Caterham perpétue la tradition de la petite sportive minimaliste rétro, avec son modèle Super Seven 600. Un hymne à la simplicité et aux sensations automobiles… Et une leçon pour l’ensemble de l’industrie? Essai.
Même si la voiture thermique est encore loin d’être morte, il est un segment de marché qui est en train tout bonnement de disparaître des catalogues des constructeurs en Europe, celui des petites sportives thermiques et abordables.
Ford Fiesta ST, Renault Clio et Mégane RS, malus assommants sur les Toyota GR86 et Honda Civic Type R, les jours des « GTI » sont comptés, faute de vraie solution d’électrification qui ne bride ni le comportement, ni les sensations, ni les performances. La seule petite sportive du marché exempt de malus était jusque-là la Suzuki Swift Sport, et encore, elle ne doit son niveau limite d’émission qu’à un recours à la micro-hybridation. D’ailleurs en cours d’année prochaine, à cause d’une plus grande sévérité en la matière, elle perdra ce régime de faveur, avec un malus d’une centaine d’euros.
Restera-t-il donc une possibilité à terme de rouler encore en petite sportive thermique sans pour autant émettre trop de CO2? Pour cela il faut bien chercher. Et le nom de Caterham revient immanquablement. Le petit artisan anglais, qui fête cette année ses 50 ans, poursuit avec acharnement la fabrication d’un modèle mythique datant de 1957, la Lotus Seven.
La clé de la légèreté
Cette voiture, considérée comme une des meilleures sportives de tous les temps, a été conçue par l’ingénieur automobile britannique légendaire, Colin Chapman. Ses deux idées de base, offrir la possibilité aux automobilistes modestes de goûter aux vrais plaisirs de la sportivité, la légèreté et la simplicité de l’auto en étant la clé. Ce dernier principe étant érigé pour lui en véritable devise: « Light is Right ».
Après quatre générations de Seven, Lotus arrête la production pour se consacrer à de nouveaux modèles. Mais son principal distributeur en Angleterre, Caterham Cars, qui assure déjà une partie de son assemblage, hérite des brevets, des machines, et de l’autorisation de Lotus pour continuer la fabrication du modèle. La Caterham Super Seven prend donc le relais… jusqu’à aujourd’hui. Ce modèle unique est devenu une véritable petite gamme, avec des versions plus ou moins dépouillées, plus ou moins sportives, des modèles de compétition. Mais Caterham a toujours tenu à avoir à son catalogue un modèle de base, simple et efficace comme le voulait son créateur Colin Chapman, et qui hérite de son identité de petit roadster anglais typique à l’ancienne.
Le point fort: un petit bijou rétro
C’est pourquoi la 600 de 2023 ne diffère que très peu de la Lotus Seven d’origine. Même taille minuscule (3,1 mètres de longueur, 1,57 mètre de largeur et 1 mètre de hauteur), qui permet de passer sous les barrières de péage et de parking, même châssis, même carrosserie, même charme britannique avec ses phares ronds chromés, son long capot fuselé, ses longs garde-boue et sa roue de secours arrière. Une silhouette reconnaissable entre mille, qui provoque sympathie, sourires, demandes de photos et pouces levés partout où l’on passe. Une vraie « voiture-bonheur ».
L’aventure commence sans même démarrer le moteur. En essayant de monter à l’intérieur. Surtout quand la capote (particulièrement pénible à fixer, n’étant évidemment pas électrique) est mise. Jambe droite en premier, translation pour passer la tête, remonter la jambe gauche, et enfin s’encastrer dans le siège conducteur en glissant ses jambes vers l’avant. Un vrai exercice de gymnastique garant de sérieux fous rires.
Mais une fois bien installé et véritablement cocooné par cet habitacle de Gentleman Driver, on découvre un intérieur certes dépouillé (quelques cadrans à aiguilles et boutons-poussoirs) mais d’un niveau de finition étonnamment bon, avec une planche de bord claire, un volant Motolita minuscule (d’un charme ancien parfaitement en rapport avec la voiture), tout comme le levier de vitesse en boule chromée.
Expérience de conduite unique
Une fois le contact mis, vous devrez presser le bouton Start. La Caterham 600 s’ébroue joyeusement dans une drôle de sonorité. Si la marque a employé tout un tas de moteurs différents pour équiper ses modèles (principalement Ford et Rover), ils ont toujours été moteur atmosphérique et à 4 cylindres.
Là, la 600 change la donne et opte pour un tout petit moteur de citadine, un Suzuki 660cm3 turbo. D’où une mélodie assez inhabituelle relayée par l’échappement de côté implanté le long de la voiture à gauche (attention de ne pas vous brûler après un long trajet en le touchant par mégarde).
Certains fidèles de la marque pourront regretter le choix de ce moteur qui sort un peu du concept d’origine. Au contraire il permet d’encore alléger la Super Seven, qui ne pèse que 440 kilos, soit la moitié de la masse d’une Mazda MX-5, cabriolet célébrissime pourtant connu pour sa légèreté. Et avec de telles spécifications, autant dire que la puissance du moteur, qui peut paraître légère pour une sportive (84 chevaux), n’a aucun mal à faire avancer, et avec brio, cette minuscule et légère voiture. Et surtout, avec seulement 109 grammes de CO2 par kilomètre, la Caterham 600 est neutre en malus écologique.
L’aventure se poursuit et s’intensifie sur la route, avec une auto qui finalement ne s’avère pas si inconfortable que cela, auto avec laquelle vous faites totalement corps, tous les sens en éveil. Beaucoup de bruit, de cliquetis, un moteur joyeux qui sonne (toutes proportions gardées) comme un 6 cylindres à plat de chez Porsche, le turbo souffle fort et respire avec un drôle de bruit de sifflet à roulette. La direction reste dure car non-assistée, une boîte de vitesses qui nécessite beaucoup de poigne, et un pédalier qui ne tolère pas les grands pieds au risque de se mélanger les pinceaux.
Le plein de sensations fortes
Mais quelle sensation incomparable d’être assis contre l’essieu arrière, au ras du sol avec votre main qui touche le bitume, et ce sentiment d’une voiture qui obéit au doigt et à l’œil à vos injonctions, avec un train avant très équilibré, une tenue de route impeccable et une motricité parfaite.
Et la 600 pousse finalement fort, les sensations étant décuplées par la taille minuscule de la voiture, sa légèreté et sa nervosité. Les accélérations peuvent paraître modestes sur le papier, mais croyez bien que 7 secondes du 0 à 100km/h en Caterham paraissent moitié moins en vérité, surtout capote et portes rangées, avec un moteur qui grogne joyeusement et monte très vite dans les tours. Et même rouler tranquillement en mode promenade est une expérience qui vous change du tout au tout du quotidien. Une cure de jouvence automobile, qui rappelle les bienfaits de la légèreté et de la simplicité. Et c’est peut-être d’ailleurs une leçon pour l’ensemble de l’industrie automobile, qui ne cesse de produire des véhicules de plus en plus lourds et consommateurs d’énergie, qui vous éloignent de la route, et de l’essence même de l’idée de déplacement automobile efficace.
Le point noir: vraiment très spartiate
Alors oui l’expérience est brutale. La Super Seven 600 est bourrée de défauts qui rebuteront les habitués de l’automobile du quotidien. Deux places seulement, très étriquées, un équipement rudimentaire, un confort très relatif, une praticité nulle, une ergonomie baroque, un « coffre » qui ne contiendra qu’un sac à dos (et même presque rien si vous voyagez capote et portes rangées dedans), une vigilance de tous les instants nécessaire (beaucoup d’automobilistes ne vous verront pas dans leur rétro), une autonomie limitée (consommation de 8 litres aux 100 kilomètres pour un réservoir de 25 litres) et l’impression d’être parfois livré en pâture aux éléments déchaînés (la semaine d’essai de votre serviteur a eu lieu en pleine tempête Denise).
Mais à quel prix?
Cette expérience rustique et musclée se trouve aussi facturée à prix d’or: 44.643 euros, mais sans malus donc. Mais au final, « l’effet Caterham » est vraiment étonnant. Grisant sur le moment, et riche d’enseignements quand on reprend sa voiture du quotidien. On sent beaucoup mieux les commandes, la route, on se réjouit d’un peu plus de confort, mais avec le souvenir d’avoir été auparavant au volant d’une voiture qui vous aura finalement tout réappris.
Avec sa 600, Caterham nous replonge avec délice dans les sensations automobiles d’autrefois, avec tout le charme que ça implique, mais aussi toute la pertinence de la recherche de la simplicité. Au cœur d’une industrie automobile qui va être, dans les années à venir, en chasse permanente au poids et à l’encombrement pour limiter son impact environnemental, Caterham livre une réflexion marquante sur la légèreté et l’efficacité. Une auto inoubliable à tout point de vue. Et on attend avec d’autant plus d’impatience la version électrique (en cours de développement).
Notre modèle à l’essai: Caterham Super Seven 600 au tarif de 44.643 euros
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