Au milieu de la fournaise, des oasis pour les plus riches: la ville en 2050

Alors que la loi contre la déforestation devait être appliquée fin 2024, le Parlement européen a approuvé, ce jeudi 14 novembre, son report d’un an et demandé un assouplissement pour certains pays.

Un recul dans la lutte contre la déforestation. Le Parlement européen a approuvé ce jeudi 14 novembre le report d’un an de la loi contre la déforestation, mais aussi un nouvel assouplissement du texte par une alliance des voix de la droite et de l’extrême droite, que redoutaient les autres groupes.

Cette décision intervient en réponse aux préoccupations exprimées par certains États membres de l’Union européenne qui craignent de ne pas être en mesure de se conformer pleinement à la loi si elle entrait en vigueur fin 2024.

La nouvelle réglementation européenne est censée interdire la commercialisation en Europe de produits (cacao, café, soja, huile de palme, bois…) provenant de terres déboisées après décembre 2020.

L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que 420 millions d’hectares de forêts – soit une superficie supérieure à celle de l’UE – ont été détruits à cause de la déforestation entre 1990 et 2020. La consommation européenne représente environ 10% de la déforestation mondiale, selon le Parlement européen.

Une alliance de la droite et l’extrême droite

Sous la pression du Brésil, des États-Unis et même de l’Allemagne, la Commission européenne avait proposé, au départ, de reporter d’une année l’entrée en vigueur de la loi, du 30 décembre 2024 au 30 décembre 2025.

Si ce décalage a reçu l’aval des États membres puis du Parlement, le Parti Populaire Européen (PPE), première force parlementaire, a poussé pour aller plus loin. La droite a fait voter des amendements créant une nouvelle catégorie de pays considérés comme « sans risque », qui seraient exemptés de certaines obligations de ce règlement, par exemple l’Allemagne.

Le PPE affirme défendre « les entreprises européennes » pour qu’elles « ne soient pas injustement pénalisées par des charges administratives excessives », selon l’eurodéputée française Céline Imart (LR).

Bien que la mesure ait très peu de chance de rester dans le texte final, elle pourrait retarder la mise en œuvre de la loi.

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À gauche et chez une partie des centristes, l’initiative du PPE est vue comme une tentative de « vider le texte de sa substance » et couper l’élan environnemental de la précédente législature, marquée par le Pacte vert.

En outre, ce vote marque une alliance de fait entre la droite et l’extrême droite. Depuis la rentrée, elle s’était déjà produite sur des textes symboliques concernant le Venezuela ou le budget, mais pas sur le fond d’une loi européenne.

Un « signal dévastateur »

Cette fois, la « majorité alternative » que craignaient les autres forces politiques s’est bien formée pour retoucher un règlement environnemental. Ce vote va à rebours de l’alliance du mois de juillet quand PPE, sociaux-démocrates et centristes soutenaient de concert la reconduction d’Ursula von der Leyen à la tête de la Commission européenne.

« Le signal est dévastateur pour l’engagement de l’Europe en faveur de la protection du climat et de la biodiversité », s’était déjà indignée l’écologiste allemande Anna Cavazzini.

Finalisée fin 2022 et promulguée en 2023, la nouvelle réglementation contre la déforestation suscite globalement une levée de boucliers des milieux d’affaires de l’agrobusiness et de nombreux États africains, asiatiques et sud-américains, inquiets des coûts supplémentaires engendrés pour les agriculteurs, éleveurs et exploitants forestiers.

Les entreprises importatrices, responsables de leur chaîne d’approvisionnement, devront prouver la traçabilité via des données de géolocalisation fournies par les agriculteurs, associées à des photos satellitaires.

Pour les conservateurs du PPE, ce texte est un « monstre bureaucratique ». La droite reprend son positionnement anti-normes affiché lors de la colère agricole début 2024.

Une législation essentielle

Cette nouvelle législation est pourtant jugée essentielle par les organisations environnementales qui espèrent une première mondiale susceptible d’entraîner d’autres régions du monde. Les ONG avaient déjà fustigé le report d’un an de l’entrée en vigueur du texte, un « coup de tronçonneuse » selon elles.

Le vote de ce jeudi « rouvre le débat de manière délétère, alors que cette législation est assez ambitieuse et innovante », estime Blaise Desbordes, directeur général de l’association de commerce équitable Max Havelaar.

Ce débat prend un relief particulier au moment où l’UE semble déterminée, malgré l’opposition de la France, à signer d’ici la fin de l’année un accord de libre-échange avec les pays latino-américains du Mercosur, susceptible de démultiplier les importations agricoles.

Le dossier sur la loi contre la déforestation sera renvoyé en commission pour des négociations inter-institutionnelles. Pour que les nouveaux changements apportés entrent en vigueur, le texte convenu devra être approuvé par le Conseil et le Parlement et publié au Journal officiel de l’UE.

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