Christophe Béchu justifie la position de Paris qui s’est abstenu ce jeudi sur l’interdiction pour les dix prochaines années de cet herbicide très controversé. Emmanuel Macron avait assuré en 2022 avoir commis une « erreur » en pensant la France capable de sortir de l’usage de ce désherbant sans les autres pays européens.
Le gouvernement tente de se justifier. La France s’est abstenue ce jeudi sur le vote autour de l’autorisation de commercialisation du glyphosate, un herbicide très controversé au sein de l’Union européenne. Une posture lourde de symboles au sein de l’UE alors que la France en est la première puissance agricole.
« J’aurais préféré que notre position prenne la forme d’un vote contre plutôt qu’une abstention. La position d’autoriser tous les usages pendant 10 ans est une dinguerie », s’est agacé Christophe Béchu, le ministre en charge de la Transition écologique ce vendredi sur France inter.
La France n’est « pas parvenue à trouver suffisamment d’alliés »
Ce proche d’Édouard Philippe assure avoir « personnellement réuni un certain nombre de pays qui n’avaient pas soutenu la position de la commission européenne de réautoriser le glyphosate » et n’être « pas parvenu à trouver suffisamment d’alliés ».
Les pays membres de l’Union européenne se sont réunis en fin de semaine pour décider de l’avenir de cet herbicide très utilisé dans le monde entier. Le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) l’avait classé comme « cancérogène probable » en 2015.
Un premier vote en octobre n’avait pas réussi à dégager une position commune des États de l’UE sur l’interdiction ou le renouvellement de l’autorisation du glyphosate pour les dix prochaines années, à l’initiative de la Commission européenne.
« Une abstention, ça vaut un vote contre »
Un second vote a donc été organisé jeudi. Pour valider ou rejeter une proposition de la Commission, la majorité requise est qualifiée. Il faut les votes d’au moins 15 États membres représentant 65% de la population de l’UE, soit 447 millions d’habitants.
Ni les votes contre ni les votes pour n’ont atteint la majorité qualifiée. Une telle situation permet alors à la commission européenne de reprendre la main. Elle a donc décidé de prolonger l’autorisation du glyphosate jusqu’en 2033. La France tout comme l’Allemagne, qui comptent parmi les populations les plus nombreuses en France, se sont abstenus.
« Une abstention, ça vaut un vote contre », assure Christophe Béchu, le ministre en charge de la Transition écologique ce vendredi sur France inter.
« Christophe Béchu a raison d’un point de vue comptable. Une abstention équivaut plus ou moins à un vote contre mais il a tort politiquement », décrypte un ancien conseiller au ministère de l’Agriculture, joint par BFMTV.com.
Une abstention qui entraîne d’autres pays
« Paris qui vote contre l’interdiction du glyphosate, ça aurait sérieusement mis dans l’embarras la Commission qui aurait probablement dû imposer au moins des restrictions sur l’usage du glyphosate auprès des particuliers », analyse encore ce bon connaisseur du dossier.
L’abstention de la France et de l’Allemagne – deux pays particulièrement puissants sur la scène européenne – ont entraîné dans leur sillage la Belgique Bulgarie, l’Italie, Malte, et les Pays-Bas qui ont adopté la même position, selon des sources diplomatiques.
Manifestement soucieux de faire redescendre la pression sur ce vote qui agace en France, notamment dans les rangs écologistes, Christophe Béchu a promis qu’il n’aurait aucune influence sur l’Hexagone.
« Ce vote ne va rien changer pour nous. La France va continuer à interdire des usages du glyphosate et à restreindre son utilisation », a assuré le ministre de la Transition écologique.
« Macron ne voulait pas pénaliser les agriculteurs Français »
À voir. Emmanuel Macron avait promis à son arrivée à l’Élysée d’interdire le glyphosate « dans les trois ans » et avait à plusieurs reprises expliqué vouloir porter ce sujet au niveau européen.
En janvier 2022, le chef de l’État avait reconnu « ne pas avoir réussi » sur le glyphosate. Il avait évoqué avoir commis « l’erreur » en début de quinquennat d’avoir cru la France capable de sortir de ce désherbant sans les autres pays européens.
« Macron ne voulait pas pénaliser les agriculteurs français. Soit on sort tous du glyphosate dans l’UE, on restreint son usage, soit personne n’en sort et on fait de petites restrictions dans certains pays. Un vote contre aurait eu une portée symbolique puissante », précise encore un ex conseiller du ministre de l’Agriculture.
Béchu évoque les « conséquences sur la biodiversité » du glyphosate
En 2020, l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) avait annoncé des restrictions progressives pour son usage dans l’agriculture. Son utilisation pour les particuliers est déjà prohibée dans l’Hexagone depuis 2019.
Christophe Béchu a assuré chercher des alternatives « crédibles » à cet herbicide dont « les conséquences sur la biodiversité et les milieux aquatiques sont certains et documentés ».
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