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Maxime Rekik est mort le 12 septembre dernier dans sa cellule. Les conditions de son décès soulèvent la question d’un éventuel manquement de la part de l’administration pénitentiaire. Une enquête est en cours.

Le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a ordonné l’ouverture d’une enquête au sein de la maison d’arrêt de Rennes-Vezin après la mort d’un détenu, a appris BFMTV.com ce mardi auprès de la Chancellerie, confirmant une information du Télégramme.

« La lettre de mission a été signée vers le 20 septembre. L’enquête doit durer quatre mois », nous indique-t-on. Les auditions menées par l’Inspection générale de la justice débutent ce vendredi à la prison de Rennes. Le but: déterminer si des dysfonctionnements au sein de l’établissement ont pu jouer un rôle dans le décès de Maxime Rekik, incarcéré depuis le mois de février.

« L’affaire est très grave et le fait que le ministre ait ordonné une enquête n’est pas neutre », commente l’avocat de la victime, Me Philippe Ohayon.

À la suite de ce drame, le conseil a déposé plainte pour « homicide involontaire », estimant « que le stade le plus haut dans la non-assistance à personne en danger a été atteint ».

Sept heures d’agonie

Tout débute le 11 septembre à 20h40. Maxime Rekik, en détention provisoire pour trafic de stupéfiants, est pris d’un malaise. Yanis*, son codétenu, le signale aux surveillants par l’interphone.

« Il est tombé, de la mousse blanche sort de sa bouche avec un peu de sang », leur explique-t-il, selon la retranscription de son récit, à laquelle BFMTV.com a eu accès.

Malgré les alertes nombreuses et inquiétantes, aucun soin ne lui est prodigué. « Le gradé m’a dit qu’il ne pouvait pas appeler le Samu pour ça, parce qu’il respirait. Je lui ai dit: ‘Il faut attendre qu’il ne respire plus pour l’emmener à l’hôpital?’ Il m’a répondu oui », toujours selon les dires de Yanis.

Vers 23h00, une nouvelle fois sollicité par Yanis, un surveillant indique qu’une équipe va intervenir. Mais la promesse n’est, une nouvelle fois, pas suivie d’effets. Le décès de Maxime Rekik est constaté à 04h10 par le Samu. D’après les premiers résultats d’autopsie, le jeune homme est mort asphyxié à la suite de vomissements. Des examens complémentaires sont toutefois en cours pour déterminer de manière certaine les causes du décès.

« Pendant sept heures, personne n’a appelé les secours alors que les surveillants avaient pourtant constaté que Maxime Rekik était dans un état qui nécessitait des soins en urgence », souligne Me Ohayon dans sa plainte déposée au parquet de Rennes.

« Négligence hallucinante »

Une situation qui révolte l’avocat qui avait signalé à plusieurs reprises à la maison d’arrêt et au magistrat instructeur « l’état psychologique et psychiatrique catastrophique » de son client. Ainsi, dans un courrier du 19 août adressé au juge d’instruction, Me Ohayon écrivait: « Je me permets de vous alerter sur la fragilité psychologique apparente de l’intéressé, qui semble présenter des troubles psychiatriques (nombreux toc, difficulté à se concentrer, grande nervosité, clignement constant des yeux…) ».

Selon nos informations, le 9 septembre, Maxime Rekik avait lui-même exprimé son mal-être déclenché, dit-il, par la mise en examen de ses parents, au mois de juillet dernier, pour blanchiment de trafic de stupéfiants. Dénonçant un « acharnement » à l’encontre de sa famille, il détaillait: « Je n’ai plus envie de vivre. J’ai même demandé à me faire interner. J’ai perdu tout estime de moi ». Il demandait également à être transféré vers un autre établissement.

« On est face à une négligence grave et hallucinante de la part de l’institution judiciaire », réagit Me Antonin Péchard, l’avocat de Yanis.

Lui, a déposé plainte dans cette même affaire pour « actes de torture et de barbarie ». « Yanis a été contraint d’assister à l’agonie de son codétenu dans une cellule de 9 mètres carrés. Cet événement l’a profondément affecté, Maxime Rekik était son ami. Depuis, mon client est sous traitement médical et ne dort plus », souligne Me Péchard, précisant que Yanis reste incarcéré dans la cellule où le drame s’est déroulé.

Dysfonctionnements?

Ce n’est pas la première fois que la prise en charge médicale des détenus de la maison d’arrêt de Rennes-Vezin est décriée. En 2017, le contrôleur général des lieux de privation de liberté avait rendu un rapport dans lequel il concluait que « le manque de personnel de surveillance impacte sensiblement l’organisation et l’accès aux soins (…) Plusieurs personnes détenues se sont plaintes auprès des contrôleurs de l’absence de prise en compte de leurs appels la nuit (…) Il arrive que les pompiers soient appelés, la nuit, par les personnes détenues avec un téléphone portable ».

Cette fois-ci, c’est donc à la demande du ministre de la Justice que le fonctionnement de cet établissement pénitentiaire va être examiné. Au terme de son enquête, l’Inspection générale de la justice rendra un rapport. Si celui-ci fait état de fautes, de responsabilités de la part du personnel pénitentiaire, une procédure disciplinaire pourra être ouverte, débouchant sur des sanctions. Des responsabilités pénales pourront également être retenues à l’issue de l’enquête conduite par le parquet de Rennes.

* Le prénom a été modifié.

Ambre Lepoivre Journaliste BFMTV

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