Qu'est-ce que la démence fronto-temporale, la maladie dont souffre Bruce Willis?

Les proches de l’acteur américain ont annoncé qu’il souffrait de démence fronto-temporale, une maladie neurodégénérative et incurable.

Après que l’acteur et producteur américain âgé de 67 ans a mis fin à sa carrière en mars 2022, la famille de Bruce Willis a annoncé jeudi qu’il est atteint de démence fronto-temporale. Mais de quoi s’agit-il?

Les dégénérescences fronto-temporales (DFT), aussi appelées démences fronto-temporales ou maladie de Pick, sont des maladies rares neurodégénératives, indique l’institut du cerveau (ICM), un important centre de recherche situé à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris.

Les DFT sont parfois associées à la maladie d’Alzheimer bien que dans cette dernière, c’est la mémoire qui soit affectée, rappelle l’association France-DFT. Dans le cas des DFT, ce sont les comportements sociaux ainsi que le langage qui sont touchés.

« Le début de la maladie est insidiueux »

Car il existe plusieurs formes de la maladie, explique à BFMTV.com Isabelle le Ber, neurologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière et chercheuse à l’ICM au sein de l’équipe bases moléculaires, physiopathologie et traitement des maladies neurodégénératives. « Il y a des formes comportementales, qui sont les plus courantes, et une autre langagière. On parle alors d’aphasie primaire progressive. »

Le patient peut ainsi présenter des difficultés à prononcer les mots, souffrir d’une perte de vocabulaire, de problèmes de compréhension ou de difficultés à identifier les objets ou les personnes. Comme cela a été le cas pour Bruce Willis: l’année dernière, les proches de la star avaient annoncé qu’il souffrait d’une aphasie qui affectait ses capacités cognitives.

Parmi les premiers signes: apathie, changement dans la personnalité, indifférence aux émotions et aux autres. « Dans les premières phases de la DFT, les troubles du comportement sont discrets et peuvent évoquer des effets de la fatigue, du stress », met en garde l’ICM sur une page consacré aux symptômes et au diagnostic.

Des symptômes plus visibles

À l’origine de la maladie: un dysfonctionnement des régions frontales et temporales du cerveau. Des régions qui sont impliquées dans le comportement social, mais aussi la prise d’initiative ou le contrôle des émotions. « Dans ces pathologies, les zones cérébrales concernées se réduisent (atrophie) en conséquence d’une mort des neurones », écrit l’ICM, qui mène différentes recherches sur la maladie.

« Le début de la maladie est insidiueux », abonde Isabelle le Ber. « Quand l’ensemble des symptômes évocateurs ne sont pas réunis, il peut y avoir une confusion avec un diagnostic de dépression ou de maladie d’Alzheimer. »

Puis d’autres symptômes, plus visibles cette fois, apparaissent: troubles du comportement, grande désinhibition ou incapacité à respecter des codes sociaux – avec par exemple des réflexions inappropriées. « Il peut s’agir aussi d’une grande agitation voire de l’agressivité, de fugues ou du développement d’obsessions », détaille l’ICM.

« La maladie progresse »

Les patients peuvent aussi agir de manière étrange, notamment en répétant continuellement les mêmes gestes, en faisant une fixation sur certaines habitudes ou certains objets ou encore devenir des collectionneurs compulsifs. Certains patients ont par ailleurs un besoin irrépressible de bouger et marchent plusieurs kilomètres sans but spécifique.

Des modifications du comportement alimentaire sont également observées chez de nombreux malades: certains mangent de façon excessive et précipitée, d’autres ont des phases de boulimie ou d’anorexie. Il arrive aussi que les patients se négligent du point de vue de l’hygiène.

« Quelle que soit la forme, la maladie progresse vers un tableau clinique similaire », ajoute Isabelle le Ber. « Les lésions entraînent des symptômes qui sont les mêmes. Ce qui les distingue, c’est la localisation cérébrale de ces symptômes. » Et quand la maladie progresse, les patients peuvent souffrir de confusion, leur jugement est altéré et ils se trouvent dans l’impossibilité de réaliser des choses simples.

Un diagnostic difficile

Ce sont souvent les proches qui suspectent la maladie en repérant des modifications dans le comportement, un changement dans la personnalité ou des difficultés d’expression. Mais le diagnostic est difficile à poser.

La neurologue Isabelle le Ber reconnaît que les patients se trouvent parfois dans une errance diagnostique, notamment dans les cas de formes atypiques. « Mais en général, le diagnostic est fait dans les deux ou trois années après l’apparition des symptômes, même si les familles rapportent des choses plus subtiles et moins spécifiques plusieurs années auparavant. »

Quant à la vitesse d’évolution de la maladie vers une démense sévère, elle varie selon les cas. Mais l’état du patient se dégrade au fil du temps.

« En général, la durée d’évolution de la maladie est d’une dizaine d’années, même s’il y a des formes plus rapides ou plus lentes », précise la neurologue. Si la maladie n’est pas mortelle, les complications en revanche le sont. « Quand le patient devient grabataire, il peut présenter des troubles de déglutition ou faire une embolie. »

Une maladie incurable

La maladie est incurable. Certains traitements peuvent néanmoins atténuer les troubles du comportement, comme des antidépresseurs ou des anxiolytiques qui permettent de diminuer l’agitation avec un effet sur la régulation de l’appétit ou l’irritabilité. Les patients sont également souvent suivis en orthophonie voire en hôpital de jour pour leur proposer une rééducation adaptée.

« Il y a un espoir avec la recherche qui travaille sur des protocoles expérimentaux », nuance Isabelle le Ber. Mais ce n’est pas encore pour tout de suite.

Les dégénérescences fronto-temporales touchent autant les hommes que les femmes et représentent 10% des démences. Dans 20% des cas, l’origine de la maladie est génétique. En France, entre 15.000 et 20.000 patients sont atteints par cette maladie.

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