Pour nourrir un astronaute dans l’espace, il faut compter près de 23.000 euros par jour. Un coût trop élevé si l’on entend poursuivre l’exploration spatiale et lancer des missions toujours plus longues et toujours plus lointaines.
À 400km de la Terre, les astronautes de la Station spatiale internationale (ISS) se nourrissent parfois d’aliments frais lors des approvisionnements. Mais la plupart du temps, aliments réhydratables ou thermostabilisés sont au centre des menus. Et pourtant, nourrir un astronaute dans l’ISS revient à près de… 23.000 euros par jour.
Pour réduire ce coût exorbitant, les agences spatiales du monde entier cherchent de nouvelles solutions. L’une d’entre elles consiste à embarquer dans l’espace des levures, qui peuvent être ensuite utilisées pour produire des aliments par fermentation directement sur place.
Pour cela, l’Agence spatiale européenne (ESA) a lancé ce mardi 22 avril un projet pour évaluer la faisabilité de ces aliments cultivés en laboratoire, notamment dans des conditions de faible gravité, rapporte la BBC.
Un laboratoire miniature contenant de telles levures a été lancé en orbite terrestre. Cette expérimentation permettra donc de découvrir si elles pourront produire de la nourriture dans l’espace. Il s’agit d’une première étape avant le développement d’une petite usine pilote de production alimentaire sur la Station spatiale internationale dans deux ans.
« Nous rêvons d’un avenir où l’humanité s’envolera vers les étendues obscures de l’espace. Mais transporter suffisamment de nourriture pour nous nourrir pendant le voyage et à destination serait inimaginable en termes de coût et de poids », affirme Rodrigo Ledesma-Amaro, scientifique de l’Imperial College de Londres qui travaille sur ce projet.
Un rayonnement solaire plus élevé dans l’espace
« Pour les missions sur la Lune ou peut-être plus tard vers Mars, ça peut devenir une source d’économie et une source d’autonomie », commente auprès de BFMTV Olivier Sanguy, responsable de l’actualité spatiale à la Cité de l’Espace de Toulouse.
Depuis des années, les agences spatiales travaillent à produire des aliments directement sur place, à l’instar du potager développé directement dans l’ISS. Ici, la nouvelle expérimentation se concentre sur des aliments cultivés en laboratoire. Si cela existe déjà dans une certaine mesure sur Terre, avec par exemple de nouvelles viandes de synthèse produites dans certains pays, il s’agit de savoir si cela peut être reproduit en apesanteur et sous un rayonnement plus élevé dans l’espace.
La culture d’aliments en laboratoire implique la culture d’ingrédients alimentaires, tels que des protéines, des graisses et des glucides, dans des tubes à essai et des cuves, puis leur transformation pour leur donner l’apparence et le goût d’aliments normaux. les astronautes pourraient alors produire des steaks, de la purée de pommes de terre ou des desserts directement depuis l’espace.
Bientôt des steaks sortis d’une imprimante 3D?
Sur Terre, cette technologie présente des avantages environnementaux par rapport aux méthodes traditionnelles de production agricole, comme une utilisation réduite des terres et une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Mais dans l’espace, le principal objectif est la réduction des coûts.
La Nasa américaine, d’autres agences spatiales et même des entreprises privées veulent envoyer des humaines sur la Lune de manière durable, et même peut-être plus loin, jusqu’à Mars.
De telles missions impliqueraient d’envoyer de la nourriture pour des dizaines d’astronautes, « un service dont le coût serait prohibitif si l’envoi était effectué par fusée », explique à la BBC Aqeel Shamsul, fondateur de Frontier Space qui développe le projet avec des chercheurs de l’Imperial College de Londres.
« À plus long terme, nous pourrions mettre les ingrédients cultivés en laboratoire dans une imprimante 3D et imprimer ce que nous voulons sur la station spatiale, comme un steak! », ajoute-t-il.
Bienfaits sur la santé
Au-delà du coût, l’autre motivation derrière ce projet « est psychologique sur le moral des équipages parce qu’on sait qu’ils fabriquent eux-mêmes leur nourriture ça crée le lien social de la cuisine », souligne Marie-Ange Sanguy, rédactrice en cheffe du magazine Espace et Exploration.
En outre, à cause de l’apesanteur, les astronautes qui restent dans l’ISS perdent de la masse osseuse et de la masse musculaire. « Donc on fait beaucoup de sport pour garder la masse musculaire mais il faut quand même prévoir une diversification de la nourriture », poursuit Marie-Ange Sanguy.
Produire de la nourriture dans l’espace pourrait permettre de compenser certaines de ses carences plutôt que de prendre notamment des compléments alimentaires. À terme, l’autonomie alimentaire pourrait permettre à des stations habitées de se rendre vers Mars, puisque il faut compter environ 200 jours juste pour le voyage aller.
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