Tabac, alcool, hérédité... Les idées reçues sur le cancer persistent

Le baromètre cancer 2021 de l’Institut national du cancer et de Santé publique France montre que certaines idées reçues sur le cancer perdurent. Tour d’horizon de ces croyances erronées.

La perception de certains modes de vie augmentant les risques de cancer s’améliore, mais certaines idées reçues persistent. Le baromètre cancer 2021 publié ce lundi par l’Institut national du cancer (INCa) et Santé publique France (SPF) le montre bien. Cette étude réalisée tous les cinq ans depuis 2005 tire ses enseignements d’une enquête téléphonique menée auprès de 4938 personnes âgées de 15 à 85 ans sur plusieurs mois en 2021. Elle permet de constater que certaines croyances sur le cancer sont assez répandues dans la population malgré le manque de fondement scientifique pour les étayer. En voici un panorama non-exhaustif.

• Le risque de cancer existe à partir de 9,2 cigarettes par jour

Les fumeurs interrogés pour le baromètre estiment que le risque de cancer lié au tabac existe à partir de 9,2 cigarettes par jour en moyenne. Dans le détail, 30,2% des fumeurs identifient un risque à partir d’une cigarette par jour, 25,3 % entre 2 et 9 cigarettes par jour et 18,9 % entre 10 et 19 cigarettes par jour.

Plus d’un fumeur sur cinq (21,2%) pense que le seuil de dangerosité se situe au-delà de 20 cigarettes par jour. 4,4 % ne se prononcent pas.

« Le tabagisme est dangereux dès la première cigarette », affirme toutefois le directeur de l’Institut national du cancer (INCa), Thierry Breton. « Il faut ne pas commencer à fumer du tout et arrêter dès que possible ».

• Le nombre de cigarettes quotidiennes est plus dangereux que la durée du tabagisme

4 fumeurs interrogés sur 10 pensent que la durée du tabagisme influence davantage l’apparition de cancer que la quantité quotidienne de tabac fumée, près de 6 fumeurs sur 10 pensent qu’il s’agit plutôt du nombre de cigarettes fumées par jour. Selon l’INCa et SPF, « l’exposition prolongée dans le temps aux substances cancérigènes de la fumée du tabac est nettement plus dangereuse: quand la durée du tabagisme double, le risque de cancer est multiplié par vingt ».

« Doubler la consommation quotidienne multiplie quant à elle par deux le risque de cancer », ajoute l’enquête.

• Faire du sport permet de nettoyer les poumons

Interrogées sur l’affirmation « faire du sport permet de se nettoyer les poumons du tabac », 54,8 % soit plus de la moitié des personnes interrogées (fumeuses ou non) se disent tout à fait d’accord ou plutôt d’accord ».

Pourtant, comme le souligne Thierry Breton auprès de BFMTV.com, cette idée ne repose sur « aucun fondement scientifique ». « Aucun mécanisme, sauf arrêter le tabac, ne permet de compenser » le tabagisme. « Plus on arrête tôt, plus on peut retrouver une capacité pulmonaire normale », ajoute-t-il.

• Les principaux dangers de l’alcool sont la violence et les accidents de la route

Sur le plan de l’alcool aussi, les idées reçues sont nombreuses. L’opinion « le principal risque avec l’alcool, ce sont les accidents de la route et la violence » est la plus partagée parmi les personnes interrogées dans le cadre du baromètre: en moyenne, plus de 8 personnes sur 10 se disent d’accord avec cette perception.

Pour Thierry Breton, ce chiffre montre que « le risque de l’alcool pour la santé est moins bien identifié ». En effet, seuls 50,2% des 15-85 ans estiment que boire un verre d’alcool par jour augmente le risque de développer un cancer.

Pourtant, une étude publiée par Santé publique France en 2015 estimait que 41.000 décès étaient attribuables à l’alcool en France métropolitaine cette année, dont 16.000 décès par cancers (les autres venaient notamment de maladies cardiovasculaires et de maladies digestives). Cette étude attribuait 5400 décès à l’alcool en lien avec une « cause externe (accident ou suicide) ».

« On s’attendrait donc à ce que le risque pour la santé soit au même niveau que le risque de violence et d’accident de la route », commente Thierry Breton.

• Les alcools forts contribuent particulièrement au risque de cancer

Autre idée erronée sur l’alcool: le fait que « ce sont surtout les alcools forts qui augmentent le risque de cancer », une opinion partagée par 38,6 % des personnes interrogées par l’INCa et SPF.

« Peu importe le type d’alcool, c’est la dose d’alcool qui compte », explique Thierry Breton.

Un verre standard contient environ 10 grammes d’alcool pur, et ce quel que soit le type de boisson (vin, bière, ou alcool fort). En revanche, contrairement à la cigarette, une consommation d’alcool qui reste en dessous des repères édictés par les pouvoirs publics (pas plus de deux verres par jour, pas tous les jours) ne présente pas de surrisque par rapport à quelqu’un qui n’en consomme pas du tout.

• Boire un peu de vin diminue le risque de cancer

Plus d’une personne sur cinq (23,5%) pense que « globalement, boire un peu de vin diminue le risque de cancer plutôt que de ne pas en boire du tout ». Si une consommation modérée ne présente pas de surrisque, rien ne prouve que l’alcool a un quelconque pouvoir protecteur, selon le directeur de l’INCa. « La consommation de vin, même petite, ne protège pas du cancer », affirme Thierry Breton.

« Il s’agit d’une croyance ancienne, dans un pays, la France, où la culture du vin est très marquée, explique-t-il.

• Faire des UV avant les vacances prépare la peau au soleil

Le baromètre cancer 2021 s’intéresse aussi à la perception des rayons ultraviolets (UV) naturels et artificiels. 95,7% des personnes interrogées identifient que l’exposition au soleil présente un risque de cancer et 89,5 % déclarent qu’avoir recours aux cabines UV est une cause de cancer. Pour autant, certaines croyances erronées persistent. 23,9% des personnes interrogées sont d’accord avec l’affirmation suivante: « faire des UV avant les vacances permet de préparer sa peau pour se protéger du soleil ».

« Que ce soit en cabine ou au soleil, l’exposition aux UV n’est pas protectrice », contredit Thierry Breton.

« Être bronzé n’est pas une protection », ajoute le directeur de l’INCa, qui constate une « méconnaissance sur les risques liés aux UV et les gestes de protection ».

En 2018, l’Anses alertait aussi sur les risques liés aux UV artificiels. « Les cabines de bronzage émettent des rayonnements à forte intensité, équivalant à l’exposition à un soleil tropical » qui « se cumulent à celles reçues naturellement », expliquait sur son site l’agence nationale de sécurité sanitaire. Ces doses « provoquent des dommages de l’ADN et augmentent le risque de cancers cutanés », ajoutait-elle.

Le bronzage provoqué par l’exposition aux UV artificiels « suit un mécanisme différent de celui du bronzage naturel et n’assure aucune protection contre les effets délétères des UV », selon l’Anses.

• Le cancer est souvent héréditaire

« En 2021, 67,7 % des Français pensent que le cancer est héréditaire contre 61,8 % en 2015 et 52,4 % en 2010 », selon le baromètre cancer de l’INCa et de SPF. Il s’agit d’une « confusion », selon les deux organismes, puisque ce n’est pas le cancer qui est héréditaire, mais certains gènes y prédisposant. « Il peut y avoir une fragilité dans les gènes, mais il ne s’agit pas d’une transmission de cancer et elle n’est pas automatique », explique à BFMTV.com Thierry Breton.

Cette croyance n’aide pas à la prévention. « Cela induit une forme de fatalisme, on peut se dire ‘à quoi bon faire quelque chose si c’est héréditaire’. Cela joue contre l’idée qu’on est acteur de sa santé. Or, 40% des cancers sont évitables », plaide-t-il.

Pour le directeur de l’INCa, « il faut combattre l’ensemble de ces idées reçues une à une ». Il pointe notamment le rôle des professionnels de santé dans cette démarche: « les médecins sont efficaces quand ils expliquent les facteurs de risques aux patients, ils sont crus ».

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