LES BONNES MANIÈRES EN VACANCES (4/6) – Comme à l’été 2022, c’est avec un manque de bras considérable que les restaurateurs affrontent la saison. Alors que les terrasses sont déjà noires de monde, serveurs et responsables d’établissements listent les comportements des clients qui les exaspèrent le plus en période estivale.
La saison estivale étant déjà bien entamée, une vague de clients affamés et impatients a déjà commencé à déferler sur les terrasses des bords des plages et des centres-villes. « En juillet-août, c’est une tout autre clientèle que le reste de l’année », commente Romain Cataldo, directeur du restaurant Le Grand Large à Cassis (Bouches-du-Rhône), interrogé par BFMTV.com. « Ça grouille de partout, c’est un peu l’abattage. »
D’autant que les professionnels du secteur de l’hôtellerie-restauration savent que cette année encore, ils vont devoir affronter l’arrivée massive de vacanciers malgré un manque cruel de main-d’œuvre: 200.000 emplois saisonniers étaient encore vacants au début de la saison.
Clients impatients et exigeants, qui débarquent en maillot de bain ou claquent des doigts pour appeler le serveur… Des serveurs et des gérants de restaurants du littoral atlantique, de la Côte-d’Azur ou de la côte basque ont listé pour BFMTV.com les comportements de touristes les plus désagréables auxquels ils sont régulièrement confrontés en période de forte affluence.
1. S’installer en terrasse sans avoir été placé
En vacances, les restaurants peuvent vite devenir votre nouvelle cantine, surtout si vous avez opté pour un logement à l’hôtel. Pour autant, ce n’est pas une raison pour s’installer en terrasse de soi-même, sans avoir été placé au préalable par un serveur.
« C’est un classique », commente Loïc Gloire, serveur dans un restaurant des Sables-d’Olonne (Vendée). « Les gens s’assoient d’eux-mêmes où ils veulent, sans nous consulter. »
Le professionnel explique qu’en général, les serveurs préfèrent placer les clients à leur convenance, tout simplement parce qu’ils ont en tête le plan du restaurant: les zones de passage les plus encombrées, les tables réservées, celles pas encore débarrassées. « Le pire, c’est que les clients s’assoient le plus souvent sur les tables non débarrassées, ou typiquement côte à côte sur une table de quatre alors qu’il y a des tables de deux libres », déplore encore Loïc Gloire.
2. Exiger d’avoir la meilleure table
« Le choix de la table, ça peut sembler risible, mais c’est une question très sensible », abonde Romain Cataldo, directeur du restaurant Le Grand Large à Cassis (Bouches-du-Rhône). « Ça suscite parfois des réactions très violentes, et c’est une des plaintes qu’on reçoit le plus souvent. Quand on dit non à des clients, c’est déjà arrivé que certains se mettent à hurler ou quittent précipitamment le restaurant. »
« On ne va pas nier qu’il y a des tables mieux que d’autres, ça dépend de la configuration du restaurant », reconnaît le gérant de cet établissement spécialisé dans les fruits de mer, qui dispose d’une vue sur la plage. « Mais quand quelqu’un réserve une table précise avant vous, c’est le jeu. »
Si l’heure est à la détente l’été, se présenter en maillot de bain au restaurant n’est jamais vraiment une bonne idée, même si la plage n’est pas bien loin. De nombreux restaurateurs refusent d’ailleurs les clients qui n’ont pas « une tenue correcte ». Dans l’établissement de Romain Cataldo à Cassis par exemple, les maillots de bain sont strictement interdits, et même « les claquettes, débardeurs » sont considérés comme limites.
« Pour moi c’est du bon sens », explique le restaurateur. « Votre voisin de table est peut-être en train de déguster un homard, il n’a pas forcément envie d’avoir une vue sur le torse nu de votre mari alors qu’il est en train de manger. »
4. Claquer des doigts ou siffler pour interpeller les serveurs
Les restaurateurs regrettent aussi le manque de tact et de savoir-vivre de certains clients à la moindre frustration. « C’est sûr que certains ne sont pas très regardants sur la politesse », note Aymen Ayachi, directeur du restaurant La Petite Plage à Biarritz. « À partir du moment où ils paient, ils estiment que c’est tout ce qui nous intéresse. »
Claquements de doigts, sifflements, doigt en l’air… Loïc Gloire s’agace de toutes « les impolitesses visuelles » auxquelles il s’est « malheureusement habitué ». « Sans parler de ceux qui ne disent pas bonjour ou au revoir, ou encore les réflexions désobligeantes si on oublie un couvert ou la carafe », souligne le serveur, résigné.
Aux heures d’affluence, Aymen Ayachi aimerait que les clients fassent preuve d’un peu plus de bienveillance et de compréhension à l’égard du personnel et de la rapidité du service.
« Je pense que des personnes manquent un peu d’empathie ou oublient qu’on est humains », déplore le professionnel. « Parfois ils voient que nous sommes pleins à craquer et que c’est la course, mais ils font comme s’ils ne le voyaient pas et insistent ou râlent parce qu’on ne leur apporte pas immédiatement ce qu’ils veulent. »
Contrairement à ce qu’on peut penser, la bonne humeur n’est pas forcément au rendez-vous pour tout le monde pendant les vacances. « Parfois, certaines familles s’installent à leur table dans un état d’esprit… assez spécial. C’est à peine s’ils se parlent entre eux, on a l’impression que personne n’a envie d’être là », raconte Aymen Ayachi.
« Il fait chaud, il y a du monde, certains viennent de faire 500 bornes en voiture. Papa en a marre, maman est au bord de la crise de nerfs », décrit-il avec humour.
Lui et ses confrères sont d’accord pour dire qu’ils rencontrent régulièrement des clients agressifs ou conflictuels, qui cherchent la petite bête pour s’en prendre au personnel. Dans ces cas-là, le restaurateur affirme que le personnel doit redoubler d’énergie pour instaurer une atmosphère bon enfant.
« À chaque fois qu’on est face à des comportements problématiques, c’est à nous de composer avec les différents profils, et d’essayer d’inverser la tendance. Le but, c’est que les gens repartent avec le sourire… Mais ça n’est pas toujours facile », plaisante le gérant.
6. Faire appel au serveur toutes les deux minutes
Certains estivants espèrent un service impeccable de bout en bout, avec du personnel à leur disposition au moindre de leurs désirs. « Les gens qui monopolisent toute notre attention, c’est assez pénible », confie Loïc Gloire. « Au lieu de demander tout ce dont ils ont besoin en une seule fois, ils lèvent la main une fois pour la moutarde. Cinq minutes plus tard, ils n’ont plus d’eau. Puis plus de pain. »
Il faut dire qu’avec la hausse du coût de la vie, le restaurant est devenu un luxe que tout à chacun ne peut plus forcément s’accorder. Les restaurateurs ont par conséquent pu remarquer que certains clients étaient devenus hyperexigeants.
7. Mettre une heure à choisir sa commande
« Les commandes qui ne viennent pas, on n’est pas fan », confie aussi Loïc Gloire, pointant du doigt les vacanciers les plus indécis sur le choix de leurs plats ou leurs boissons.
« On passe une fois, deux fois, parfois même trois et les gens n’ont pas choisi… Ou certains changent même d’avis à plusieurs reprises pendant la commande… Rien de tel pour nous embrouiller », note le serveur.
8. Passer le repas au téléphone
De temps à autre, les restaurateurs font face à des clients qui une fois à table, passent l’entièreté de leur repas au téléphone. « Ils parlent extrêmement fort, ils racontent leur vie », relate Romain Cataldo depuis Cassis. « On n’entend qu’eux. On en a même parfois qui commentent les lieux ou ce qu’il y a dans leur assiette. Ça met mal à l’aise. »
« Il arrive même qu’ils osent demander à ce qu’on repasse pour prendre la commande, ou pire: qu’ils commandent pendant qu’ils sont au téléphone », ajoute-t-il. « Ça en général quand ça arrive, je dis quelque chose. Je leur dis que je ne veux pas les déranger et que je peux repasser plus tard. »
« En plus généralement, on entend l’écho de l’interlocuteur qui est au bout du fil, ce n’est pas très plaisant, ni pour nous ni pour les tables voisines », poursuit le patron.
9. Réserver pour ne finalement pas venir
Le « no show », c’est-à-dire les clients qui réservent par téléphone pour finalement ne pas se présenter le jour J, sont le véritable fléau des restaurateurs, surtout en période de forte affluence. « L’été, ça nous arrive au moins une ou deux fois par jour », témoigne Romain Cataldo, qui refuse encore de mettre en place un système d’empreinte bancaire comme certains de ses confrères.
Avec l’expérience, le professionnel a réalisé que les vacanciers réservaient parfois une table dans plusieurs restaurants à la fois pour se laisser le choix à la dernière minute, et qu’ils n’annulaient pas ceux qu’ils ne choisissaient pas, considérant que ce n’est « pas grave ».
Mais tout cela a un coût. Un vendredi soir récent, le directeur d’établissement a par exemple perdu trois tables de la sorte: une de 8 personnes, une de quatre et une de deux, soit 14 couverts sur 90.
« Si on compte, ça fait 15% de pertes sèches sur une soirée », regrette-t-il. « Et le pire, c’est qu’on refuse des gens alors qu’il y a des tables vides, et que ça fait mauvais effet. »
Cette année, les restaurateurs peuvent toutefois se réjouir d’une chose: le budget des Français pour les vacances d’été est en forte hausse, selon une enquête de l’institut CSA. Le budget moyen prévu par les personnes interrogées est en augmentation de 23% par rapport à celui de l’année dernière, le montant moyen passant de 1614 à 1986 euros.
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