Le Haut conseil pour le climat, désormais présidé par l’agronome Jean-François Soussana, estime que la France a besoin d’un « changement d’échelle dans l’adaptation » face aux sécheresses, canicules ou encore aux orages et s’inquiète des retards législatifs accrus par la dissolution décidée par Emmanuel Macron.
Dans son rapport annuel de plus de 230 pages publié ce jeudi 20 juin, le Haut conseil pour le climat (HCC) a pointé que la France a besoin d’un « changement d’échelle dans l’adaptation » au changement climatique alors que les efforts sont « en décalage par rapport aux vulnérabilités et aux besoins. »
L’organisme indépendant salue les progrès de la France dans la réduction des émissions de CO2 mais juge « urgent » de finaliser une série de textes structurants pour la politique énergétique et climatique, exprimant sa « vive préoccupation » au sujet des délais accumulés pour le plan d’adaptation, la feuille de route énergétique (PPE) ou encore la stratégie nationale bas carbone (SNBC).
L’année passée s’est classée au deuxième rang des années les plus chaudes en France. Le pays a connu ces dernières années un manque d’eau localement à cause de la sécheresse, des feux géants dévastateurs, des canicules, orages intenses et inondations.
« Vive préoccupation »
Le gouvernement de Gabriel Attal était justement en train de préparer le troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3), fondé sur l’hypothèse d’un réchauffement de 4°C en France d’ici la fin du siècle (contre 1,7°C à ce jour). Mais le processus de mise en consultation a traîné et celle-ci est désormais suspendue à la majorité et au gouvernement qui émergeront des élections législatives des 30 juin et 7 juillet.
Le HCC, parmi 65 recommandations, demande de « finaliser rapidement et adopter » ce texte, comme d’autres qui structurent l’action du gouvernement en matière climatique, la stratégie nationale bas carbone (SNBC) ou la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). C’est « urgent afin de donner à chaque acteur la visibilité nécessaire pour agir en cohérence dans la durée », explique Corinne Le Quéré.
Pour l’exécutif, attaché à sa planification écologique, le contenu des feuilles de route en matière d’énergie et de neutralité carbone est « déjà sur la table » à défaut d’avoir encore été formalisé juridiquement. Quant au plan d’adaptation, il est « bien prêt », fait-on valoir.
La première mandature de l’organisme indépendant, chargé d’évaluer l’action publique en matière de climat depuis 2018 durant le premier mandat d’Emmanuel Macron, s’achève le 24 juin. Une nouvelle mandature a été annoncée jeudi avec le renouvellement de quelques membres. « Il n’y a aucune ambiguïté sur le fait que le HCC joue un rôle essentiel et on souhaite le pérenniser », souligne l’exécutif.
« Le rythme de décarbonation de la France, avec une baisse des émissions brutes de gaz à effet de serre qui s’est accélérée en 2023, se rapproche pour la première fois du rythme attendu pour atteindre ses objectifs climatiques 2030 », salue le HCC. La France prévoit une baisse de 50% des émissions brutes à cet horizon (par rapport à 1990), déclinaison de l’ambition européenne « Fit for 55 ».
« Recul »
Les émissions brutes ont en effet reculé de 5,8% l’an dernier, ce qui s’explique pour au moins un tiers par des facteurs conjoncturels comme le redémarrage de réacteurs nucléaires. Jusqu’aux deux tiers de cette baisse peuvent à l’inverse être considérés comme le fait des politiques publiques, selon le rapport.
Il salue des « avancées importantes mais inégales » selon les secteurs dans les politiques, avec quelques reculs, notamment pour l’agriculture. Ce secteur « souffre d’un manque de cohérence entre les politiques agricoles, alimentaires, environnementales et climatiques », regrette Corinne Le Quéré.
« Les politiques agricoles ont été marquées ces 12 derniers mois par un recul de l’action publique climatique », déplore le rapport, allusion notamment aux réponses aux mouvements de colère agricole du début d’année.
Les experts pointent aussi l’absence de « stratégie d’ampleur ou plan de régénération des écosystèmes forestiers », alors que la capacité des sols et des arbres à absorber du CO2 est fragilisée depuis des années. À un horizon un peu plus lointain, le Haut conseil réclame « un cap clair pour la décennie 2030-2040, pour se doter de la capacité d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 ».
Cliquez ici pour lire l’article depuis sa source.