Le gouvernement a annoncé son intention de rendre le retrait de permis systématique en cas de test positif aux stupéfiants. Une mesure qui s’applique déjà dans l’écrasante majorité des cas. Explications.
« Dans un accident mortel sur cinq, le conducteur est positif aux stupéfiants », a rappelé Élisabeth Borne le 17 juillet à l’issue du comité interministériel de la sécurité routière. Face à ce « fléau », la Première ministre a donc annoncé une série de mesures visant à diminuer le nombre de morts sur la route chaque année, qui atteignait 3267 en 2022.
Outre la création du délit d »« homicide routier », elle a affirmé vouloir « rendre obligatoire » la suspension du permis « en cas de conduite sous l’emprise de stupéfiants« . Cette suspension obligatoire sera effectuée par le préfet du département et ira « de six mois à un an », a précisé le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
« Nous devons être intraitable avec les consommateurs de drogue et sanctionner plus sévèrement les conduites addictives au volant », a prévenu Élisabeth Borne.
Mais cette mesure n’a rien de complètement nouveau. « Cette suspension existait déjà », a rappelé Anne Lavaud, déléguée générale de l’Association prévention routière sur l’antenne de BFMTV. En effet, le préfet peut déjà, aujourd’hui, retirer le permis des conducteurs concernés.
Un « effet d’annonce »
« Lorsque les forces de l’ordre constatent une infraction qui peut être sanctionnée par une suspension administrative du permis de conduire, elles transmettent une copie du procès-verbal au préfet (ou sous-préfet) », indique le site du service public.
« Le préfet peut mettre en œuvre la procédure de suspension après rétention du permis de conduire » à la suite de certaines infractions parmi lesquelles figurent la conduite sous l’emprise de l’alcool, de stupéfiants, le « refus de se soumettre aux vérifications concernant l’état d’alcoolémie ou l’usage de stupéfiants » ou encore un excès de vitesse supérieur à 40km/h.
C’est donc le caractère systématique de la mesure qui est censé changer la donne ici.
« Aujourd’hui le préfet pouvait suspendre, demain il devra », résume le ministre de l’Intérieur.
Une « nuance » toutefois difficilement perceptible pour Rémy Josseaume, avocat en droit routier, qui parle d’un « effet d’annonce » plus qu’une véritable annonce sur ce sujet.
« Dans l’écrasante majorité des infractions liées à l’alcool, aux stupéfiants, au refus d’obtempérer, au délit de fuite, le préfet suspend le permis de conduire », a-t-il justifié sur le plateau de BFMTV. « Cela ne va fondamentalement rien changer. »
Des cas très rares
Les cas où le préfet ne procède pas à la suspension de permis de conduire dans le cas d’un contrôle positif aux stupéfiants sont très rares.
« On parle de 0,5% des dossiers qui effectivement échappent à la suspension préfectorale », indique l’avocat spécialisé.
Si le préfet ne suspend pas le permis, « c’est parce qu’il n’a pas pu le faire dans les délais que la loi lui impose de respecter », poursuit-il, lorsque les analyses toxicologiques n’ont pas été transmises en temps voulu notamment. Robert Montury, membre de l’association de familles de victimes d’accidents de la route Marilou, évoque aussi des cas où les « forces de l’ordre ont mal fait la rétention de permis ». « C’est un tout petit pourcentage », confirme-t-il.
Enfin, le militant rappelle le caractère temporaire de la décision du préfet. « Cette suspension administrative ne tient que jusqu’à la décision du tribunal, explique-t-il. Une fois que le tribunal s’est prononcé c’est la décision de suspension judiciaire qui prime et on oublie la suspension administrative. »
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