Inquiétude autour des "bébés Coca", ces enfants biberonnés aux sodas et souffrant de caries précoces

Des professionnels de santé alertent sur le syndrome du biberon: des bébés dès l’âge de 12 mois qui ont déjà la bouche pleine de caries.

On les appelle les « bébés Coca », ces jeunes enfants aux dents abîmées, noircies, biberonnés aux boissons sucrées, notamment aux sodas et en particulier au Coca-Cola. Un récent article de Mediacités évoque d’ailleurs ce phénomène dans les Hauts-de-France, bien qu’il ne soit pas cantonné à cette région.

Certains profesionnels de santé et de la petite enfance font ainsi état de bébés habitués à boire du cola. Sur les réseaux sociaux, des vidéos se voulant amusantes mettent en effet en scène des parents trinquant et faisant boire à leur enfant en bas âge – voire leur bébé – du Coca-Cola, parfois directement versé dans le biberon. Des habitudes alimentaires loin d’être anodines.

Des dents à l’état de racines

Ce phénomène est bien connu des professionnels de santé. « C’est ce qu’on appelait le syndrome du biberon », explique à BFMTV.com Marco Mazevet, délégué général du syndicat Les chirurgiens dentistes de France. Des bébés qui, dès 12 mois, ont déjà des incisives noires, comme si elles avaient été grignotées.

« Ce sont des nourrissons qui s’endorment avec le biberon ou boivent durant la journée et le soir après le repas des boissons sucrées, comme du Coca. En cabinet, on reçoit des enfants avec des dents à l’état de racines, très fragiles et très infectées. »

Ce syndrome, également appelé « carie multiple précoce du jeune enfant », se manifeste par l’apparition de caries sur les dents de lait, des incisives aux canines, voire jusqu’aux molaires.

« La salive n’est plus capable de neutraliser les acides qui se forment après une prise alimentaire, puisque ces enfants ne cessent de consommer des boissons sucrées, ce qui créé un déséquilibre, explique à BFMTV.com Christophe Lequart, chirurgien-dentiste et porte-parole de l’Union française pour la santé bucco-dentaire (UFSB). C’est la double peine avec les sodas: ce sont des produits acides qui déminéralisent les dents. »

Des « inégalités marquées »

Chez ces enfants de moins de 6 ans, il faut parfois enlever plusieurs dents, voire la quasi-totalité de la denture. Certains enfants se retrouvent ainsi sans dents jusqu’à ce que leurs dents définitives poussent, à partir de l’âge de 5-6 ans pour les premières et jusqu’à 12 ans environ.

« Chez des enfants, c’est très lourd comme opération, poursuit Christophe Lequart. Et les conséquences sont multiples, aussi bien pour la mastication, la phonation que sur le plan social et l’estime de soi. Imaginez les moqueries que ces enfants entendent de la part de leurs camarades. »

Il n’y a pas de données nationales ou régionales sur l’étendue du problème. Les derniers chiffrent datent de 2006. À l’époque, l’Union française pour la santé bucco-Dentaire (UFSBD) avait enquêté sur la santé des enfants, démontrant son amélioration. Elle relevait ainsi qu’à l’âge de 12 ans, l’indice carieux (qui représente le nombre moyen de dents cariées, absentes ou obturées par enfant) – qui était de 4,20 en 1987 et de 1,94 en 1998 – était de 1,23 en 2006. Et le taux d’enfants de 6 ans totalement indemnes de carie s’établissement cette année-là à 63,4%, là aussi en amélioration.

Haro sur le sucre

Malgré un tableau général positif, l’UFSBD notait des « inégalités » de santé bucco-dentaire « marquées ». « À 12 ans, 6% des enfants non-indemnes cumulent 50% des dents atteintes et 20% cumulent 72% des dents atteintes. » Des inégalités liées à la situation sociale des parents, pointait l’UFSBD. « Les enfants d’agriculteurs, d’ouvriers, d’inactifs, de même que les enfants scolarisés en ZEP ou en zone rurale, sont plus significativement atteints. »

Pour Marco Mazevet, des Chirurgiens dentistes de France, si ce syndrome est lié à un défaut d’hygiène dentaire, il est aussi associé à de mauvaises habitudes alimentaires. Notamment une surconsommation de sucre, aussi bien dans les boisson que dans l’alimentation solide. Il dénonce ainsi la présence de sucres cachés dans des produits salés, notamment transformés, et pointe les produits du petit-déjeuner destinés aux enfants.

« Avec un bol de céréales dès le matin, on a déjà consommé sa dose quotidienne de sucre, même sans avoir bu de jus d’orange. D’ailleurs on a peut-être l’impression qu’un verre de jus d’orange le matin pour un bébé ou un enfant en bas âge c’est bon pour la santé. Mais non, c’est trop. On n’est pas fait pour avaler l’équivalent de six oranges en vingt secondes. »

Coca, soda, jus de fruit, sirop, eau aromatisée

Il rappelle que la dose quotidienne de sucre recommandée est de 25g pour un adulte, la moitié pour un enfant. Pour Christophe Lequart, qu’il s’agisse de Coca, de soda ou de jus de fruit, le problème est le même: « c’est du sucre ».

Les professionnels de la santé bucco-dentaire rappellent la consigne: ne pas laisser un enfant s’endormir avec une boisson sucrée, qu’il s’agisse d’un cola, de lait, d’un sirop ou d’une eau aromatisée. Et brosser impérativement les dents des enfants après les repas du matin et du soir avec un dentifrice fluoré. Au-delà des problèmes dentaires, Marco Mazevet alerte sur les répercussions à long terme.

« Les dents ne sont que la partie visible du corps humain. De telles quantités de sucre ingérées à un si jeune âge font de ces enfants des candidats parfaits pour le diabète ou l’obésité précoce. On ne l’imagine pas mais les impacts sur la santé sont catastrophiques. »

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