Ne cherchez pas les balles jaunes porte d’Auteuil ce week-end. A partir de ce jeudi 29 septembre et jusqu’au 2 octobre, le site de Roland-Garros troque sa terre battue pour 800 tonnes de sable à l’occasion du Beach Pro Tour, une nouvelle compétition internationale de neuf étapes de beach-volley. Lieu incontournable du circuit mondial de tennis, à cheval entre mai et juin, le complexe parisien accueille de plus en plus d’événements sportifs, culturels et à destination des entreprises.
Cette stratégie de développement de l’activité événementielle, nommée « Stade à l’année », a été enclenchée en 2018 par la Fédération française de tennis (FFT), propriétaire des lieux : « On est parti du constat que c’était dommage d’avoir un tel joyau qui a coûté 400 millions d’euros (montant des travaux de l’installation du toit sur le Philippe-Chatrier) et qui ne servait que trois semaines dans l’année », explique Stéphane Morel, directeur du pôle marketing et développement économique de la FFT.
Pour Michael Tapiro, directeur de Sport Management School, une école dédiée aux métiers du sport business, l’installation de ce toit « a complètement changé la donne pour la fédération. Le site est devenu une alternative à d’autres enceintes fermées pour accueillir des animations. » L’année dernière, Roland-Garros a ainsi hébergé la 40e édition de la Fête de la Musique, une soirée de boxe avec en point d’orgue le combat de Tony Yoka contre le Croate Petar Milas, et plus récemment, en juillet, un nouveau tournoi de padel, un « événement qui a vocation à durer dans le temps », précise-t-on à la FFT. Deux semaines après l’étape de beach-volley, le site accueillera un match de Betclic Elite, le 16 octobre, entre le Paris Basket et Monaco.
Le retour historique de la boxe à Roland-Garros
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— Roland-Garros (@rolandgarros) September 10, 2021
David Donnelly, cofondateur de RNK, l’agence délégataire de l’organisation logistique et événementielle du Beach Pro Tour, parle du tournoi de ce week-end comme une « expérience pour le public et les joueurs »: « Le cadre est génial. Les athlètes du monde entier, qui ont joué sur des lieux aussi mythiques que la plage de Copa Cabana ont des sourires jusqu’aux oreilles quand ils s’entraînent sur le Central. »
Par le passé, le complexe de Roland-Garros avait reçu de nombreuses rencontres de basket, dont la finale du championnat de France en 1947, et trois combats de boxe au XXe siècle. Mais la tendance à l’ouverture à d’autres événements s’est accélérée ces dernièrs années et devrait continuer à s’accentuer selon Michael Tapiro : « Il va y avoir de plus en plus de situations où ces arenas vont voir deux univers qui se superposent : le sportif et l’entertainement. Dans le futur, il ne faudrait pas s’étonner à ce qu’il y ait des expositions ou des meetings politiques organisés à Roland-Garros ou à La Défense Arena. Prenez Paris-Bercy (aujourd’hui Accor Arena). A sa création, il y a 40 ans, le lieu avait été pensé pour être la première enceinte sportive fermée. Aujourd’hui la répartition entre entertainment et sport s’équivaut. »
Si des discussions sont en cours pour que le site de Roland-Garros soit le théâtre de nouveaux événements ces prochaines années (« Pourquoi pas imaginer un défilé de mode à Roland ? », lance Stéphane Morel), le directeur du pôle marketing de la FFT se veut clair : « Nous n’avons pas vocation à devenir un Arena comme Bercy. Le toit du Chatrier est plus une capote qu’un lieu clos. Il y a une vraie incidence du chauffage et de la météo, ce qui rend difficile l’organisation d’événements en hiver. Nous n’avons pas non plus les moyens techniques en termes de sonorisation pour accueillir régulièrement des concerts. Le but premier du toit est de permettre au tournoi du Grand-Chelem d’être maintenu quelles que soient les conditions », précise Stéphane Morel.
Et pour cause, si les nouvelles activités du Chatrier rapportent de l’argent à la fédération, le tournoi du Grand Chelem, très lucratif, n’a « pas d’équivalent » en termes de manne financière, indique-t-on à la FTT. « Environ 90% du budget vient de Roland », estime Michael Tapiro, pour qui cette diversification des événements est plus une question de notoriété que de finances : « L’accueil de grands événements est un élément de communication qui permet d’avoir une plus grande résonance médiatique. La fédération était relativement silencieuse en dehors de la période de Roland-Garros. Maintenant, elle peut exister régulièrement dans l’année. »
Les grandes soirées sportives et culturelles sur le Chatrier restent ponctuelles et la FFT dispose d’autres leviers pour utiliser son site de douze hectares. Dans le Jardin des Serres d’Auteuil, rénové en 2019, le sous-concessionnaire Paris Society organise ainsi près d’une centaine de séminaires chaque année en dehors du tournoi du Grand Chelem.
Coworking, journées d’études dans les salons du Chatrier, visites guidées et rencontres avec des légendes du tennis français, les activités à destination des entreprises se multiplient. « Les gens sont souvent ébahis de pouvoir fouler les plus grands terrains de sport », explique Michael Tapiro. « Quand une entreprise permet à ses collaborateurs ou à ses clients d’échanger avec un joueur professionnel, c’est du ‘Money can’t buy’ en jargon marketing : c’est l’instant qui fait l’événement. » Depuis quelques mois, ces visites sont ouvertes aux particuliers et « connaissent un vif succès », souligne Stéphane Morel.
OÙ ET QUAND EN 2024 ?
En 2024, les épreuves de tennis se tiendront dans le temple du tennis français : le Stade Roland-Garros RDV du 27 juillet au 4 août pour voir les meilleurs joueurs et joueuses du monde s’affronter pour le titre olympique !
(2/5) pic.twitter.com/wYAngh4Q1q— Paris 2024 (@Paris2024) August 8, 2022
Outre les aspects financiers et de notoriété, les questions environnementales pèsent également dans cette nouvelle stratégie de diversification des activités. « Avoir un site de douze hectares complètement libre et inutilisé dix mois dans l’année, ce n’est plus possible dans les mentalités. Aujourd’hui plus que jamais, on veut éviter les éléphants blancs, comme les sites olympiques d’Athènes, qui n’ont jamais été réutilisés depuis les Jeux de 2004. » Un impératif RSE (responsabilité sociétale des entreprises) bien intégré par les instances sportives. Pour Paris 2024, le complexe de Roland-Garros accueillera les tournois de tennis, de boxe et le volley assis.
« Utiliser des infrastructures existantes, assurer une présence médiatique à l’année, désacraliser le lieu et faire rentrer de l’argent : en proposant différentes activités, la quadrature du cercle est presque refermée pour la FFT », conclut Michael Tapiro.
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