de la gauche.
Remettre Mélenchon au cœur du jeu
« Si demain il y avait une dissolution, ce serait forcément lui le chef de file de la Nupes. On ne pourrait pas perdre 6 semaines de campagne pour les législatives à désigner le potentiel futur Premier ministre », assume Antoine Léaument.
La statue du commandeur de Jean-Luc Mélenchon a certes bien pâli ces dernières semaines au sein même de son propre camp. Mais l’ex candidat à la présidentielle n’a pas dit son dernier mot et compte bien sur les manifestants pour le rappeler.
Cliquez ici pour lire l’article depuis sa source.