Écologistes, insoumis et socialistes ont prévu de boycotter le match de l’équipe de France de football de l’Assemblée nationale en raison de la participation, pour la première fois, de députés du RN.
Pas de Kanté, Pogba, Benzema, Lloris ou Kimpembe: pour ses derniers matchs en Ligue des nations, Kylian Mbappé et ses coéquipiers ont dû composer avec l’absence de 15 internationaux. Une hécatombe.
L’équipe de France de football de l’Assemblée nationale connaît pareille situation. Ce mercredi, elle dispute un match caritatif contre l’Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP) au profit de l’association « e-Enfance », qui lutte contre le cyber harcèlement. Problème: plusieurs joueurs qui devaient initialement disputer la rencontre seront finalement absents de la feuille de match.
Rien à voir avec d’éventuelles blessures: insoumis, socialistes et écologistes ont annoncé leur retrait ce mardi, en raison de l’intégration de députés du Rassemblement national (RN) dans l’équipe.
· Qu’est-ce que « l’équipe de France de football de l’Assemblée nationale »?
L’équipe de France de football de l’Assemblée nationale a été créée en 2014 dans l’objectif de montrer un autre visage de la politique à travers des matchs caritatifs. Son premier entraîneur n’était autre que Guy Roux, illustre coach de l’AJ Auxerre pendant plus de 40 ans.
L’équipe, à défaut d’être paritaire, est mixte. Entre 2014 et 2022, des parlementaires tels qu’Éric Coquerel, François Ruffin (LFI), Barbara Pompili, Olivier Véran, Éric Woerth (Renaissance), Aurélien Pradié ou Pierre-Henri Dumont (LR) ont fait partie de cette équipe. Cette année pusieurs députés du Rassemblement national ont rejoint l’effectif. Parmi eux, Philippe Ballard, Julien Odoul, Alexandre Sabatou ou encore Emmanuel Blairy.
· Pourquoi plusieurs parlementaires refusent-ils de participer au match?
Ces intégrations n’ont pas plu aux insoumis, socialistes et écologistes. Dans un communiqué, LFI dénonce une « récupération politique » de l’évènement et accuse les députés RN de vouloir affirmer leur « prétendue normalisation ».
« Amateurs de foot mais plus enclins à tacler l’extrême droite qu’à lui faire des passes, les députés insoumis font donc le choix de ne pas l’aider à marquer des points avec ce premier match », peut-on lire dans le communiqué.
Même écho chez les socialistes où l’on dénonce à travers un communiqué la « banalisation de l’extrême droite ».
« On croit qu’il n’y a pas de possibilité d’être coéquipier avec des gens que nous combattons dans l’hémicycle », explique sur BFMTV Boris Vallaud, chef de file des socialistes à l’Assemblée nationale.
Du côté de Renaissance, le nouveau parti présidentiel, Aurore Bergé a invité les siens à ne pas participer au match. Elle s’est adressée aux députés de son groupe dans un message que BFMTV a pu consulter. « Je ne peux que recommander de ne pas participer à un match qui donnera lieu à une ‘photo d’équipe’ où on reprendra donc la formule que nous ‘portons le même maillot. Ce n’est pas le cas », écrit la cheffe de file de Renaissance à l’Assemblée nationale.
« Nous ne jouons pas dans la même équipe. Ni extrême droite, ni extrême gauche », conclut-elle
· Comment les parlementaires qui maintiennent leur participation se justifient-ils?
Visiblement, Karl Olive, député Renaissance des Yvelines, ne suivra pas ces recommandations. « Dans une ancienne vie, j’étais journaliste sportif. Des matchs de l’équipe de France j’en ai commenté, à l’époque où il y avait des joueurs du Paris Saint-Germain et de l’Olympique de Marseille », rappelle celui qui sera l’un des capitaines de l’équipe de football de l’Assemblée.
« [Ils] se déchiraient sur le terrain en championnat mais ne se trompaient pas de combat lorsqu’il s’agissait de jouer sous les couleurs de l’équipe de France », poursuit-il.
« Moi je voulais vraiment jouer ce match avec mes collègues, quels qu’ils soient », a regretté sur BFMTV, Emmanuel Blairy, député Rassemblement national du Pas-de-Calais. Selon lui, ces derniers « refusent la démocratie ».
Marine Le Pen, patronne du RN au Palais Bourbon, a fustigé sur RTL un « concours de ridicule », dénonçant la « la haine, tout le temps, partout ». Selon elle, le sport est un « endroit où on ne fait pas de politique ».
Au sein du parti Les Républicains (LR), Pierre-Henri Dumont a dénoncé dans un tweet une stratégie consistant à « créer le buzz pour faire oublier des déboires internes ».
« L’essentiel est oublié: nous allons, grâce à nos sponsors, remettre un chèque de 35.000€ à l’association », a également indiqué le député du Pas-de-Calais qui est avec Karl Olive, l’un des capitaines de l’équipe.
Guy Roux s’est de son côté dit « consterné » sur BFMTV après les annonces de non-participation. L’ancien entraîneur de l’équipe de football de l’Assemblée s’est souvenu que lorsqu’il coachait l’équipe, on « ne distinguait pas » les joueurs. Guy Roux s’est rappelé un « jeune dynamique d’Amiens, siégeant avec les insoumis au palais Bourbon: François Ruffin.
« Il vendait son livre aux gens de la droite et de la présidence dans le vestiaire », s’est-il amusé.
Autre anecdote: Un « député de gauche du Nord », qu’il faisait « jouer à droite ». « ça faisait rire tout le monde ».
· Qu’en est-il des autres sports?
Le football n’est pas le seul sport dans lequel l’Assemblée dispose d’une équipe. Le rugby dispose ainsi de son XV Parlementaire, qui dispute chaque année un tournoi des VI Nations parlementaires qui le voit affronter des députés anglais, écossais, irlandais, gallois et italiens.
Et s’il est vrai que les députés RN n’avaient encore jamais intégré le onze de l’Assemblée, il n’en est pas de même de l’équipe de rugby. Sur RTL, Marine Le Pen a ainsi rappelé qu’Alexis Corbière (LFI) et Louis Aliot (RN) avaient fait équipe au sein du XV Parlementaire lors de la précédente législature.
« L’Assemblée nationale est un lieu de confrontation d’idées mais à travers ce XV parlementaire, c’est l’occasion une fois de plus, de rencontrer d’autres députés de les voir autrement, de s’apercevoir que malgré les désaccords, il y a une passion commune », confiait ainsi en 2019 le député insoumis dans un reportage de France 3.
« Cette socialisation, c’est ça qui fait le charme de ce XV Parlementaire », affirmait-il.
Mais pour certains, les situations ne sont pas comparables. Louis Aliot, était « tout seul », estime Lamia El Aaraje sur BFMTV, précisant qu' »aujourd’hui, on est sur quelque chose de plus important, de plus massif » avec « un mouvement de progression de l’extrême droite en Europe qui est extrêmement inquiétant » et l’entrée récemment de 89 députés RN à l’Assemblée nationale.
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