Touchées notamment par d’intenses sécheresses et incendies, les forêts ont absorbé très peu de dioxyde de carbone en 2023, alors qu’elles captent habituellement 20% des émissions humaines de CO2.
Des puits de carbone terrestres fortement mis à mal. Les forêts et les sols ont capté très peu de dioxyde de carbone en 2023, l’un des principaux gaz à effet de serre, alors qu’ils absorbent d’ordinaire 20% des émissions humaines de dioxyde de carbone, révèle une étude relayée par les quotidiens The Guardian et La Croix. Une situation critique qui, si elle venait à se répéter dans les prochaines années, pourrait fortement accélérer le réchauffement climatique.
Dans leurs conclusions préliminaires, les seize co-auteurs de l’étude, rattachés à des universités française, britannique, allemande et chinoise, s’alarment du fait que les puits de carbones terrestres aient vu leur absorption de CO2 « drastiquement réduites en 2023 ».
La quantité de gaz absorbée en 2022 serait en effet, selon l’étude, comprise en 1,5 milliard et 2,6 milliards de tonnes en 2023 contre environ 9,5 milliards en 2022 et 7,3 milliards chaque année au cours de la décennie passée.
Incendies et sécheresses en cause
L’expression « puits de carbone » désigne des écosystèmes qui captent et stockent plus de CO2 qu’ils n’en produisent, évitant ainsi que toutes les émissions de ce gaz, notamment les émissions humaines, ne gagnent l’atmosphère et n’accélère le réchauffement climatique. Il existe sur Terre deux types de puits de carbone: les espaces terrestres (forêts et sols, qui absorbent environ 20% du CO2 émis par les activités humaines) et les océans.
Les chercheurs expliquent que la moindre captation de CO2 par les espaces terrestres est principalement liée à deux facteurs: les incendies et les sécheresses. Ces deux types de phénomènes favorisent en effet la mort des arbres tout en empêchant que des nouveaux puissent pousser.
Des incendies historiques ont notamment ravagé les forêts Canada et la Sibérie en 2023. L’Amazonie a de son ôté été frappée par six mois de sécheresse entre juin et octobre qui ont temporairement transformé le « poumon de la Terre » en émetteur de carbone.
En Europe, les forêts ont depuis de nombreuses années tendance à absorber de moins en moins de CO2, notamment en raison des sécheresses à répétition. En Allemagne, les forêts sont même émettrices de carbone, selon un rapport publié ce mois-ci et également relayé par La Croix. Et les forêts françaises pourraient également le devenir au cours des années à venir.
Comme l’explique auprès de La Croix Philippe Ciais, coauteur de l’étude et directeur de recherche au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE) de Paris-Saclay, ce sont surtout les jeunes arbres qui absorbent le CO2 alors que les arbres morts en émettent.
La capacité d’une forêt à absorber ce CO2 est donc le résultat d’un « équilibre entre son taux de croissance et son taux de perte », résume le chercheur.
Danger sur le long terme
La baisse des capacités d’absorption des puits de carbone terrestre entraîne mécaniquement une augmentation du CO2 présents dans l’atmosphère, les émissions humaines ayant en parallèle augmenté d’1,1% en 2023 par rapport à 2022, selon un rapport du Global Carbon Project.
De fait, si la situation de l’année passée venait à se répéter voire à se pérenniser, cela pourrait entraîner une forte augmentation du CO2 dans l’atmosphère. Les efforts les plus importants de l’humanité pour limiter ses émissions ne suffiraient alors probablement pas pour ralentir le réchauffement climatique, qui se rapprocherait alors des scénarios les plus pessimistes des climatologues du Giec. Ces derniers prévoient au pire une augmentation de près de 2,5°C en 2050 et 5,5°C par rapport à la période 1850-1900, mais incluent toujours la présence de puits de carbone efficaces.
Problème: le réchauffement climatique et le dérèglement climatique qu’il entraîne intensifient les phénomènes naturelles extrêmes, notamment les incendies et les sécheresse. Le risque est donc d’assister à un cercle vicieux, le réchauffement climatique affaiblissant de plus en plus le puits de carbone terrestres. Une situation qui, selon les chercheurs, restent toutefois incertaine à ce jour.
Cliquez ici pour lire l’article depuis sa source.