Un important éboulement rocheux a frappé la Savoie dimanche, entraînant une interruption de la circulation routière et ferroviaire entre la France et l’Italie. Le dernier d’une longue série, alors que l’Hexagone a enregistré fin août un épisode caniculaire inhabituel.
Chutes de pierres en série. Plusieurs éboulements rocheux ont frappé les Alpes ces dernières semaines, le dernier en date, survenu dimanche a causé une interruption du trafic ferroviaire entre la France et l’Italie, jusqu’à mercredi au moins.
Ce phénomène, de plus en plus courant, est directement causé par la hausse des températures de ces derniers jours, en lien avec le réchauffement climatique.
Parfois une dizaine d’éboulements par jour
Dans la région de Chamonix, en Savoie, après un été assez calme, les chutes de pierres se sont multipliées en cette fin du mois d’août.
« Ces derniers jours, on a pu en observer plusieurs chaque jour, voire même plus d’une dizaine », assure auprès de BFMTV Ludovic Ravanel, directeur de recherche au CNRS, spécialiste du réchauffement climatique en montagne.
Une tendance que confirme aussi le guide de haute montagne Dorian Labaeye, auprès de BFMTV.com. Les éboulements ont d’ailleurs eu des conséquences directes sur son travail.
« La semaine dernière, j’ai renoncé à une course avec des clients au Mont Cervin par la voie italienne. Je n’étais pas à l’aise en haute altitude avec la situation de canicule extrême qu’on avait », assure-t-il. Les clients ont accepté et la marche s’est déroulée en plus basse altitude, où les éboulements sont moins nombreux.
Un mercure à 0°C jusqu’à 5000 mètres d’altitude
Ces chutes de pierres à répétition s’expliquent par les fortes chaleurs connues ces derniers jours. En effet, à très haute altitude, les températures sont habituellement négatives, ce qui n’était pas le cas ces derniers jours.
« On a constaté par exemple jusqu’à +10°C au sommet de l’Aiguille du Midi (à 3800 m d’altitude NDLR) », indique à BFMTV Nicolas Zickler, commandant du Peloton de Gendarmerie de Haute Montagne de Jausiers, dans les Alpes-de-Haute-Provence.
Autre indicateur particulièrement marquant, Nicolas Zickler assure que « l’isotherme 0°C, c’est-à-dire l’altitude à laquelle on observe la température de 0°C » a été relevé à « 5000 mètres » la semaine passée, soit bien au-dessus des altitudes habituelles.
Des écroulements en augmentation
Concrètement, en haute montagne, les sols sont habituellement situés au-dessous de 0°C tout au long de l’année. Cette couche de gel s’appelle le permafrost et joue un rôle essentiel en altitude pour maintenir les rochers. Mais avec la hausse des températures, le permafrost fond, entraînant avec lui des pans entiers de roche.
Ces chutes de pierres deviennent de plus en plus fréquentes. Depuis les années 1970, elles ont été multipliées par dix, selon une étude menée sur une partie du massif du Mont Blanc.
Les conséquences de ces éboulements ne sont pas anodines. Samedi dernier, un alpiniste de 25 ans a ainsi perdu la vie en tentant l’ascension du Mont Blanc par le couloir du Goûter. Un autre, âgé de 55 ans, a connu le même sort début août dans la même région.
Face au phénomène, la préfecture de Haute-Savoie a décidé de publier le 21 août un communiqué dans lequel elle note que « le risque de chutes de pierres sur la Voie normale du Mont-Blanc est élevé », et ce, « compte tenu des températures qui ne cessent de s’élever ».
En conséquence, le préfet appelle les alpinistes « à la plus grande prudence » et invite les adeptes de la haute montagne à « reporter » leur ascension.
Des événements difficiles à prévoir
Il est, de fait, difficile de prévoir les chutes de pierres en montagne. Contrairement aux avalanches, il n’est pas possible de les anticiper et de les provoquer, à moins d’installer des « capteurs sur toutes les faces », ce qui est « impossible », selon Dorian Labaeye.
« La seule chose qu’on sait, c’est que le niveau d’incertitude augmente », assure-t-il.
Le risque d’éboulement rocheux varie en effet selon la température, mais aussi en fonction d’autres critères, comme le caractère plutôt compact ou fracturé de la roche.
Il relève cependant quelques « signaux faibles » permettant parfois de détecter une prochaine chute de pierres. « De l’eau qui sort des fissures ou quand il y a des bruits de gargouilles, des zones qui se mettent à vibrer », énumère-t-il.
Malgré la baisse des températures en ce début de semaine, la prudence reste de mise. « L’inertie (thermique), c’est-à-dire la chaleur, dans la roche dure plusieurs semaines. (…) On va encore être vigilants », assure le guide de haute montagne.
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